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Israël vers l’inconnu

Dimanche, 05 février 2023

Israël n’a jamais été une « démocratie » au sens propre du terme connu dans les pays occidentaux qui ont inventé cette idéologie politique.

Celle-ci a des traits distinctifs comme le « principe de l’égalité des citoyens ». Par conséquent, il est fort étrange que l’opinion publique au sein de l’Etat d’Israël et des pays occidentaux amis de cette entité craigne pour la « démocratie israélienne » sous le nouveau gouvernement dirigé par le Likoud de Benyamin Netanyahu en coalition avec les partis de la droite biblique : le Parti sioniste religieux dirigé par Bezalel Smotrich, le Parti du pouvoir juif (Otzma Yehudit) dirigé par Itamar Ben-Gvir et le parti Shas dirigé par Aryé Deri.

Cette alliance gouvernementale entre le Likoud et les partis sionistes religieux extrémistes a poussé de nombreux partis d’opposition à déplorer ce qu’ils appellent la « démocratie israélienne » et à dire que l’avenir d’Israël est maintenant confiné entre « le pouvoir religieux biblique et le pouvoir démocratique », entre un Etat juif ou un Etat démocratique. Ceux-ci pensent que le nouveau gouvernement sera dominé par les partis sionistes religieux extrémistes et renoncera à ce qu’ils considèrent comme des qualités démocratiques pour se transformer en un Etat gouverné par la Torah et le Talmud, c’est-à-dire un Etat théocratique extrémiste. Au début de la formation de ce gouvernement, Benyamin Netanyahu a réfuté toutes les critiques et les craintes autour de la domination des politiques des partis sionistes religieux extrémistes sur le gouvernement. Il a souligné qu’Israël « ne sera pas gouverné par les lois du Talmud ». Mais ce qui s’est passé par la suite a révélé la soumission de Netanyahu à ces partis.

Les indices sont nombreux, notamment en ce qui concerne le projet de réforme du système judiciaire soumis à la Knesset par le ministre de la Justice, Yariv Levin, qui comprend la tutelle de la Knesset sur la Cour suprême. Ce projet de loi permet à la Knesset, à la majorité simple, d’annuler une décision de la Cour suprême et de modifier le mécanisme de nomination des juges en donnant à la Knesset plus de pouvoirs dans ce processus. Le fait qui a poussé la présidente de la Cour Suprême, Esther Hayut, à dénoncer le projet de loi, le considérant comme une « attaque sauvage contre le système judiciaire ». « Il ne vise pas à améliorer le système judiciaire, mais à l’écraser », a-t-elle déclaré. Netanyahu a défendu le projet et a rejeté les accusations portées contre lui, selon lesquelles le projet serait offensant pour la démocratie. Cette défense de Netanyahu est régie par ses intérêts personnels, du fait que les amendements le protégeront de toute condamnation par le pouvoir judiciaire pour ce qu’il avait qualifié de « persécutions politiques » et de « tentatives de coup d’Etat ». Sa défense est aussi régie par son souci de préserver la cohésion de sa coalition gouvernementale en adoptant le point de vue des partis sionistes religieux qui sont à l’origine de ce projet. Il cherche également à imposer une entière domination sur le pouvoir judiciaire.

Une autre preuve de la soumission de Netanyahu à ses partenaires sionistes religieux se trouve dans les efforts déployés par Ben-Gvir, ministre de la Sécurité nationale, pour imposer ses orientations politiques à la police en l’obligeant à adopter une approche plus sévère contre les manifestants, en procédant à des arrestations massives, en particulier contre ceux qui bloquent les routes, et en confisquant tous les drapeaux palestiniens. L’extrémisme de ce courant a atteint son apogée quand il a arrêté des dirigeants de l’opposition, les accusant de « trahison » et de « sédition », à cause de leur participation aux manifestations qui ont défendu le pouvoir judiciaire.

Une autre preuve : le soutien à l’imposition de lois plus racistes, dont la plus dangereuse est l’exécution des prisonniers palestiniens, la légitimation de l’assassinat des Palestiniens par les forces de l’occupation et l’octroi aux médecins du droit de ne pas traiter les patients arabes « parce qu’ils sont arabes », comme l’a déclaré le ministre Orit Strook du Parti sioniste religieux. Mais le plus important se trouve dans les directives de base du nouveau gouvernement, en particulier celle prétendant que « le peuple juif a un droit exclusif et incontestable dans toutes les régions de la terre d’Israël », ce qui signifie que ce gouvernement sera celui qui imposera une domination israélienne entière sur toute la terre de Palestine, par tous les moyens légitimes et illégitimes. Ces indices ont poussé l’écrivaine Dahlia Scheindlin à écrire dans Haaretz qu’« Israël est entré dans l’inconnu ».

L’inconnu réside dans le fait de ne pas décrire ce qui se passe comme la tyrannie des orientations juives en vue d’écraser la démocratie. La victoire de l’extrême droite juive est le choix d’une société qui pense que ces extrémistes sont à même de protéger la sécurité et la survie d’Israël. C’est là que réside le plus grand défi.

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