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Une nouvelle vision pour le barrage

Mardi, 02 juillet 2013

Il devient de plus en plus clair que l’Etat voisin, avec lequel nous avons vécu 70 années de guerre et de paix, est celui qui complote contre l’Egypte dans la région en amont du Nil.

Israël tente d’encercler l’Egypte aux sources du Nil jusqu’à la péninsule du Sinaï. Rien de nouveau à cela : depuis longtemps, les Israéliens ont annoncé que les frontières de leur Etat s’étendaient du Nil à l’Euphrate. Cela ne signifie pas inéluctablement l’occupation géographique, mais plutôt la domination politique. L’Egypte a toujours été la pionnière de la paix et le plus grand Etat arabe à signer un accord de paix avec Israël le 26 mars 1979. La question n’était facile ni pour l’Egypte, ni pour son président Anouar Al-Sadate. Le peuple égyptien a payé cher le prix de cette paix au niveau des relations avec ses voisins arabes, du prestige de l’Etat et de son rôle régional. Mais nous avons malheureusement échoué à exploiter au bénéfice de la politique étrangère de l’Egypte, de ses intérêts vitaux et de sa sécurité nationale, la paix conclue avec l’Etat hébreu. Il est alors possible de dire que la question du barrage de la Renaissance en Ethiopie nécessite une réflexion différente, puisque le langage des intérêts est le seul reconnu dans les relations internationales contemporaines.

D’abord, l’Egypte doit parler avec les Israéliens au sujet de cette manipulation dans la région des hauteurs du Nil, en particulier en Ethiopie. Ce sont les Israéliens qui ont murmuré à l’oreille de nos frères africains, leur disant que les Arabes ont pris le dessus des choses au cours du XXe siècle, grâce au pétrole qui est un cadeau de la nature, et qu’il est temps que les Africains se retrouvent en tête avec l’eau qui est aussi un cadeau de la nature. Bien que cette comparaison soit erronée, tous les pays d’un fleuve ont les mêmes droits de l’amont à l’aval. Donc, les droits historiques de l’Egypte en ce qui concerne l’eau du Nil n’ont pas à être revus, sauf dans l’objectif d’augmenter son quota conformément à la croissance démographique. C’est ici que je me permets d’avancer que la partie égyptienne a été trompée lors de la proposition de l’accord d’Entebbe concernant les Etats du bassin du Nil. Alors que le côté éthiopien avait avancé aux Egyptiens que son quota augmenterait, l’objectif réel et dissimulé était d’annuler les droits historiques de l’Egypte, obtenus par d’anciens accords dont le dernier est celui de 1959.

Ensuite, Israël, qui est un joueur ancien sur le continent africain, sait parfaitement que l’eau est une question de vie pour l’Egypte et qu’il est possible de faire pression sur Le Caire sur cette ressource naturelle. Si les Israéliens veulent l’eau du Nil, il faut qu’ils en parlent ouvertement avec les Etats en amont du Nil et les Etats du bassin de manière générale. Et cela, au lieu d’encourager avec malice la construction de barrages, dont les avantages procurés concernant la production d’électricité et le stockage de l’eau sont de loin minimes comparés aux dangers, surtout qu’il existe de nombreuses autres solutions de développement pour les Etats en amont. Ces Etats ont le droit de se développer, mais sans nuire aux droits de leurs voisins, puisque le droit concernant les fleuves stipule que les Etats en amont doivent s’entretenir avec toutes les parties concernées avant de construire des barrages à la source ou sur le cours d’un fleuve.

Il faut réaliser que l’unique moyen de régler la crise du barrage de la Renaissance est la diplomatie. Par exemple, il existe une proposition selon laquelle une route serait tracée des frontières soudanaises à la côte méditerranéenne en consacrant un port égyptien à l’exportation des produits soudanais et éthiopiens vers l’Occident au lieu d’un unique port soudanais sur la mer Rouge, qui est Port-Soudan.

N’est-il pas temps, en Egypte, de réfléchir à des mécanismes modernes, et à la capacité d’exploiter les outils ? La paix avec Israël doit être exploitée, et il en est de même pour les relations avec l’Ethiopie et le Soudan. Car les peuples ne se nourrissent pas de nationalisme et d’arabisme. Seuls les intérêts comptent.

Enfin, le barrage de la Renaissance ne sera pas le dernier des problèmes. D’autres initiatives sur les sources du Nil peuvent apparaître prenant pour prétexte la souveraineté nationale et les projets de développement, afin d’attirer la sympathie internationale et de faire échec au refus égyptien. Il suffit de signaler que les Etats-Unis, le secteur privé chinois, le Canada, l’Italie et même des capitaux arabes sont très enthousiastes quant au projet du barrage de la Renaissance.

La situation nécessite que l’Egypte modifie sa façon de réfléchir et qu’elle exploite tous ses mécanismes, ses outils et ses potentiels, afin de parvenir à une vision différente de la réalité amère que nous vivons actuellement.

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