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Quelle politique arabe de Washington dans l’après-Obama ?

Dimanche, 22 mai 2016

Quels seront les changements de la politique arabe et moyen-orientale des Etats-Unis après le départ du président Barack Obama de la Maison Blanche en janvier prochain ? Deux candidats s’acheminent vers l’investiture, en juillet, de leur parti dans la présidentielle américaine prévue en novembre : la démocrate Hillary Clinton et le républicain Donald Trump.

Tout sépare ces deux probables candidats à la course présidentielle en matière de politique étrangère. Chantre du slogan « L’Amérique d’abord », martelé tout au long de sa campagne électorale, Trump est partisan de l’isolationnisme et du retrait américain des affaires du monde, y compris du monde arabe et du Moyen-Orient. Cette vision, qui se rapproche d’ailleurs de celle défendue et appliquée par Obama durant ses deux mandats de huit ans, devrait se traduire par un refus ou une hésitation à s’engager militairement dans les conflits de la région. Le candidat républicain, tout en réaffirmant qu’il se tiendrait du côté des alliés des Etats-Unis, a souligné que les pays de la région devraient prendre en charge leur propre sécurité. Seule la lutte contre le terrorisme islamiste, celui de l’Etat Islamique (EI), est pour lui une raison suffisante pour une possible intervention militaire américaine susceptible d’engager des troupes sur le terrain. Il a indiqué à ce sujet être disposé, s’il est élu président, à mobiliser 30 000 militaires américains pour combattre l’EI en Syrie. Il a toutefois nuancé ses propos en soulignant préférer que le régime de Bachar Al-Assad et la Russie, qui est intervenue militairement aux côtés de Damas, fassent le travail à la place de Washington.

Fondamentalement, Trump n’inspire pas confiance dans le monde arabe et s’est même attiré l’hostilité des élites et des opinions publiques en raison de ses déclarations islamophobes et de ses amalgames entre musulmans, extrémisme et terrorisme. Dans sa vision de lutte contre l’islam radical, Trump a prôné que les Etats-Unis cessaient d’« importer l’extrémisme », en interdisant l’immigration de musulmans. Ces propos ont provoqué une levée de boucliers dans le monde arabo-musulman.

Presque le seul point en commun entre le candidat républicain et sa rivale démocrate porte sur le soutien indéfectible à Israël. Une position traditionnelle commune à tous les candidats à la présidentielle américaine qui cherchent à gagner les voix et les faveurs de la puissante communauté juive. Hillary Clinton est toutefois la candidate préférée d’Israël et du lobby pro-israélien aux Etats-Unis, l’AIPAC, malgré le fait qu’elle s’est opposée à Tel-Aviv en 2010 lorsqu’elle était secrétaire d’Etat lors du premier mandat présidentiel d’Obama, en raison de la politique de colonisation juive en Cisjordanie, notamment à Jérusalem-Est, que les Palestiniens veulent faire leur future capitale. A l’époque, elle considérait cette politique comme un obstacle à la reprise des négociations entre Palestiniens et Israéliens. Aujourd’hui cependant, Clinton évite soigneusement d’évoquer la question de la colonisation, préférant mettre en avant le soutien multiforme qu’elle entend apporter à Israël, une fois élue. Elle a souligné notamment à cet égard son engagement à maintenir la supériorité militaire d’Israël sur ses voisins arabes, à le soutenir dans d’éventuelles négociations de paix avec les Palestiniens et à le protéger de toute tentative de lui imposer les principes d’un règlement politique, en référence à une possible intervention du Conseil de sécurité de l’Onu. On prête, en effet, au président Obama, irrité par l’intransigeance du premier ministre israélien Benyamin Netanyahu, l’intention de faire adopter par l’exécutif onusien une résolution fixant les contours d’un règlement politique basé sur le principe de deux Etats, ou, à défaut, de faire une déclaration américaine en ce sens.

En revanche, la disgrâce de Trump auprès d’Israël et du lobby juif américain tient principalement à une malheureuse déclaration dans laquelle le candidat républicain a indiqué qu’il serait « neutre » dans d’éventuelles négociations de paix israélo-palestiniennes. Mais au fond, Israël et le lobby juif américain ne font pas confiance à Trump en raison d’un manque patent d’expérience en politique étrangère qui s’est traduit par des positions changeantes, des volte-face et un amalgame de démagogie et de populisme. Par contre, Clinton, est globalement en phase avec les traditions de l’establishment de la politique étrangère américaine, plus interventionniste, et sans doute moins isolationniste que son rival républicain. Elle était ainsi partisane de l’invasion américaine de l’Iraq en 2003, avant de se rétracter plus tard de l’intervention militaire occidentale en Libye pour renverser Muammar Kadhafi en 2011, et de frappes aériennes contre le régime syrien lorsqu’il s’était rendu coupable de l’usage de l’arme chimique contre ses opposants en août 2013. Mais consciente que l’opinion publique américaine est globalement contre des aventures militaires extérieures et ne voulant pas aliéner sa base démocrate, également hostile à des campagnes militaires inconsidérées à l’étranger, Clinton tente un jeu délicat d’équilibriste, dont l’objectif est de montrer qu’elle serait ferme dans ses positions et son action extérieures, sans toutefois aller jusqu’à commettre des actes irréfléchis .

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