Il est probable que les circonstances ayant entouré la catastrophe ferroviaire de Badrachine soient de loin plus atroces que l’accident luimême. Les récits des rescapés de la catastrophe révèlent le mauvais traitement qu’ils ont subi à l’intérieur du train. Cela vient démontrer qu’il existe toujours une situation tragique qui n’a été introduite, ni par le régime actuel, ni par celui qui l’a précédé, mais qui est un legs remontant à des décennies. Ce qui laisse à désirer c’est que l’actuel régime qui est né au lendemain de la révolution n’a rien fait pour y remédier.
Il s’agit de la situation du citoyen qui est comparable à celle des esclaves traités comme les bêtes et animaux qui n’ont aucun droit. Une situation qui est incarnée à merveille par les appelés dans les services militaires ou de la police, où le citoyen se trouve complètement soumis au pouvoir qui le manipule comme bon lui semble.
En réalité, cette situation est un héritage datant des époques de l’esclavage, à l’heure où tous les Egyptiens se trouvaient résignés face à un pouvoir tyrannique, qu’il soit ottoman, khédivial, britannique ou féodal. Ils étaient forcés aux travaux et ne percevaient en contrepartie que des miettes. Ils étaient, tels les esclaves, les sujets d’un pouvoir qui les manipulait à sa guise.
Les moments de soulèvement contre ces situations inhumaines n’avaient pas beaucoup de portées, et généralement, ils étaient étouffés avant même qu’ils ne soient enracinés dans la société. La révolution de Orabi, qui avait brandi son fameux slogan « Nous sommes nés libres et nous ne deviendrons plus jamais des esclaves », a été l’exemple le plus éloquent de ce que je viens d’écrire. Après la révolution de Orabi, ce fut l’avènement de la Révolution de 1952 qui avait pour moteur la fierté et la dignité.
Est-il pur hasard que les personnes ayant le plus défendu la dignité du citoyen soient celles-là mêmes qui se sont érigées le plus face aux partisans de l’obéissance aveugle qui nous gouvernent aujourd’hui et qui ont vu de leurs yeux cet incident fâcheux et les récits atroces qui l’ont accompagné ?
Les passagers du « train de la mort », qui s’avèrent dans la plupart être des appelés de la police et de l’armée, ont raconté comment ils étaient coincés tels des animaux dans les wagons du train. Ils étaient entassés les uns sur les autres et frappés à coups de bâton. En plus, ils étaient insultés et injuriés tout au long du voyage, étaient interdits de quitter leurs places même pour leurs besoins. Quel comportement odieux !
Ceux qui nous gouvernent aujourd’hui ne veulent pas seulement nous faire revenir aux idées du Moyen Age rigoristes et arriérées, mais également aux époques de l’injustice et de la tyrannie qui sont à jamais révolues depuis la révolution de janvier 2011. Que ce soit pour nous ou pour les passagers du train de l’esclavage.
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