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Mohamad Gad : Les responsables ministériels veulent savoir où implanter de nouvelles communautés »

Rasha Hanafy, Mercredi, 02 juillet 2014

Le Centre de Recherches sur le Désert (CDR) est chargé d'identifier les nappes phréatiques en Egypte pour réaliser un développement agricole durable dans les prochaines années. Mohamad Gad, un des chercheurs, explique sa mission.

Al-Ahram Hebdo : Spécialiste des nappes phréatiques et chercheur au Centre de Recherches sur le Désert (CRD), vous avez participé à l’identification des nappes dans les zones désertiques. Quel genre d’information appor­tez-vous ?

Mohamad Gad : Le ministère de l’Agriculture et de la Bonification des terres exige des cartes précisant les emplacements des nappes phréatiques dans tout le pays. La première phase consiste à connaître les lieux importants dans la Nouvelle Vallée et le désert Occidental. Le désert Est et la péninsule du Sinaï font objet de la deuxième phase, pour des questions de sécurité. Les responsables ministériels veulent d’abord savoir où ils pourront implanter de nouvelles communautés pour un développement agricole durable. Cet objectif exige de connaître parfaitement les emplacements des nappes phréatiques, leur nombre, leur qualité et combien d’années elles dureront. Ces informations sont censées aider à prendre les bonnes décisions pour le développement durable dans les zones désertiques.

— Les géologues du CRD élaborent également des cartes sur les couches terrestres. Cela vous servira-t-il pour les nappes phréatiques ?

— Absolument. Dans notre travail d’exploration, nous devons connaître les différentes couches terrestres et les taux de précipitations. Les eaux de pluies alimentent les nappes phréatiques. Ces dernières diffèrent dans leur taux de salinité selon les couches géologiques. Ces informations nous aident à savoir si on a besoin de dessalement ou non. Normalement, les eaux des couches proches de la surface sont des eaux douces, prêtes à être utilisées sans traitement.

— Vous avez déjà travaillé dans le désert Occidental. Quelles sont les zones prometteuses pour l’industrie agricole ?

— Je dois tout d’abord préciser que le CRD possède des cartes de toutes les nappes phréatiques d’Egypte. Ce que nous faisons est une actualisation pour connaître les nouvelles quantités d’eau et leur taux de salinité. A Farafra par exemple, dans la Nouvelle Vallée, il existe une zone de 135 000 feddans (56 700 ha) qui peut être cultivée. La nappe compte entre 22 et 112 milliards de m3. Il s’agit d’une eau douce exploitable jusqu’à 60 ans. Elle possède un taux élevé de fer mais qui peut être maîtrisé. Il existe d’autres régions aussi comme une superficie de 30 000 km2 qui s’étend du Darb Al-Arbéïne jusqu’à l'oasis Bahriya, située à l’ouest du Delta. De 18 à 19 000 km2 peuvent être bonifiés et irrigués de l’acquifère de Nubie de 70 000 milliards de m3 à des profondeurs de 400 à 1 000 mètres. On doit exploiter toutes ces richesses durablement pour les transmettre aux générations à venir.

— Pour utiliser ces ressources durablement, quel genre de culture est-il possible d’entamer ?

— Le Centre de recherches agricoles a fait des études sur des variétés de blé et d’orge qui résistent à des températures élevées et consomment peu d’eau. Je dois dire que la culture de la luzerne dans ces zones du désert Occidental pour l’exportation vers les pays du Golfe est une aberration ! Raison pour laquelle il faut arrêter la culture de cette plante fourragère dans toutes les zones du désert et la remplacer par des variétés qui consomment peu d’eau comme certaines variétés de millet.

— Il y a des années, des décisions stratégiques pour le développement agricole sur de nouvelles terres bonifiées du désert ont été prises, mais sans résultat. A quoi servent donc les informations que vous recueillez ?

— Quand le projet Toshka, au sud du pays, a été décidé dans les années 90, tous les chercheurs du CRD qui ont étudié la zone du projet ont averti que la quantité d’eau ne suffirait pas, outre le taux élevé d’évaporation qui atteint 60 %. Le réservoir des eaux phréatiques dans cette zone n’a pas été suffisamment étudié. 146 puits ont été creusés, dont 86 dans la zone d’Abou-Simbel, pour ce projet. Mais aucun ne fonctionne. Pourtant, le coût de la construction de ces puits a été de 2,5 milliards de L.E., outre une station d’élévation de l’eau sur le lac Nasser qui a coûté 4,5 milliards de L.E. ! Malgré tout cet argent, le projet a échoué. Nous avions aussi des réserves sur le projet intitulé « La voie du développement » du géologue Farouq Al-Baz. Mais nous ne pouvions rien faire. Nous faisons notre travail et soumettons les informations requises, en mentionnant nos réserves et craintes.

— Et le désert Est, possède-t-il des nappes phréatiques suffisantes pour des projets agricoles durables ?

— Le désert Est et la péninsule du Sinaï sont pauvres au niveau pluies, par rapport au désert Occidental. Les inondations et les pluies sont saisonnières. On peut réaliser des petits projets agricoles dans les vallées. Cela dépend de leur superficie. Par contre, il est riche en minéraux. Et donc d’autres projets industriels durables peuvent y être accomplis. Cela dépend toujours de la volonté politique.

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