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Le secteur touristique face au coronavirus

Nasma Réda, Mardi, 11 février 2020

Avec l'expansion du coronavirus en Chine, le secteur touristique égyptien craint une baisse du nombre des touristes chinois. L'Egypte a accueilli, en 2019, 300 000 touristes de l'empire du Milieu.

Le secteur touristique face au coronavirus
Les pyramides sont l'une des destinations favorites des Chinois.

Le coronavirus fait de plus en plus de victimes en Chine. Le nombre de décès a atteint près de 700 per­sonnes et le nombre de celles infec­tées dépasse 30 000 sur l’ensemble des citoyens début février. L’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) a déclaré que l’épidémie constituait une urgence de santé publique de portée internationale. Les autori­tés chinoises ont interdit à tous leurs citoyens de quitter le territoire pour éviter que le virus ne se propage. « C’est un coup dur pour le tourisme dans le monde, surtout pour les destinations européennes, mais aussi pour l’Egypte », souligne Nasser Abdel-Aal, ancien conseiller touristique du ministère du Tourisme et des Antiquités en Chine. Il pré­cise que 50 % des vacanciers chinois se ren­dent en Europe et que l’Egypte reçoit elle aussi une grande part de cette clientèle.

La Chine représente un marché pourvoyeur important pour le tourisme mondial. Le nombre de touristes chinois est en croissance continuelle depuis dix ans et a atteint, en 2019, près de 200 millions. Les touristes chinois effectuent par ailleurs 1/5 des dépenses touristiques à l’échelle mondiale. L’Egypte, première destination chinoise en Afrique, a accueilli, au cours des deux der­nières années, un nombre important de tou­ristes venant de l’Empire du Milieu, avec 277 000 personnes en 2018 et presque 300 000 en 2019. « Avec les campagnes de promotion et étant donné les bonnes relations bilatérales égypto-chinoises dans différents domaines, on prévoit une croissance considé­rable du nombre de touristes venant de Chine. On espère qu’il atteindra 500 000 ou plus en 2020 », indique Abdel-Aal.

Un objectif qui peut paraître difficile à réa­liser suite aux dernières mesures prises par Pékin consistant à suspendre tous les voyages touristiques pour limiter la propagation du coronavirus. « Cette décision vient en pleine saison. Les Chinois sont en congé pour fêter le Nouvel An chinois, congé qui a débuté le 25 janvier et dure près de deux semaines », dit Abdel-Aal, ajoutant que les autorités chinoises ont décidé de prolonger ces vacances jusqu’au 14 février.

Le ministre du Tourisme et des Antiquités, Khaled El-Enany, a déclaré que tous les vacanciers chinois actuellement en Egypte sont en bonne santé. « Ils vont continuer leur séjour normalement et quitteront l’Egypte au moment prévu ou quand ils le désirent », a-t-il déclaré, précisant que l’Etat égyptien sou­tient la Chine pour l’aider à traverser cette crise. Le ministère égyptien de l’Aviation civile a annoncé que les vols vers les aéro­ports chinois étaient maintenus en fonction des réservations. « Il n’y a pas d’arrêt com­plet des vols, mais nous allons diminuer leur nombre pour réduire nos pertes, surtout que le nombre de passagers est peu élevé. Les vols continuent à destination de Hong Kong et de Pékin, et nous nous sommes engagés à transporter les touristes chinois qui se trou­vent en Egypte », a assuré Mohamad Manar, ministre de l’Aviation civile, dans un com­muniqué de presse. Il a en outre indiqué qu’un avion Airbus avait rapatrié 301 Egyptiens qui se trouvaient à Wuhan, la ville chinoise la plus touchée par le virus. « Ceux-ci ainsi que l’équipage accompagnant les passagers ont été isolés pour 14 jours dans un hôtel dans le gouvernorat de Matrouh, afin de s’assurer de leur état de santé », a-t-il ajouté.

La compagnie aérienne nationale Egyptair avait augmenté, ces dernières années, ses vols vers la Chine, dont le nombre a atteint sept par semaine, ciblant Pékin, Hong Kong, Guangzhou, Hangzhou et Chengdu. Par ailleurs, les compagnies aériennes chinoises assurent des vols réguliers vers l’Egypte.

L’ambassadeur chinois au Caire, Liao Liqiang, a déclaré lors d’une conférence de presse que le tourisme chinois en Egypte et dans le reste du monde reviendra à son niveau normal après la fin de la crise du coro­navirus. « Cette période que traverse actuel­lement la Chine exige que Pékin assume ses responsabilités internationales en empêchant la propagation du virus dans le monde », a-t-il indiqué. L’ambassadeur chinois organise d’ailleurs continuellement des conférences de presse pour informer les Egyptiens des der­nières nouvelles en provenance de Chine, tout en saluant le soutien égyptien.

D’importants efforts

Le secteur touristique face au coronavirus
L'Egypte est la première destination touristique chinoise en Afrique.

D’aucuns s’inquiètent. « Visant un nouveau nombre record pendant le premier trimestre 2020, les 24 entreprises touristiques égyp­tiennes opérant en grande partie avec le marché chinois font face à une vraie crise après la décision du gouvernement chinois d’interdire à leurs citoyens de quitter la Chine. C’est une catastrophe et une grande perte pour les agences, qui peut leur coûter près de 15 millions de dollars en raison de l’annulation des réservations », indique Mohamad Fathi, membre du Comité touris­tique pour la promotion du tourisme culturel au ministère du Tourisme et des Antiquités. Il souligne qu’au cours des cinq dernières années, les efforts déployés par les respon­sables du tourisme et des antiquités en Egypte pour attirer les touristes chinois ont été fruc­tueux, avec la participation officielle des ministres des deux pays dans des conférences internationales ainsi que des visites conti­nuelles des responsables des deux côtés. « Plusieurs autres facteurs ont aussi contri­bué à l’augmentation du nombre de touristes chinois en Egypte, à savoir l’amélioration des infrastructures, le grand nombre de guides touristiques compétents en langue chinoise, les investissements dans les domaines liés au tourisme et la facilité des procédures relatives à l’octroi du visa », indique, quant à lui, Abdel-Aal. Les touristes chinois peuvent obtenir un visa d’entrée dans les aéroports égyptiens, à condition d'être en groupe et d'organiser leur voyage via une agence.

Selon d’autres responsables du secteur du tourisme, la situation n’est toutefois pas aussi dramatique. En effet, on observe depuis peu une tendance chez les voyageurs chinois, qui se détournent de plus en plus des tour-opéra­teurs en faveur du tourisme individuel. « Il est connu que le touriste, qui organise ses voyages sans compter sur des agences ou des groupes de voyage, dépense davantage, et c’est la tendance actuelle en Chine. Cela peut compenser les pertes enregistrées début 2020 », assure l’ex-conseiller égyptien en Chine. Et d’ajouter que les professionnels du secteur devront également, à la fin de la crise du coronavirus, répondre aux besoins des jeunes chinois, qui ont commencé à organiser leurs propres voyages.

Les destinations préférées des Chinois en Egypte sont non seulement les sites archéolo­giques tels que les pyramides de Guiza, Louqsor et Assouan, mais aussi les destina­tions balnéaires. De nouveaux genres de tou­rismes égypto-chinois sont par ailleurs en croissance, tels que le voyage d’affaires et le tourisme de conférences. « Il faut contourner cette crise pour ne pas perdre les efforts déployés par les deux pays dans le secteur du tourisme au cours des deux dernières années. Sinon, on commencera à zéro. J’espère qu’avec le début du printemps, le flux touris­tique en provenance de Chine reprendra », conclut Abdel-Aal.

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