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Le Musée de Damas revit enfin

(AFP), Mardi, 06 novembre 2018

Statues en marbre, mosaïques, sarcophages en pierre ... Exhumés des dépôts dans la Syrie en guerre, des vestiges millénaires ont retrouvé leur place dans le Musée national de Damas, qui a rouvert ses portes après six années de fermeture.

Le Musée de Damas revit enfin
(Photo : AP)

Dans les jardins du Musée national de Damas, fermé à cause du conflit qui déchire le pays depuis 2011, les visiteurs sont accueillis par l’imposante sculpture en pierre calcaire d’un lion de Palmyre, joyau de la cité antique syrienne vieux de 2 000 ans. Haute de trois mètres, la sculpture de 15 tonnes, appelée également le lion Al-Lât, du nom de la déesse pré-isla­mique de la fécondité et de la fémi­nité, avait été détruite par les djiha­distes du groupe Daech qui s’étaient emparés de Palmyre, « la perle du désert » syrien, en mai 2015. Mais les morceaux éparpillés ont été assi­dûment rassemblés.

Le Musée de Damas revit enfin
(Photo : AFP)

« Pour le moment, les visiteurs n’ont accès qu’à une aile où 1 500 objets sont exposés, sur plus de 100 000 que recèle l’institution », explique Mahmoud Hammoud, à la tête de la Direction Générale des Antiquités et des Musées (DGAM). Ils pourront bientôt déambuler librement dans d’autres salles, mais ils peuvent déjà admirer des mosaïques des Ve et VIe siècles, arborant parfois des pan­thères et des coqs. Il y a aussi la sta­tue romaine en marbre blanc d’un sportif nu au corps sculptural, datant du IIe siècle de notre ère, ou encore un imposant sarcophage de Palmyre, sur lequel est juchée la statue d’un notable à demi couché, tenant à la main un gobelet. Sur les côtés, des fresques élaborées sculptées dans la pierre.

Protéger les trésors

Le Musée de Damas revit enfin
(Photo : Reuters)

Situé au coeur de Damas, le musée national, fondé en 1920, a fermé en 2012. Fief gouvernemental, la capi­tale est restée relativement à l’abri des violences. Mais elle était deve­nue la cible d’obus tirés par les rebelles. De nombreuses pièces ont alors été transférées en lieux sûrs, les responsables craignant de voir se reproduire en Syrie les pillages ayant frappé les musées en Iraq au lende­main de l’invasion américaine en 2003. « Nous avons fermé tous les musées (...) et vidé toutes les salles », se souvient Maämoun AbdulKarim, ancien directeur de la DGAM. Au total, 300 000 pièces appartenant aux 34 musées de Syrie, dont 80 000 de Damas, ont été mises à l’abri dans des endroits secrets protégés des incendies, des obus et des inonda­tions. « Nous avons emballé et placé les objets dans des coffres-forts », explique le directeur des bâtiments historiques à la DGAM, Ahmed Dib.

« Les pièces difficiles à transporter sont restées sur place, mais proté­gées avec des blocs en ciment » pla­cés tout autour, se souvient-il. Déménagées en 1936 dans le bâti­ment actuel du Musée national de Damas, les collections sont réparties en fonction de leur périodicité histo­rique : préhistoire, période classique, ère islamique et époque moderne. Elles vont des conquêtes d’Alexandre Le Grand (323 av. J.-C.) à la fin de l’ère byzantine et le début des conquêtes musulmanes.

Selon la DGAM, plusieurs sites archéologiques à travers le pays ont été endommagés par la guerre, dont la citadelle médiévale d’Alep (nord), deuxième ville de Syrie, le temple hellénistique de Bêl et le célèbre arc de triomphe à Palmyre. L’Unesco a d’ailleurs inscrit six sites syriens sur sa liste du patrimoine mondial en péril, dont la vieille ville d’Alep, la citadelle de Saladin et le vieux Damas.

Le Musée de Damas revit enfin
(Photo : AFP)

Pour certains, la restauration du Lion de Palmyre symbolise un retour à la stabilité à un moment où le régime Al-Assad, soutenu par l’allié russe, a consolidé son emprise sur la capitale et ses environs. « C’est une des premières statues à avoir été restaurées », confie, à l’AFP, l’ar­chéologue polonais Bartosz Markowski, qui avait déjà contribué en 2005 à une rénovation de la statue. En 2016, quand les forces gouverne­mentales soutenues par l’allié russe ont chassé les djihadistes de Palmyre, l’archéologue s’est retrouvé devant le lion fracassé. De nouveaux travaux de restauration ont alors été menés. « C’est quelque chose d’important pour les gens. Ils peuvent y voir le symbole d’un conflit qui touche à sa fin. Lentement, mais la situation s’améliore », poursuit l’archéologue. Pour compléter ce puzzle, une pièce manquait. Entre les pattes du lion, une antilope échouée avait perdu son museau. Retrouvé, cette semaine seulement, il a été fixé sur la sculp­ture à la veille de l’inauguration.

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