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L’art islamique dans l’Empire du Milieu

Doaa Elhami, Mardi, 05 juin 2018

Publié par le Centre des études islamiques de la Bibliotheca Alexandrina, le livre Al-Fann Al-Islami fi Al-Sine (l’art islamique en Chine) s’intéresse à l’architecture et à l’art islamiques, très présents dans les mosquées et cimetières musulmans de Chine. Passage en revue.

L’art islamique dans l’Empire du Milieu

Bien que la Chine se trouve loin des pays musulmans, cela n’a pas empêché l’art islamique de s’y répandre. C’est ce qu’explique le livre Al-Fann Al-Islami Fi Al-Sine (l’art islamique en Chine), dont la version arabe a été publiée récemment par le Centre des études islamiques de la Bibliotheca Alexandrina. Le livre a, à l’origine, été rédigé en chinois par l’auteur Yangh Qoyyingh, puis traduit en anglais, et enfin de l’anglais vers l’arabe par Ahmed Amin, expert en archéologie islamique à l’Université du Fayoum. Le livre est divisé en 4 chapitres et illustré de belles photos qui reflètent la richesse de l’art islamique dans l’Empire du Milieu.

L’art islamique dans l’Empire du Milieu

L’apparition de l’art islamique en Chine a commencé très tôt, vers la moitié du VIIe siècle, soit le Ier siècle de l’hégire, grâce aux commerçants musulmans qui partaient d’Inde, d’Iran et de la péninsule arabique pour la Chine. Parmi ces derniers, ceux qui se sont installés dans la région côtière sud-est de la Chine ont bâti des mosquées pour y prier, et y ont répandu non seulement la religion musulmane, mais aussi son art avec tous ses aspects matériaux et immatériaux.

Les premières mosquées sont celles de Qowanghta à Qwanghcho, de Tchinghgingh à Tchowatchou, de Fanghoangh à Hanghtcho et, enfin, la mosquée de Chianhka à Yanighcho. A cette époque prématurée (du VIIe au XIIIe siècle), les styles architecturaux dominants étaient les styles persan et arabe. Les édifices, accompagnés de somptueux minarets, suivaient le style arabe, à l’instar de la niche du mihrab de la mosquée de Tchinghgingh. Cette dernière est ornée de versets coraniques avec l’écriture « thuluth ». Mais à partir du XIVe siècle, « les mosquées ont pris le style traditionnel des palais chinois somptueux jusqu’au XXe siècle », indique le traducteur dans l’ouvrage. En guise d’exemple, les mosquées érigées au nord de la Chine et dans la région sud du fleuve Yaightsy, notamment dans la capitale de Pékin qui comprend 70 mosquées, dont celle de Niougih, qui se compose de plusieurs cours carrées avec une entrée surmontée de la « tour d’observation de la lune ». « A l’arrivée du Ramadan, l’imam observe de cette tour la naissance du croissant ainsi que le début du mois et sa fin », dit Ahmed Amin.

Bien que le style architectural extérieur de la mosquée soit chinois, son intérieur est purement islamique. « La maison de prière », qui est divisée en 42 parties, et le mihrab sont ornés de versets coraniques. Les mosquées bâties depuis le XXe sont composées d’édifices modernes avec des dômes et des minarets. La Chine possède aujourd’hui plus de 35 000 mosquées anciennes et modernes, dont la plupart ont été rénovées et élargies.

Dans le deuxième chapitre du livre, l’auteur indique qu’on trouve en Chine plusieurs khanqas, endroits où les soufis s’isolaient pour mener librement leurs rites religieux. Ces khans ont aujourd’hui été transformés en des centres culturels et religieux. Parmi eux, citons le khanqa de Honghlhefo à Ninghechia, qui s’étale sur 4,67 hectares. En fait, la Chine a connu le soufime — courant mystique de l’islam — avec l’arrivée des premiers musulmans venant d’Asie mineure et de la péninsule arabique. Les premiers soufis couvraient les tombes de leurs imams avec des coupoles au style arabe et les annexes des bâtiments de commémoration sont couvertes de dômes dans le style de l’Asie mineure ou chinois. Ces dômes sont visités jusqu’à nos jours, surtout par les soufis.

La calligraphie, motifs décoratifs

L’art islamique dans l’Empire du Milieu
Il y a en Chine aujourd’hui plus de 35 000 mosquées.

L’architecture des sanctuaires des cimetières des cheikhs et oulémas, qui ont joué un rôle primordial dans la diffusion de la religion islamique en Chine, est elle aussi inspirée de l’art islamique. Celui de Khoga Afaq à Kachghar en est l’exemple par excellence. Les quatre coins du bâtiment sont surmontés de minarets cylindriques, dont les sommets ont la forme d’une couronne inversée. « Le complexe architectural du sanctuaire de Khoga Afaq représente clairement les caractéristiques architecturales de l’Asie mineure, riche en couleurs vivantes », déclare Amin.

Quant au 3e chapitre, il est consacré à la calligraphie, aux manuscrits religieux et à la porcelaine. La calligraphie arabe orne les mosquées et est intégrée aux motifs décoratifs taillés dans le bois ou la pierre. D’ailleurs, la calligraphie arabe est utilisée à côté des signes chinois. « Ainsi est née la calligraphie islamique chinoise, créant diverses formes : carré, triangle et cercle », souligne Amin. La Chine conserve des manuscrits coraniques datant du XIIIe siècle à la bibliothèque de l’Institut islamique, dans la mosquée Doneghchi et la mosquée Gyizi de la province de Shanghai. Quant à la porcelaine chinoise, elle a une bonne réputation au niveau mondial, surtout celle décorée de motifs botaniques et géométriques connus dans l’art islamique.

Le 4e et dernier chapitre, consacré aux rites islamiques en Chine, montre au lecteur comment les Chinois musulmans respectent les traditions islamiques lors de leurs célébrations. Outre les 5 prières quotidiennes et le jeûne du Ramadan, « les musulmans chinois suivent les traditions islamiques dans les diverses célébrations : celles de la naissance, du mariage et du deuil », commente Amin dans le livre. La naissance est célébrée par la présence de l’imam du quartier pour réciter, à voix basse, l’appel à la prière dans l’oreille droite du nouveau-né et sa fin dans son oreille gauche. Le contrat de mariage doit lui aussi être enregistré par l’imam, qui termine cette célébration en souhaitant aux mariés une vie pleine de prospérité et de bénédiction. Quant au deuil, les Chinois musulmans suivent les rites islamiques, comme l’enterrement rapide du défunt, le cortège funéraire et surtout la prière funéraire. « Le gouvernement chinois respecte les rites funéraires des musulmans. Leurs cimentières et mosquées sont répandus partout en Chine, sans exception », conclut le traducteur dans le livre.

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