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Violences : Retour sur l’attaque du Sémiramis

Caroline Odoz et Dalia Farouq, Mardi, 05 février 2013

L’attaque du Sémiramis par un groupe de voyous a défrayé la chronique. La chaîne hôtelière, qui a remercié les révolutionnaires pour leur aide à chasser les assaillants, veut éviter de faire enfler la polémique. Les alentours sont en train d’être nettoyés.

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Le désordre ravage l'hôtel.( Photos : Mohamad Abdou )

Mardi dernier en fin de matinée, sur la corniche face à l’entrée réservée à la clientèle de l’hôtel Sémiramis, le sol est jonché de débris de marbre et de blocs de pierres. Des cendres témoignent des pneus et des arbres brûlés dans les environs immédiats de l’hôtel des jours durant.

L’air est étouffant : les gaz lacrymogènes brûlent la peau et font pleurer les yeux. Quelques gamins noirs de suie, des passants, quelques manifestants et un cordon de policiers sont présents autour de l’hôtel.

Le Sémiramis a été attaqué par des voyous alors que les affrontements entre manifestants et forces de l’ordre se déroulaient à l’extérieur, sur la corniche, à l’entrée du pont Qasr Al-Nil. Le pont est l’un des points chauds des manifestations dans la capitale depuis vendredi 25 janvier. Mais c’est la première fois qu’un établissement touristique est directement attaqué et fait l’objet d’une tentative de pillage, alors que depuis le début de la révolution, il y a deux ans, les manifestations et les affrontements sont continuels.

Sur la façade du Sémiramis, des plaques de marbre ont été arrachées et les vitrines de l’entrée clientèle ont été remplacées par de grandes plaques de fer. Des employés déplacent des chaises brisées et du matériel cassé ou calciné. Ils ont pour instruction de ne donner aucune information.

Une quinzaine de voyous, à la faveur des affrontements entre policiers et manifestants, ont réussi à pénétrer, le 29 janvier soir, au milieu de la nuit, dans le lobby de l’hôtel pour le piller. S’en est suivie une bataille.

S.O.S du personnel

Dès le début de l’attaque, le personnel de l’hôtel a contacté les autorités et a procédé à l’évacuation des clients. Mais les circonstances étant telles que l’intervention de la police a été retardée. Les employés de l’hôtel risquaient d’être débordés alors que les voyous se déchaînaient dans le lobby. Le personnel s’est mis alors à demander de l’aide. Il a lancé des messages S.O.S via Twitter : « Urgence ! Nous sommes attaqués ! Des voyous sont dans le lobby du Sémiramis ! Nous avons besoin d’aide ! ».

Leurs appels au secours seront finalement entendus, pas seulement par la police, mais aussi par les manifestants qui, avant de retourner à leurs affrontements sur le terrain, ont foncé sur le Sémiramis pour prêter main forte aux employés, aider à l’évacuation des clients, et régler la situation.

Tous les clients ont pu être évacués, et ont été relogés à l’hôtel Intercontinental City Stars à Madinet Nasr, loin des zones de manifestations.

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Les ouvriers installent des grilles en métal. (Photos : Mohamad Abdou)

Le lendemain, le compte Twitter du Sémiramis a lancé ce message : « Merci à tous les révolutionnaires qui se sont battus à nos côtés hier ... Vous êtes fantastiques ». Le personnel de l’hôtel Shepheard, qui n’avait alors aucun client, est aussi venu à la rescousse. L’hôtel sera réattaqué le lendemain par des voyous, finalement sans succès.

Fermeture jusqu’à nouvel ordre

« L’hôtel sera fermé jusqu’au rétablissement total de la sécurité », précise Nabila Samak, directrice des relations publiques au Sémiramis, rappelant à tous sur Twitter que « notre priorité absolue est la vie et la sécurité de nos clients et employés ». Tout le personnel a également été évacué, à part ceux qui s’occupent du nettoyage et ceux qui assurent la sécurité du bâtiment. L’hôtel est bien évidemment fermé et ne reprendra ses activités qu’une fois le calme revenu. 25 suspects ont été interpellés par la police à la suite de ces incidents, et des blocs de béton ont été installés autour de l’hôtel.

Le Sémiramis, sans doute par refus d’alimenter toute polémique, et pour éviter que la presse ne fasse ses choux gras de l’affaire, a donné des consignes strictes à l’ensemble de son personnel concernant les communications sur la situation. L’attitude est sans doute sage à l’égard de la situation globale du tourisme en Egypte. Les interviews ne sont pas possibles, seul un communiqué officiel saluant le courage des employés et le travail de la police a été publié.

Impact faible au vu de la situation générale

L’impact de cette attaque sur le tourisme égyptien reste à déterminer. Le secteur souffre avant tout de la situation politique globale depuis la révolution, et les signes de reprise qui apparaissent régulièrement entre deux tempêtes politiques sont faibles.

L’ensemble des événements qui secouent une nouvelle fois l’Egypte depuis le vendredi 25 janvier, ainsi que l’ensemble des images diffusées par les médias, sont déjà fortement dissuasifs pour le voyageur lambda, quel que soit son amour pour l’Egypte. Les agences de voyages peinent également à promouvoir la destination dans un tel état des choses et ne souhaitent pas prendre le risque de recommander une destination où les conditions de voyage risquent à l’évidence d’être perturbées.

« L’incident de l’attaque du Sémiramis a un très mauvais impact sur le tourisme qui agonise actuellement en Egypte. La situation s’est empirée depuis la révolution. Beaucoup d’agences en Europe ont suspendu leurs voyages en Egypte. Les méga-tour-opérateurs internationaux sont très inquiets. Ils nous posent des questions pressantes concernant la situation actuelle et la sécurité en Egypte », regrette Elhami Al-Zayat, président de l’Union des chambres de tourisme. « Je ne sais pas quoi dire aux tour-opérateurs et aux responsables du tourisme de par le monde. Comment puis-je inviter les gens à visiter l’Egypte avec ce climat instable ? », se lamente Al-Zayat .

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