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Le patrimoine syrien en péril

Doaa Elhami, Lundi, 18 mai 2015

En quatre ans de conflit entre le régime de Bachar Al-Assad et les rebelles, 290 sites et monuments syriens ont été détruits ou endommagés, selon l'Institut des Nations-Unies pour la formation et la recherche (Unitar). Une situation alarmante.

Le patrimoine syrien en péril
La mosquée des Omeyyades a subi d'énormes dégâts. (Photo : AP)

Sur les 290 sites syriens endommagés, 24 ont été entièrement détruits, 189 ont été partiellement touchés et 77 ont subi des dégâts mineurs. Les causes de cette catastrophe sont nombreuses. Aussi bien le régime que les rebelles utilisent des forteresses antiques comme bases militaires. Pendant que l’armée syrienne a positionné des tireurs embusqués dans la citadelle d’Alep, l’une des forteresses les plus anciennes et les plus vastes au monde, les rebelles se sont emparés du Krak des chevaliers, une forteresse qui remonte au temps des croisades. « Celui qui connaît la ville d’Alep reconnaît à quel point le carnage et la destruction ont ôté à la ville son âme, bien avant la révolution », déplore l’écrivain syrien Khaled Khalifa, dans un entretien avec Al-Ahram Hebdo.

Ce sentiment pessimiste décrit par l’écrivain syrien est accentué à cause de la destruction des sites antiques et touristiques, à l’instar du Souq antique d’Alep, qui a été bombardé, et la mosquée des Omeyyades ou la Grande mosquée d’Alep. Celle-ci a été sévèrement endommagée en 2012 par un incendie au cours des combats qui ont eu lieu dans l’ancienne ville. 5 mois plus tard, le minaret de cette mosquée a été détruit pendant les combats entre les rebelles et l’armée syrienne. La mosquée est inscrite sur la liste du patrimoine culturel de l’Unesco. La mosquée renfermait d’anciens manuscrits ainsi que quelques pièces supposées appartenir au prophète Mohamad : trois cheveux et un fragment de dent. Ces trésors ont été aussi dérobés.

Les violences sont accompagnées de pillages, de fouilles clandestines partout en Syrie. A Damas, des milliers de manuscrits et de pièces d’antiquités sont dérobés chaque jour et acheminés sur le marché noir par des groupes criminels organisés.

Malgré ce désastre, les responsables des antiquités syriennes tentent de sauver l’héritage historique. « Nous avons placé dans des lieux secrets environ 300 000 pièces et des milliers de manuscrits appartenant aux 34 musées de Syrie, dont 80 000 au seul musée de Damas », a expliqué Mämoun Abdel-Karim, chef des Antiquités et des musées syriens (DGAM). Selon lui, la mission la plus difficile a eu lieu le 2 août 2014 à Deir Ezzor (est), qui était sur le point d’être prise par le groupe de l’Etat Islamique (EI). « Pendant une semaine, avec deux collègues, nous avons tout enveloppé. Nous avons tout mis dans un camion », raconte avec émotion Yaarob Al-Abdallah, directeur des Antiquités de Deir Ezzor à ce moment. « Nous avons entreposé les caisses dans un avion militaire au milieu des soldats tués ou blessés. Ce fut terrible, mais nous avons réussi », ajoute-t-il. Quant à Abdel-Karim, il ne cache pas son inquiétude quant aux dommages causés à 300 sites et 445 bâtiments historiques dans toute la Syrie, comme à Mari, Doura Europos, Apamée, Ajaja (nord-est), la vallée de Yarmouk à Deraa (sud) et Hamam Turkoman près de Raqa (nord). Plus que jamais, le patrimoine culturel syrien est en péril.

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