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Réseau mobile : pari risqué pour Telecom Egypt

Dahlia Réda, Mardi, 08 avril 2014

Telecom Egypt se lance dans la téléphonie mobile au côté des trois sociétés déjà existantes. L’unique opérateur de téléphonie fixe espère doper ses revenus, mais pourrait finalement y perdre.

Réseau mobile
La licence uniée peut-elle favoriser la position de TE ? (Photo : Al-Ahram)

La licence de portables récemment accordée à Telecom Egypt (TE) est loin de réjouir ses futurs concurrents tout en suscitant de larges doutes sur l’avenir de TE.

Les trois opérateurs actuels de portables : MobiNil, Vodafone et Etisalat, refusent le privilège accordé à Telecom Egypt. La licence lui a été accordée par décret direct, sans appel d’offres. Pour montrer leur opposition, les responsables des trois companies se sont abstenus d’assister à la conférence de presse pour le lancement de la quatrième licence. Une source au sein de MobiNil, qui a souhaité garder l’anonymat, dénonce « le soutien du gouvernement (ndlr : représenté par le ministère des Télécommunications et le régulateur des télécoms) à la licence de TE. Le gouvernement favorise injustement la position de TE au détriment des autres sociétés de téléphonie mobile ».

TE détient déjà 80 % du marché des télécoms, avec des parts majoritaires et parfois des monopoles dans tous les secteurs dépendants : Internet et infrastructures d’Internet, téléphonie fixe, appels internationaux et réseaux Smart. La licence, nommée « unifiée », donne à TE le droit à présenter tous les services des télécoms, dont les services mobiles. TE devra payer au gouvernement 2,5 milliards de L.E. avant fin juin. Le dernier arrivé sur le marché était Etisalat. La compagnie avait dû débourser 2,5 milliards de dollars suite aux enchères lancées.

En plus, TE n’aura pas à assumer les coûts d’investissement pour implanter de nouveaux réseaux. Elle louera ses fréquences 3G aux trois sociétés déjà existantes. C’est ce qu’on appelle un réseau virtuel, c’est-à-dire sans fréquences.

La 4e licence, qui visera les régions négligées, part avec un fort potentiel de croissance. Bien que le marché compte déjà 92 millions de lignes de portable, ce nombre est largement concentré dans les classes sociales les plus aisées. « 40 millions d’Egyptiens possèdent deux ou trois lignes », explique Taymour Dreini, analyste à EFG-Hermes. Une grande partie de la population, selon lui, ne possède pas encore de portable.

Pas de favoritisme

Le gouvernement rejette toute accusation de favoritisme en faveur de l’opérateur public. Atef Helmi, ministre des Télécommunications, a affirmé lors d’une conférence de presse, le 2 avril, que la première phase du lancement de la licence unifiée repose sur un plan permettant à tous les opérateurs existants d’offrir l’ensemble des services des télécoms. Pour lui, la licence unifiée offerte vise à renforcer la compétition. Pourtant, l’ensemble du secteur est largement dominé par TE.

Le plan, qui s’étend sur cinq ans, permettra en contrepartie aux trois sociétés de téléphonie mobile d’acheter une licence de téléphonie fixe à 100 millions de L.E. Elles pourront offrir plus de services comme les appels internationaux, Internet à haut débit et le service des câbles sous-marins qui permettent la transmission des bases de données, pour 300 millions de L.E.

Finalement, le ministre a également annoncé qu’il aura à convaincre les trois sociétés de portable de contribuer à la création d’une nouvelle « entité » publique en 2015. « Cette nouvelle entité sera une autorité gouvernementale, où TE aura les mêmes droits et les mêmes engagements que les autres opérateurs sur le marché », a-t-il affirmé.

L’entité aura pour objectif d’investir « dans l’infrastructure des télécoms, ce qui permettra d’améliorer le service et d’offrir des prix plus concurrentiels ». Le ministre souhaite étendre les infrastructures aux régions privées de ces services ou sous-développées.

Lourdes contreparties

Cette ouverture du marché est bien accueillie par plusieurs analystes, mais elle aura un impact négatif sur les résultats de TE. Sara Chebeik, analyste auprès de CI Capital, note que le fait de permettre aux trois sociétés de portable d’obtenir la licence internationale risquera de faire perdre à TE sa part dans les appels internationaux qui constitue 36 % de ses revenus annuels. En outre, la contribution des sociétés de téléphonie mobile aux infrastructures « risquera également de faire perdre à TE ses revenus provenant de la location de ces infrastructures », selon l’analyste.

TE devra aussi vendre ses parts de Vodafone Egypt, sa poule aux oeufs d’or, pour acheter la 4e licence. « TE sera obligée de vendre ses parts avant juin 2016, date de l’introduction de la 4G en Egypte. La rentabilité générée par les parts de TE dans Vodafone constitue au moins la moitié de ses profits », poursuit Sara Chebeik. L’analyste du marché des télécoms craint un impact négatif de ces évolutions sur l’avenir de 47 000 employés de TE.

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