Depuis la révolution de janvier 2011, voir une voiture ou un magasin brûlé dans des manifestations qui ont mal tourné ou une usine saccagée par les ouvriers est devenu presque une routine. Les sociétés d’assurance devraient se frotter les mains face à une telle situation. Mais trois ans après le lancement du « contrat d’assurance contre la violence politique », la demande sur ce produit reste modeste. 8 sociétés offrent différents contrats de ce genre contre les violences liées à l’instabilité politique. La liste comprend la société d’assurance égypto-saoudienne, Misr assurance, le groupe d’assurance Arab Misr, Canal de Suez, Allianz, Al-Machreq Al-Arabi et Assurance Delta. Ces sociétés offrent des contrats d’assurance sur les biens (usines, logements, entreprises) couvrant 7 risques (grèves, émeutes, soulèvement populaire, terrorisme, coup d’Etat, guerre et guerre civile). Arab Misr (gig) offre de son côté l’assurance contre la violence politique sur les voitures. « Ces trois dernières années, nous avons présenté ce service à nos clients qui le demandent. Et depuis le début 2014, ce service a été lancé officiellement sous forme d’un produit indépendant », explique Abdel-Fattah Gharib, directeur du département de réassurance au sein du groupe.
Ce type de contrat est devenu une nécessité à l’heure actuelle avec l’expansion de la violence et les attaques terroristes par les mouvements islamistes armés dans la rue égyptienne. Or, ces produits ne recueillent pas le succès attendu. Car en fait, une large catégorie de la population égyptienne ignore la présence de ce type de produit en raison d’un manque de communication, en particulier dans le domaine de l’assurance sur les voitures, qui représente presque le tiers de la totalité des primes d’assurance perçues par les sociétés, selon le rapport de l’Organisme de surveillance financière 2011/2012. « Les chiffres sont modestes, il y a vraiment un problème de marketing au niveau des sociétés d’assurance », note Mohamad Moeit, vice-président de l’Organisme de surveillance financière.
Les chiffres de vente des sociétés prouvent cette tendance. Par exemple, le groupe d’assurance Arab Misr (gig) n’a vendu que « 25 contrats sur les biens immobiliers (usines, habitat) depuis la révolution jusqu’à la fin 2013, pour un montant de 1,5 million de L.E. », selon Walid Sayed Moustapha, vice-directeur général du département des incendies chez le groupe gig. Ce chiffre est négligeable par rapport au montant des primes collectées par le groupe en juin 2013, avec 245 millions de L.E. Pour les voitures, « les primes d’assurance ont atteint un million de L.E. ces trois dernières années. Un montant qui devrait franchir le seuil des 7 millions de L.E. cette année avec le lancement officiel du produit », renchérit Abdel-Fattah Gharib (voir encadré). Même échec chez la société égypto-saoudienne qui n’a émis que 10 contrats contre la violence politique, selon Abdel-Raouf Qotb, directeur exécutif du groupe et président de l’Union égyptienne d’assurance, qui s’est abstenu de dévoiler le volume du portefeuille et le montant des primes. Quant aux autres sociétés, elles ne révèlent pas le volume de ce portefeuille modeste.
Difficulté à commercialiser
Une situation décrite comme étant normale par l’expert financier Mohamad Matar, conseiller d’assurance auprès de l’Organisme de surveillance financière. Il assure que les sociétés d’assurance égyptiennes ont des difficultés à commercialiser leurs contrats. « Ce modèle de contrats est nouveau pour le marché égyptien. C’est Lloyds (une société d’assurance britannique) qui l’a inventé et il se caractérise par un niveau de risque élevé, ce qui entraîne la faiblesse de la demande internationale sur les sociétés de réassurance étrangères », révèle-t-il.
29 sociétés d’assurance privées et deux sociétés publiques opèrent en Egypte. Elles offrent des services d’assurance diversifiés pour les revendre ensuite aux réassureurs internationaux pour en partager les risques. « Les produits contre la violence politique se caractérisent par un niveau très élevé de risques qui dépassent la capacité des sociétés, entraînant la hausse de leurs primes que ce soit pour les sociétés ou pour les particuliers », explique Mohamad Moeit. D’habitude, les sociétés d’assurance assument 30 % des risques et celles de réassurance internationale les 70 % restants mais dans le cas de violences politiques, les sociétés n’assument que 1 % seulement et commercialisent les autres 99 % aux sociétés de réassurance. De plus, ces dernières s’écartent du marché égyptien avec l’expansion de la violence, assure à l’Hebdo Mohamad Matar.
Selon le dernier rapport de l’Organisme de surveillance financière 2011/2012, le total des compensations payées par les sociétés d’assurance a atteint un niveau record en 2011/2012 pour atteindre 7,5 milliards de L.E., soit une hausse de 35 % par rapport à l’année précédente. Et les compensations sur les biens immobiliers occupent 59 % de cette augmentation.
A quoi sert l’assurance contre la violence politique ?
Le certificat d’assurance contre la violence politique offre une compensation aux dégâts résultant de 7 situations, à savoir grèves, émeutes, soulèvements populaires, terrorisme, coups d’Etat, guerres et guerres civiles. Il est plus complet que le contrat contre le désordre et les troubles civils, qui ne couvre que les risques résultant des manifestions ouvrières et des grèves. Le nouveau contrat englobe une assurance sur les biens immobiliers (logements, magasins, usines). « Son montant est déterminé en vertu d’un système de protection adapté à la capacité financière du client », explique à l’Hebdo Walid Sayed Moustapha, vice-directeur général du département des incendies du groupe d’assurance Arab Misr (gig). Le groupe Raya Holding compte parmi les sociétés qui ont contracté cette assurance à hauteur de 200 millions de L.E., et l’aéroport de Marsa Alam, propriété du groupe koweïtien Al-Kharafi, a également signé pour un montant de 500 millions de L.E. Selon Walid Moustapha, le montant de l’assurance est aussi déterminé en fonction de certains critères, le lieu où se trouve le bien et le dispositif de sécurité (caméras de surveillance, etc.) l’entourant.
Malheureusement, ce contrat ne couvre pas les bâtiments publics comme les musées et les ministères. « Nous préparons actuellement une étude à l’Union égyptienne des sociétés d’assurance pour lancer un contrat qui couvre les bâtiments publics », renchérit Moustapha, également conseiller au sein de l’Union égyptienne des sociétés d’assurance.
Le certificat couvre aussi les risques sur les véhicules. « Si l’acheteur est déjà un client du groupe, il paye 1 % seulement de la valeur de sa voiture. Sinon c’est 1,5 % », explique Moustapha Abdel-Qader, vice-directeur du département des véhicules au sein de gig, unique fournisseur de ce type de certificat. En cas de destruction ou d’explosion du véhicule, la société d’assurance paye 90 % de sa valeur. « Si le risque augmente, le client doit en assumer les charges », renchérit Moustapha. Et d’ajouter que normalement, le client bénéficie d’une couverture totale.
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