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Directeurs d’achat : L’économie égyptienne sur la bonne voie

Amani Gamal El Din, Mercredi, 11 novembre 2020

L’indice des directeurs d’achat qui mesure la performance du secteur privé non pétrolier a connu une croissance record en octobre, reflétant le début d’un rétablissement de l’économie. Les analystes prévoient cependant une contraction de l’activité économique avec la seconde vague attendue du Covid-19.

Directeurs d’achat : L’économie égyptienne sur la bonne voie
Malgré la hausse de l'indice des directeurs d'achat, une contraction des activités économiques est prévue à cause d'une deuxième vague du Covid-19.

Le secteur privé égyptien non pétrolier a connu une croissance considérable au mois d’octobre, la première depuis 2014. Cependant, c’est un optimisme prudent qui prévaut vu l’incertitude due à la deuxième vague attendue du Covid-19. C’est ce que vient d’annoncer le groupe IHS Markit, responsable de la publication de l’indice des directeurs d’achat, dans son rapport mensuel qui mesure la performance du secteur privé non pétrolier. L’indice a enregistré une hausse pour le deuxième mois consécutif pour se chiffrer à 51,4 % en octobre, contre 50,4 % en septembre. « Nos lectures d’octobre montrent que le secteur non pétrolier égyptien connaît une expansion rapide depuis 6 ans. La croissance des entreprises privées non pétrolières s’accélère depuis le début du quatrième trimestre 2020. Nos rapports prouvent que la situation du marché s’est améliorée et qu’il y a une forte demande », écrit Mark Owen, économiste à IHS Markit.

L’indice des directeurs d’achat est un indicateur composite mesurant l’activité manufacturière d’un pays. Une valeur inférieure à 50 % indique une contraction de l’activité économique, alors qu’une valeur supérieure à 50 % indique une expansion de celle-ci. Exprimé en pourcentage, l’indice prend en compte les commandes, la production, l’emploi, les livraisons et les stocks du secteur manufacturier privé. Il est défini par quatre indices essentiels, à savoir l’indice composite de l’activité globale, l’indice de l’activité des services, l’indice de la production manufacturière et l’indice de l’industrie manufacturière.

L’activité manufacturière correspond à un nombre varié d’industries comme les industries alimentaires, des boissons, du prêt-à-porter, du textile ainsi que les industries chimiques, pharmaceutiques et de raffinage, entre autres.

Dans sa note analytique publiée sur l’indice, la banque d’investissement Prime affirme que la demande locale est en augmentation, et ce, pour plusieurs raisons. La première est le retour de l’activité économique à la normale. La deuxième est le retour des écoles après les vacances d’été et la demande accrue sur les équipements technologiques, fondements de la nouvelle stratégie du ministère de l’Education, qui repose sur les plateformes Internet et l’enseignement numérique. La troisième raison est les initiatives gouvernementales visant à consolider la consommation. Sur ce point, Mona Bédeir, macroéconomiste auprès de la banque d’investissement Prime, explique que le gouvernement a lancé en juillet une nouvelle initiative pour stimuler la consommation. Celle-ci inclut plusieurs mesures parmi lesquelles la hausse des subventions financières sur les cartes d’approvisionnement à 200 L.E. pour chaque individu avec un maximum de 1 000 L.E. par famille. Les produits concernés par cette initiative sont les appareils électroménagers, le prêt-à-porter, le cuir, l’ameublement, entre autres. L’initiative octroie des crédits avec des taux d’intérêt réduits et un délai de remboursement de 24 mois. Elle encourage les produits locaux.

Hala Al-Saïd, ministre de la Planification et du Développement économique, a déclaré que « cette amélioration remarquable de l’activité industrielle revient aux efforts assidus du gouvernement égyptien pour donner de l’élan à l’activité économique et à la production ». Al-Saïd a ajouté que la hausse de la consommation privée au troisième trimestre 2019-2020 de 5,3 % prouve qu’il y a un rétablissement économique.

Le défi de l’emploi

Selon le rapport, trois sous-indices ont soutenu cette croissance : la production, les nouvelles commandes et les stocks d’achat, ce qui a contrebalancé la chute de l’indice de l’emploi. « Malgré la hausse de l’indice de production et la prospérité de la demande, les entreprises hésitent toujours à augmenter leur capacité productive et à ouvrir à nouveau la porte au recrutement. L’indice de l’emploi a connu un recul pour le deuxième mois consécutif réalisant le chiffre le plus modeste depuis un an. La hausse des dépenses et la faiblesse des revenus barrent la route à une réintégration de la main-d’oeuvre ayant quitté le travail et empêchent les nouveaux recrutement », note le rapport de IHS Markit. Bédeir pense que si les entreprises rechignent à recruter c’est qu’elles n’ont pas confiance en l’environnement des affaires actuellement. Beaucoup d’entreprises luttent toujours pour payer les salaires de leurs employés.

Selon Bédeir, il n’est pas question pour le gouvernement d’opter pour un confinement partiel ou total. Elle salue les mesures gouvernementales qui ont jusque-là contenu la crise. La première mesure a été destinée au secteur industriel sous la forme d’une subvention des prix de l’électricité et du gaz naturel. Le versement des impôts et de la taxe immobilière sur les usines ont été reprogrammés et les délais ont été prolongés à deux reprises. Des facilités de crédits ont été octroyées au secteur au niveau des taux d’intérêt et des délais de versement.

D’autres mesures avaient trait à l’emploi. « Certaines initiatives ont par exemple ciblé des secteurs très affectés comme le tourisme. La Banque Centrale d’Egypte (BCE) a prolongé les délais de remboursement des crédits de 6 mois, remboursables avec des intérêts de 5 % seulement. A l’instar du secteur industriel, le secteur du tourisme a bénéficié de l’initiative de la BCE consistant à octroyer des fonds pour financer les salaires des employés. En plus de cela, le ministère de la Main-d’oeuvre a versé des allocations financières aux employés de ce secteur. La 2e et la 3e phases de ce plan seront lancées prochainement », déclare Bédeir, qui affirme que d’autres stimulus sont prévus pour booster le secteur industriel, en subventionnant le gaz naturel.

Le rapport prévoit une contraction des activités économiques dans les 12 prochains mois et les entreprises ont exprimé leurs craintes quant à une seconde vague de Covid-19 qui a commencé en Europe et qui pourrait affecter négativement l’économie mondiale et régionale. En réaction à ces prévisions, les prix des matériaux nécessaires à la production ont connu une augmentation considérable et ont entraîné une hausse des prix de ventes depuis août 2019.

Selon Mohamad Al-Bahey, membre de l’Union des industries, la hausse de l’indice des directeurs d’achat est due à la reprise des activités économiques avec la levée du confinement. Mais si un autre confinement est imposé, les pressions regagneront le secteur privé. Et puisqu’en économie, les conditions globales et mondiales sont intrinsèquement liées, l’indice connaîtra une chute avec l’arrêt des chaînes d’approvisionnement et d’exportation mondiales et la probable seconde vague de Covid-19 .

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