
L'accord non financier du FMI aide l'Egypte à pallier
les déséquilibres de l'économie.
Le soutien du Fonds Monétaire International (FMI) à l’Egypte ne prendra vraisemblablement pas fin avec le versement de la cinquième et dernière tranche de 2 milliards de dollars du prêt total de 12 milliards alloué à l’Egypte depuis novembre 2016 dans le cadre du programme de réforme économique. C’est ce que le ministre des Finances, Mohamad Maeit, a indiqué dans un entretien accordé récemment à la chaîne Bloomberg en marge du Bloomberg Emerging & Frontier Forum, tenu à Londres. La forme de l’assistance sera non financière. « Nous avons présenté les contours d’un programme non financier au FMI et nous sommes en phase de discussion », a déclaré Maeit.
Sans donner davantage de détails sur les composantes du programme, Maeit a révélé qu’un accord sera conclu en octobre et que sa durée sera de près de deux ans. Fakhri Al-Feqqi, professeur d’économie à la faculté de sciences politiques et d’économie de l’Université du Caire et ex-adjoint du directeur exécutif du FMI, s’est exprimé plus clairement sur les formes d’assistance de l’institution financière internationale. « Depuis toujours, le FMI propose deux genres de programmes : le soutien financier et le soutien non financier, de suivi et d’évaluation », indique-t-il. Les négociations avec l’Egypte interviennent alors que le FMI a publié récemment un communiqué selon lequel la délégation du fonds, présidée par Subir Lall, a visité Le Caire le 16 mai 2019 pour effectuer le dernier examen du programme de soutien financier à la réforme économique. Selon Alyaa Mamdouh, analyste en chef auprès de Beltone, le programme non financier de suivi et d’évaluation est un signe de confiance pour les investisseurs étrangers qui ciblent l’Egypte, que ce soit dans les titres publics ou au niveau des Investissements Etrangers Directs (IED).
Le ministre des Finances a déterminé deux volets qui bénéficieront du soutien non financier dans le but de « soutenir l’Egypte au cours de la prochaine période pour promouvoir la croissance et les réformes structurelles ». Pour Mona Bédeir, macroanalyste auprès de Prime Securities, l’Egypte a besoin d’un second accord pour assurer le caractère durable des réformes économiques. D’autant plus que le pays n’avait pas su assurer la durabilité des réformes en 1992 et en 2005, lorsque le FMI s’était retiré une fois le programme financier achevé. « La première phase, centrée sur la consolidation fiscale et la restructuration budgétaire, avait besoin de liquidités et était plus facile. Il n’a pas été difficile de rationaliser les dépenses et les subventions. Les macro-indicateurs ont connu une nette amélioration au niveau du déficit fiscal, du déficit de la balance commerciale et de la balance externe », explique Bédeir.
Des politiques à long terme
Le soutien que le FMI peut apporter va du conseil, de l’expertise et du renforcement des capacités humaines à l’aide en matière de réformes législatives et institutionnelles. « L’intervention du FMI via le programme non financier sera bénéfique si elle est conduite parallèlement à la conception de politiques à long terme, désignées à pallier les problèmes structurels et monétaires qui sont encore présents », indique Alyaa Mamdouh. Et de poursuivre que les efforts à fournir seront à la fois difficiles et importants. Ils devront en effet viser la réforme des revenus gouvernementaux, l’amélioration du système fiscal, la lutte contre la fraude fiscale, l’amélioration de l’environnement du secteur privé générateur d’emplois, la régularisation de l’économie informelle, l’inclusion financière et des mesures au niveau des petites et moyennes entreprises. « Ajoutons à cela la restructuration des activités économiques sectorielles à valeur ajoutée, comme le textile, avec toutes ses composantes », précise Alyaa Mamdouh.
L’un des dossiers les plus importants et qui requiert l’assistance de l’institution mondiale (qui s’occupe des déséquilibres financiers) ainsi que de sa jumelle de Wall Street, la Banque mondiale (active en matière de déséquilibres structurels), est la restructuration des actifs et des entreprises du secteur public. « Il y a environ 119 entreprises publiques qui ont besoin de restructuration et dont les actifs atteignent un demi-trillion de livres égyptiennes, leurs revenus ne dépassant pas 2 % de ce chiffre. Nous avons par ailleurs 25 organismes économiques à but lucratif en faillite, parmi lesquels l’Union de la radio-télévision, qui a des dettes redevables au gouvernement à la hauteur de 18 milliards de L.E. Alors que l’Organisme égyptien des chemins de fer est endetté de 28 milliards de L.E. Seuls deux organismes réalisent des profits, soit le Canal de Suez et l’Organisme général du pétrole. Il faut que les revenus non fiscaux dans le budget de l’Etat s’élèvent à plus de 25 % », explique Al-Feqqi, tout en ajoutant que les politiques économiques doivent être centrées sur la compétitivité et loin des monopoles.
L’Egypte a donc besoin de soutien pour remédier aux déséquilibres structurels, bien enracinés et qui vont requérir beaucoup de temps. La décision de la levée des subventions sur le carburant, prise le 4 juillet, a été suivie du déblocage de la cinquième et dernière tranche du prêt du FMI, qui montre aussi par là sa volonté de négocier l’assistance non financière à l’Egypte.
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