Economie > Economie >

Egypte - Banque Mondiale : Vers une nouvelle ère de coopération

Névine Kamel, Mardi, 16 avril 2019

Les réformes adoptées par l'Egypte sont saluées par la Banque Mondiale (BM). Al-Ahram Hebdo a rencontré deux responsables de la BM pour discuter des défis de son programme, à l'occasion de la tenue des réunions du printemps du FMI et de la BM. Compte rendu.

Vers une nouvelle ère de coopération

Washington,

De notre envoyée spéciale —

La croissance démographique est bel et bien le véritable défi à la relance de l’économie égyptienne. « En 2050, le monde arabe devra créer 300 millions emplois, et les pays arabes ne sont toujours pas en mesure de dégager un pourcentage calculé à partir de ce chiffre, et avec le début de la transformation numérique et la mécanisation des emplois attendues dans les pays industrialisés, l’objectif devient plus difficile », avoue Merza Hassan, directeur exécutif auprès de la Banque Mondiale (BM) à l’Hebdo, en marge de la mission annuelle du Door Knock, américaine, tenue la semaine dernière à Washington. Il explique que dans un pays où le taux de croissance naturel est de 2,3 %, toute croissance économique est bien dévorée. « Une réalité qui aggravera le problème du chômage en Egypte », dit-il, en mentionnant que selon un rapport publié récemment par l’OCDE, les deux tiers des offres d’emploi aujourd’hui existantes disparaîtront en 2030.

De même, le directeur exécutif de la BM a prévenu de la faiblesse du système éducatif et son impact négatif sur la croissance, soulignant que 70 % des universitaires dans le monde arabe n’ont pas d'aptitudes utiles au marché du travail. « Nous n’avons pas besoin de leurs compétences », dit-il. Selon Hassan, un tel taux de croissance rend difficile de fournir une éducation de qualité. « Et par conséquent, le taux de croissance ralentit », ajoute-t-il. Cela dit, Hassan estime que le plan de réforme de l’éducation lancé par l’Egypte permettra notamment d’améliorer les compétences des élèves.

Tout comme le plan de réforme de l’éducation, la BM salue celui de l’économie égyptienne, qui était au bord de l’effondrement depuis février 2011, à cause de la baisse des revenus du commerce d’une part, des investissements, du tourisme et de l’instabilité de l’autre. Les investisseurs, eux aussi, traînaient les pieds. « Le programme de réforme était une cure amère, mais indispensable. Le président égyptien n’a pas hésité à engager des mesures courageuses, et le citoyen égyptien a dû les assumer. Et c’est ainsi que le pays a traversé cette période critique et a commencé à se redresser et a réalisé un taux de croissance beaucoup plus élevé de celui réalisé par des autres pays arabes », applaudit Hassan.

Grandes ambitions

Vers une nouvelle ère de coopération
Merza Hassan, directeur exécutif auprèsde la BM.

L’ambassadeur Ragui El-Etreby, directeur exécutif adjoint de l’Egypte à la BM, révèle que la Banque, dans son dernier rapport, prévoit une croissance de l’économie égyptienne de 5,5 % en 2019 et 5,8 % en 2020, ce qui équivaut à trois fois le taux de croissance enregistré au Moyen-Orient. « Une telle croissance confirme que la situation en Egypte n’est pas simplement une réforme, mais un développement économique complet qui touche tous les domaines ». Il explique que l’Egypte entend également devenir l’une des 20 plus grandes économies du monde en 2023 et des 10 premières en 2030. Or, dit-il, cela ne sera possible qu’avec un développement des infrastructures du pays, des infrastructures numériques, des deux structures administrative et institutionnelle ainsi que le développement de la main-d’oeuvre. « L’Egypte a parcouru un long chemin dans la réforme administrative, mais il lui reste encore beaucoup à faire. La réforme administrative est un processus en cours et il n’y a pas de réforme économique et sociale sans réforme institutionnelle parallèle », avance-t-il. Mais El-Etreby a déclaré qu’il est confiant que son pays continuera à progresser dans le prochain rapport Doing Business, soulignant que les progrès réalisés dans ce rapport, qui compare les performances des pays, constituent un succès et ne doivent pas être sous-estimés.

Hassan Merza a en outre salué la stratégie adoptée par le gouvernement égyptien pour la gestion de la dette publique intérieure et extérieure, surtout que cette initiative survient à un moment où la question de l’endettement mondial est à nouveau apparue. Il ajoute que la dette mondiale a augmenté d’environ 11 % entre 2017 et 2018, ce qui indique que certains gouvernements ont commencé à faire face à des difficultés dans les réformes et ont choisi de les compenser par l’emprunt. « Le sujet de la dette sera en top des sujets discutés lors des réunions du printemps », dit-il. El-Etreby, pour sa part, accorde la régression de la dette en Egypte à la stratégie adoptée par le gouvernement égyptien. Ce dernier insiste récemment sur le fait d'emprunter seulement pour réaliser des projets dont le but se limite à une relance économique où à la création d’emplois.

A ce sujet, El-Etreby dévoile qu’une série d’accords importants sont en cours de négociation avec le gouvernement égyptien, dans le but d’améliorer les potentiels du pays. De sérieuses négociations sont en cours concernant un accord de coopération dans le domaine de l’infrastructure numérique. Le ministère égyptien des Télécommunications a un plan ambitieux à cet égard et la BM cherche à jouer un rôle majeur en fournissant un soutien financier et technique pour ce projet. Il est prévu de finaliser les négociations au cours de 2019, selon El-Etreby. De même, le conseil d’administration de la BM envisage actuellement de financer un projet important visant à encourager le rôle du secteur privé et à renforcer les efforts de l’Egypte dans le domaine de l’entreprenariat, à travers un financement de 200 millions de dollars destiné aux jeunes et aux femmes. Cet accord devrait être finalisé dans les prochaines semaines. Outre ces deux accords, El-Etreby a confirmé qu’il existait des programmes de coopération entre la BM et le gouvernement égyptien dans le domaine de la lutte contre la corruption.

Des chiffres exceptionnels

Vers une nouvelle ère de coopération
Ragui El-Etreby, directeur exécutif adjointde l’Egypte à la BM.

La Banque Mondiale (BM) est un partenaire solide de l’Egypte. A elle seule, l’Egypte recueille 50 % du total des fonds alloués par la BM au Moyen-Orient et à l’Afrique du Nord, ce qui reflète l’intérêt de la BM pour l’Egypte. Selon El-Etreby, il existe 17 projets en cours en Egypte d’une valeur totale d’environ 8 milliards de dollars, comprenant des projets d’infrastructure, de développement humain et de réforme institutionnelle. La banque avait versé un financement à l’Egypte avant le lancement du programme de réforme économique de 3 milliards et 150 millions de dollars pour soutenir les politiques de financement.

Avec la nomination du nouveau président, David Malpass, une nouvelle ère de coopération commencera, car celui-ci est bien au courant des potentiels de l’Egypte et « Le Caire sera l’une des premières capitales à être visitées par le nouveau président de la BM », dit El-Etreby. Le programme de la BM qui concerne l’Egypte est l’un des plus grands de l’institution. La valeur totale des prêts qu’a reçus le pays depuis 1950 s’élève à 18,4 milliards de dollars, dont 8 milliards entamés en 2010 et jusqu’à 2020. « Mais la valeur des prêts qu’a obtenus le gouvernement égyptien récemment a commencé à régresser », explique El-Etreby. Cela dit, conclut-il, « la BM est la seule entité de financement à ne pas avoir cessé un seul jour de soutenir l’Egypte et son financement après la révolution de 2011 ».

Lien court:

 

En Kiosque
Abonnez-vous
Journal papier / édition numérique