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CNP : D’une pierre plusieurs coups

Noha Ayman, Dimanche, 16 avril 2017

Le Conseil National des Paiements (CNP) vient d'être créé. Il s'agit d'un organe qui vise à encourager le système de paiement électronique, renforcer la sécurité des moyens de paiement et lutter contre la corruption. Des éléments-clés pour la relance de l'économie. Explications.

CNP : D’une pierre plusieurs coups
Le gouvernement veut stimuler l'usage des paiements électroniques et réduire l'usage des monnaies.

Le Conseil National des Paiements (CNP) est un nouvel organisme récemment créé par décret présidentiel. Objectifs : inclure le secteur informel au secteur formel pour réaliser l’inclusion financière, stimuler l’usage des moyens de paiement électroniques, et lutter contre la corruption. Des buts parmi d’autres figurants dans le décret présidentiel instituant ce nouveau conseil et déterminant ses prérogatives. Il se chargera du développement et de l’organisation des systèmes de paiements nationaux et des outils de leur contrôle. Vu l’importance de son rôle, il sera dirigé par le président de la République en personne et regroupera dans sa composition un nombre de ministères, d’instances et d’organismes gouvernementaux et bancaire (voir encadré).

Ce conseil permettra, comme l’affirment les spécialistes, de développer la compétitivité, répondre aux besoins des utilisateurs et par conséquent améliorer les indicateurs macroéconomiques de l’Egypte et élever sa cote de crédit. Le conseil oeuvrera à stimuler l’usage des moyens de paiement électroniques dans le but de réduire l’usage des monnaies hors du secteur bancaire. A cet égard, il a été décidé d’imposer aux institutions gouvernementales de recevoir leurs échéances financières de plus de 1 000 L.E. uniquement à travers des comptes bancaires. Pour encourager le paiement électronique, le conseil, en coordination avec la Banque Centrale, augmentera le nombre des succursales bancaires dans les gouvernorats et les régions éloignées, facilitera les procédures d’ouverture des comptes bancaires et réduira leurs frais. De même, le système de paiement électronique des pensions de retraite et des salaires des fonctionnaires au secteur public sera généralisé.

Autre objectif important de la création du CNP, réaliser l’inclusion financière par le biais de l’intégration de l’économie « parallèle » ou « informelle » dans l’économie formelle. Représentant selon les estimations des économistes environ 40 % de l’ensemble de l’économie, l’économie informelle comprend, notamment, toutes activités économiques non enregistrées, insoumises à la surveillance du gouvernement ou au système fiscal. Le conseil devra favoriser la création d’un marché concurrentiel pour les services de paiement. Il se chargera d’assurer l’intégration des diverses initiatives gouvernementales associées aux paiements afin d'éviter toute duplication des investissements nécessaires pour mettre en oeuvre ces initiatives.

Il relève aussi des prérogatives du conseil de renforcer la sécurité des moyens de paiement. A cet égard, il travaillera sur l’intégration des bases de données et la coordination entre toutes les parties du système de paiement. Et ceci dans le cadre du décret présidentiel fixant les prérogatives du conseil. Ces mesures visent à réduire les risques liés aux moyens de paiement électroniques à accroître leur efficacité, à réduire le coût du transfert d’argent et à augmenter les recettes fiscales.

Selon des économistes, la mise en vigueur de ce système contribuera à relancer la stratégie de l’inclusion de l’économie formelle et informelle, l’un des facteurs qui favorisera l’amélioration des indicateurs macroéconomiques de l’Egypte et le fait d’élever sa cote de crédit. Ils affirment que la réduction de la circulation de l’argent hors du secteur bancaire contribue à l’augmentation des ressources de l’Etat et de ses recettes fiscales. Dr Salwa Abdel-Aziz, professeure d’économie à la faculté d’économie et de sciences politiques de l’Université du Caire, explique que la réduction du taux de l’argent en circulation hors du système bancaire contribue à la diminution du taux d’inflation. « Quand les transactions ne se font que dans le cadre du système bancaire, il n’est plus nécessaire d’imprimer plus de billets », explique Abdel-Aziz. Elle ajoute que grâce aux décisions du CNP et au renforcement de l’intégration financière, il est prévu de voir croître le taux de liquidités injectées aux artères du secteur bancaire. Cela augmentera les dépôts bancaires, en baisse faute des retraits de certains clients de leurs dépôts, vu la hausse des prix et le recul du pouvoir d’achat. Lorsque les liquidités augmenteront au secteur bancaire, cela accroîtra sa capacité, représentant un intermédiaire financier entre les épargnants et les emprunteurs, à prêter aux investisseurs, ce qui accroître ainsi le mouvement des investissements dans l’économie.

Barrer la route aux irrégularités
Vision partagée par une autre source bancaire ayant requis l’anonymat, qui ajoute que la réduction du taux de la circulation de l’argent aidera à traquer les opérations de blanchiment d’argent et les activités illégales. « La présence d’une grande quantité de liquidités aux marchés, hors du secteur bancaire surveillé par l’Etat, favorise souvent l’accroissement de ce genre de pratiques illégales », explique-t-il. Sur un autre volet, la source ajoute que l’inclusion de l’argent dans le système bancaire contribuera à l’augmentation des capitaux bancaires, ce qui permettra l’augmentation de leurs capacités de prêter aux investisseurs. « La hausse du taux des prêts sera en faveur de la relance des investissements et du redressement de l’économie ». Or, pour atteindre ces objectifs, il appelle le nouveau conseil à organiser des compagnes de sensibilisation sur l’importance et les portées du système de paiement électronique. « Pour promouvoir la culture de l’utilisation des cartes à puce, le conseil doit organiser des campagnes de sensibilisation dans les médias afin d’expliquer au simple citoyen les profits qu’il peut tirer en utilisant le système de paiement électronique dont la facilité et la rapidité des opérations. La sensibilisation doit aussi étaler les bienfaits de ce système sur le redressement de l’économie, dont l'amélioration se répercutera sur le niveau de vie du citoyen », conclut-il .

Composition détaillée du Conseil national des paiements
Le conseil regroupera le premier ministre, agissant au nom du président du conseil (le président de la République) en cas de son absence, le gouverneur de la Banque Centrale, le chef du service des renseignements, le président de l’Organisme du contrôle administratif, le sous-gouverneur de la Banque Centrale, le sous-gouverneur de la Banque Centrale en charge des systèmes de paiement, le président de l’Autorité de surveillance financière et le président du conseil d’administration d’une banque. Il regroupe aussi un certain nombre de ministres dont ceux de la Défense, de l’Intérieur, de la Justice, de la Planification et de la Réforme administrative, des Télécommunications et des Finances l

Favoriser les transactions électroniques
L’idée de la création d’un Conseil national des paiements a été principalement inspirée par une étude réalisée en février 2015, baptisée La Transition vers l’économie non monétaire. Elaborée par la Fédération des industries égyptiennes en coopération avec la Fédération des banques égyptiennes, cette étude jette la lumière sur la tendance mondiale d’une transformation vers les systèmes bancaires et de paiements électroniques. Des changements qui nécessitaient, selon l’étude, une mise en place de politiques et de lois visant à réduire l’usage des monnaies. L’étude étaye les bienfaits du transfert vers ces systèmes, dont la sécurité des transactions ainsi que la réduction des crimes économiques (blanchiment d’argent, fraude fiscale et financement du terrorisme). Elle conclut que les paiements électroniques améliorent la performance économique.

Des conclusions qui ont incité le gouvernement à adopter des mesures visant à favoriser les transactions financières électroniques, comme le lancement de services de transfert d’argent via téléphones portables, pour la réservation des tickets du transport ferroviaire et aérien et pour l’achat et la vente en ligne sur Internet.

Pour concrétiser cette stratégie, Tareq Amer, gouverneur de la Banque Centrale, a proposé en 2016 la création d’un Conseil national des paiements. Une proposition adoptée en novembre dernier lors d’une réunion du Conseil suprême de l’investissement. Présidé par le président Abdel-Fattah Al-Sissi, le conseil a approuvé un total de 17 mesures visant à attirer les investissements étrangers et nationaux, mettre en place de nouveaux projets, faciliter les procédures aux investisseurs et accélérer le redressement de l’économie. La création du Conseil national des paiements est l’un de ces mesures. Le 14 février 2017, les prérogatives du Conseil des paiements ont été définies par décret présidentiel .

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