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Pétrole : Les prix s’envolent

Gilane Magdi , Jeudi, 13 avril 2023

Les pays de l’Opep+ ont décidé de réduire leur production d’or noir pour éviter une chute des prix. Une décision qui aura un impact sur les pays importateurs.

Pétrole : Les prix s’envolent
Goldman Sachs prévoit la hausse des prix de l’or noir à 95 dollars en 2023. (Photo : Reuters)

C’est une décision surprenante pour le marché du brut qui a entraîné la flambée des prix la semaine dernière. Les pays membres de l’Opep+, regroupant l’Organisation des Pays Exportateurs de Pétrole (OPEP) et d’autres producteurs dont la Russie, ont brusquement décidé de réduire leur production de 1,16 million de barils par jour à partir du mois de mai prochain et jusqu’à la fin de l’année. La liste comprend la Russie et 8 autres pays, à savoir l’Arabie saoudite, l’Iraq, les Emirats arabes unis, Oman, le Koweït, l’Algérie, le Gabon et le Kazakhstan. « Il est clair qu’il y a une certaine tension entre l’Arabie saoudite et la Réserve fédérale américaine. La Réserve fédérale maintient sa politique monétaire restrictive basée sur l’augmentation des intérêts bancaires, ce qui entraîne un certain ralentissement de l’activité économique et une baisse de la demande sur l’or noir, et donc un recul des prix. D’autre part, les pays producteurs du pétrole sous la direction de l’Arabie saoudite veulent garder leurs revenus pétroliers en maintenant les prix à des niveaux plus élevés », explique à l’Hebdo Hesham Hamdey, vice-président associé des recherches au sein de Naeem Holding.

Dès l’annonce de la décision, les cours mondiaux de l’or noir se sont envolés. Selon l’agence britannique Reuters, le baril de Brent de la mer du Nord, principale référence européenne, pour livraison en mai, a clôturé en hausse de 6,30 %, à 85,12 dollars le 7 avril. Quant au West Texas Intermediate (WTI), variété américaine la plus suivie, également pour échéance en mai, a gagné 6,27 %, à 80,70 dollars. La banque américaine Goldman Sachs a estimé que la réduction de la production donnerait lieu à une augmentation de 7 % des prix du pétrole, contribuant ainsi à une augmentation des revenus pétroliers de l’Arabie saoudite et de l’Opep+. La banque relève aussi les prévisions des prix pour les contrats à terme sur le Brent après l’annonce surprise de l’Opep+ pour cette année et l’année prochaine. « Les prévisions du prix du Brent pour décembre 2023 ont augmenté de 5 dollars à 95 dollars le baril, tandis que celles de décembre 2024 ont été relevées de 3 dollars à 100 dollars le baril », ont déclaré la semaine dernière les analystes de Goldman Sachs dans une note publiée sur Reuters. La banque a réduit ses prévisions de production de 1,1 million de barils par jour pour l’Opep+ à la fin 2023.

Egypte, impact limité sur le budget

La flambée des prix mondiaux du pétrole va lourdement peser sur les pays importateurs. Pour l’Egypte, qui importe 100 millions de barils de pétrole annuellement, la banque d’investissement Naeem Holding souligne, dans une note envoyée à l’Hebdo, que l’impact sera limité sur le budget financier en cours. « Le prix du pétrole est toujours inférieur de 8 % à celui calculé dans le budget actuel, et qui est de 92,5 dollars le baril », selon la note. Le ministère des Finances a révisé le mois dernier certaines prévisions relatives à l’année financière en cours 2022-2023. Le déficit budgétaire en pourcentage du PIB a été révisé à la hausse, pour le situer à 6,8 % contre 6,1 % visé au moment de la préparation du budget. La première justification évoquée par le ministère des Finances est l’augmentation du prix du pétrole brut, qui est passé de 80 dollars le baril, lors de la formulation du budget, à une fourchette située entre 90 et 95 dollars. Magdi Sobhi, vice-directeur du Centre des Etudes Politiques et Stratégiques (CEPS) d’Al-Ahram, explique à l’Hebdo que l’impact sera significatif sur le déficit budgétaire en cas de flambée des prix mondiaux du pétrole à 95 dollars d’ici la fin de cette année comme prévu par la banque américaine. « Il y aura sans doute une hausse des prix des carburants au cours de la prochaine période », prévoit Magdi Sobhi. En revanche, la note de Naeem affirme que la hausse des prix du gaz naturel et la stabilité des prix des céréales (à leur plus bas niveau récemment) sont bonnes pour les perspectives financières et économiques. « Les prix du gaz naturel en Europe ont augmenté de 22 % sur la semaine, portant le prix à 15,9 dollars par million d’unité thermique britannique, le plus haut niveau en un mois, soutenu par la hausse des prix du pétrole et les inquiétudes concernant l’approvisionnement », conclut la note.

Pourquoi l’Opep+ a-t-elle réduit la production

Plusieurs raisons ont conduit les pays de l’Opep+ à prendre la décision inattendue de réduire la production de pétrole. La première est la volonté de stabiliser le marché du pétrole en gardant les prix à la hausse. « Les prix du pétrole ont connu des niveaux plus bas dernièrement. De même, les prévisions sur une hausse de la demande mondiale de 750 000 barils par jour provenant de la Chine ne se sont pas réalisées en raison du ralentissement de l’activité économique mondiale. Ces facteurs ont conduit les pays producteurs de l’or noir à prendre cette décision pour soutenir les prix », explique Magdi Sobhi, vice-directeur du CEPS d’Al-Ahram. La deuxième raison est liée au risque d’une crise bancaire à cause de la faillite de banques américaines début mars. « Cette faillite et la hausse des intérêts bancaires ont accentué les inquiétudes d’une récession économique. Et donc, la demande sur l’or noir va baisser, entraînant ensuite le recul des prix », souligne Magdi Sobhi.

En mars, les cours du brut avaient d’ailleurs déjà atteint un niveau assez bas, autour des 70 dollars le baril. Un niveau nettement inférieur à celui attendu par les pays producteurs (soit 90 dollars).

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