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Les investissements émiratis ont le vent en poupe

Amani Gamal El Din , Mercredi, 03 août 2022

Les acquisitions émiraties se multiplient sur le marché égyptien et ciblent autant le secteur privé que public, dans le cadre d’une stratégie d’expansion régionale.

Les investissements émiratis ont le vent en poupe
Les acquisitions sont plus attractives pour les investisseurs qui craignent la création de nouveaux projets.

Décidément, l’appétit émirati pour des investissements en Egypte ne cesse de grandir. Deux nouvelles acquisitions ont fait la une de la presse économique cette semaine dans des secteurs stratégiques, les services financiers et les produits pétroliers. La première concerne le géant financier émirati, Chimera Investments LLC, une société d’investissement privée basée à Abu-Dhabi, gérant un portefeuille diversifié d’actions cotées et non cotées sur les marchés régionaux et des Emirats arabes unis, qui avait déposé en juin dernier une offre non contraignante auprès du régulateur financier, Financial Regulatory Authority (FRA) pour acquérir des actions majoritaires de la banque d’investissement égyptienne Beltone Financial Holding (voir encadré). La deuxième acquisition est la déclaration faite par la société ADNOC Distribution, une filiale d’ADNOC (Abu-Dhabi National Oil Company), une compagnie émiratie pionnière dans le secteur de la distribution de l’essence et premier exploitant des stations-service au détail, d’avoir conclu un accord avec Total Energies pour acquérir 50% des actions de Total Energies Egypt au cours du premier trimestre de 2023, valorisant le marché à 186 millions de dollars.

Ces acquisitions interviennent à la suite de la conclusion la semaine dernière d’un partenariat industriel entre l’Egypte, les Emirats arabes unis et la Jordanie.

Ahmed Bayoumi, analyste financier auprès du Centre égyptien de la pensée et des études stratégiques, estime que les nouvelles acquisitions injectent des Investissements Etrangers Directs (IED) et ajoutent des fonds, donc du nouveau sang dans des projets déjà existants. « Les acquisitions sont plus attractives pour les investisseurs qui craignent la création de projets, car ils veulent entrer dans des marchés qu’ils ne connaissent pas et ont affaire avec des clientèles qu’ils ignorent. Ils préfèrent investir donc dans ceux déjà existants », précise Bayoumi.

Projets en gestation

D’autres projets en gestation concernent autant les secteurs privé que public. Ainsi, le voile s’est levé petit à petit sur les prochains investissements émiratis, dans la foulée du partenariat stratégique conclu entre Le Caire et Abu-Dhabi en 2019 et qui prévoyait des investissements dans un nombre d’actifs et de secteurs à hauteur de 20 milliards de dollars. Ceci relève de formes différentes d’acquisitions depuis une assignation à un investisseur stratégique et jusqu’à des IPO, soumises en Bourse. Le gouvernement a en outre annoncé que le Fonds souverain d’Abu-Dhabi, ADQ, étudiait la possibilité d’acquérir la seule compagnie publique de production de sucre cotée en Bourse, Al-Delta Lel Sokkar (le Delta pour le sucre). Selon le site économique Economy Plus, une coordination est en cours avec la Holding pour les industries alimentaires, dépendant du ministère de l’Approvisionnement, pour parvenir à un accord final sur le taux d’acquisition.

ADQ a acheté, à travers une compagnie émiratie, 60% de la Compagnie égyptienne des industries alimentaires Abu Auf, à une valeur de 2,9 milliards de L.E. Une autre acquisition vient d’être révélée la semaine dernière selon laquelle le géant émirati, Al Nowais Investment, étudie le projet d’intégration des stations d’énergie solaire en Egypte dans ses projets d’hydrogène, sous l’ombrelle toujours d’ADQ.

Le 22 mars dernier, ADQ a acquis des actions dans des entreprises étatiques à un montant de 2 milliards de dollars, dont 18% des actions de CIB, la plus grande banque cotée en Bourse, ainsi que des actions de 4 autres compagnies, la plateforme de paiement électronique Fawry, Abu Qir Fertilizers, Mopco et Alexandria Container & Cargo Handling. ADQ a d’ailleurs conclu une acquisition de la Compagnie pharmaceutique égyptienne Amoun pour un montant de 740 millions de dollars.

Comme l’explique Amr El Alfy, directeur de la recherche auprès de la banque d’investissement Prime, « ces nouvelles acquisitions émiraties dynamisent le marché financier égyptien qui est léthargique depuis quelque temps et attireront les investisseurs étrangers qui le quittent à cause de la mauvaise note de 3,5 du Price Earnings ratio ou le ratio sur les bénéfices, très inférieur à celui des marchés émergents qui se situe entre 15 et 17. Il ajoute que l’Egypte est une bonne opportunité pour l’expansion des affaires, vu l’actuelle dévaluation des titres financiers. Son économie est diversifiée et a l’atout de la démographie et de sa main-d’oeuvre moins coûteuse ».

Les fonds souverains des pays du Conseil de la Coopération du Golfe (CCG), qui ont accumulé des fortunes grâce à la hausse des cours du brut, cherchent à tirer profit de la volatilité actuelle des marchés et dépensent excessivement pour une expansion régionale et la création de grands blocs. Selon Bloomberg, les données compilées par Business Newswire démontrent que les plus larges fonds souverains du CCG, et qui contrôlent des actifs évalués à 3 trillions de dollars, ont versé 28,6 milliards de dollars dans des acquisitions en dehors de la région et en Afrique. Selon Bloomberg, l’année dernière a été un record, car les dépenses au niveau des acquisitions ont augmenté de 45%.

Les acquisitions émiraties pourraient accélérer celles d’autres pays du Golfe. Les fonds souverains de ces derniers, comme l’Arabie saoudite, le Qatar et le Koweït, semblent suivre les pas de celui des Emirats et bénéficient d’un booming des services de base déclenché par la guerre en Ukraine. Ceci a été remarqué par des actions multiples du fonds souverain de l’Arabie saoudite, le Public Investment Fund (PIF), qui témoignent d’un engouement pour l’investissement dans l’énergie renouvelable et le pétrole en Egypte.

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