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La Guinée-Bissau en quête de stabilité

Sabah Sabet avec agences, Mardi, 15 avril 2014

Les électeurs de Guinée-Bissau ont voté massivement dimanche aux élections présidentielles et législatives. Un double scrutin censé mettre fin aux coups d'Etat à répétition.

La Guinée-Bissau en quête de stabilité
75 000 Guinées étaient appelés à voter pour mettre fin à l'état de déstabilisation.

Deux ansaprès le dernier putsch d’avril 2012, 750 000 Guinéens (sur 1,6 million) étaient appelés à voter dimanche pour un double scrutin présidentiel et législatif. Des soldats bissau-guinéens et ouest-africains ont assuré la sécurité et 550 observateurs internationaux ont surveillé le scrutin. Treize candidats étaient en lice pour la présidentielle tandis que 15 partis se disputaient les législatives.

Parmi les candidats à la présidentielle figuraient José Mario Vaz et Abel Incada, qui représentent les deux principales formations politiques du pays : le Parti Africain pour l’Indépendance de la Guinée-Bissau et du Cap-Vert (PAIGC) et le Parti de la Rénovation Sociale (PRS) de l’ex-président Kumba Yala, décédé la semaine dernière. L’armée, de son côté, a apporté son soutien à Nuno Gomes Nabiam, un ingénieur de l’aviation civile de 51 ans proche de Kumba Yala.

Mais un 4e nom paraît favori : il s’agit de Paulo Gomes, candidat indépendant et atypique dans le paysage politique de la Guinée-Bissau jusqu’alors essentiellement dominé par des caciques de la guerre d’indépendance. Ce dernier pourrait créer la surprise et son nom revenait souvent chez de jeunes électeurs après leur vote. Il s’agit d’un économiste de 50 ans qui a passé la plus grande partie de sa vie à l’étranger, notamment à la Banque mondiale dont il a dirigé la section Afrique subsaharienne. Il estime que ses compétences et ses réseaux peuvent aider à redresser son pays, qui figure parmi les plus pauvres au monde, (plus des deux tiers des 1,6 million de Bissau-Guinéens vivent au-dessous du seuil de pauvreté). En votant à Bissau, Paulo Gomes a affirmé que son pays était « meurtri » et avait « besoin d’être remis sur les rails ». « Même si on perd, il faut mettre la main à la pâte pour aider le nouveau gouvernement », a-t-il assuré.

Doutes

Quel que soit le vainqueur, il aura la lourde tâche de ramener la stabilité dans ce petit pays, coutumier des coups d’Etat et devenu la plaque tournante du trafic de drogue en Afrique de l’Ouest. En effet, la plupart des partenaires internationaux de la Guinée-Bissau — dont le principal, l’Union Européenne (UE) — ont suspendu leur aide après le coup d’Etat d’avril 2012 et n’ont pas reconnu les autorités de transition alors mises en place avec l’aval des putschistes. Ce putsch mené par le chef de l’armée, le général Antonio Injai, avait interrompu des élections générales entre les deux tours, en renversant le régime du premier ministre, Carlos Gomes Junior. Depuis, ces scrutins ont été maintes fois repoussés.

Les fortes pressions des partenaires étrangers de la Guinée-Bissau, en particulier de ses voisins ouest-africains, pour que les élections aient lieu au plus vite, ont fini par payer, mais la peur d’un nouveau dérapage après la publication des résultats reste forte. Les Guinéens mêmes se demandent si les candidats vont accepter les résultats, et si le nouveau président sera à même d’achever son mandat. Une autre interrogation porte sur l’armée : va-t-elle encore entrer en scène ou non ?

Pour éviter tout dérapage, la Communauté Economique des Etats d’Afrique de l’Ouest (Cédéao, qui rassemble 15 pays) a dépêché des émissaires sur place pour mettre la pression sur les Guinéens. Kadré Désiré Ouédraogo, président de la commission de la Cédéao, a rappelé « la tolérance zéro » de l’organisation « pour une accession non constitutionnelle au pouvoir ».

Renversés par l’armée ou assassinés, rares sont les présidents ou premier ministres qui ont pu finir leur mandat en Guinée-Bissau, ancienne colonie portugaise devenue indépendante en 1974 après une sanglante guerre de libération. Le général Indjai est inculpé depuis un an aux Etats-Unis de complot de narco-terrorisme avec les Forces Armées Révolutionnaires de Colombie (FARC), ce dont il se défend. Les résultats ne sont pas attendus avant plusieurs jours. Un probable second tour est prévu le 18 mai prochain si aucun candidat ne l’emporte dès le premier .

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