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Soudan : Le dialogue reprend

Sabah Sabet avec agences, Lundi, 20 mai 2019

Les discussions ont repris entre le Conseil militaire et les leaders de la contestation au Soudan. Les deux parties doivent s’entendre sur la composition du Conseil souverain, institution-clé de la transition.

Soudan  : Le dialogue reprend
Les islamistes ont manifesté samedi 18 mai à Khartoum pour dire non à un éventuel abandon de la charia (Photo: AFP)

Après une suspension de 72 heures, le Conseil militaire soudanais a annoncé la reprise dimanche des discussions avec l’Alliance pour la Liberté et le Changement (ALC) au palais présidentiel. L’ALC, fer de lance de la contestation, négocie avec les militaires les contours de la période de transition, après la chute du président Omar Al-Béchir le 11 avril. En fait, l’armée avait suspendu le 15 mai le dialogue avec les meneurs de la contestation au sujet de la transition politique, et réclamé la levée des barricades installées par les protestataires à Khartoum. Ces derniers les ont démantelées vendredi 17 mai, mais ont menacé de les rétablir si le Conseil militaire ne reprenait pas les négociations. Les deux parties doivent désormais s’entendre sur la composition d’un Conseil souverain, institution-clé de la transition.

Les militaires veulent qu’il comprenne une majorité des leurs tandis que l’ALC exige qu’elle soit dominée par les civils. Composée de forces de tendance laïque qui vont du Parti communiste aux nationalistes arabes en passant par les courants du Baath arabe, l’ALC ne comprend aucun mouvement islamiste. Les islamistes avaient soutenu le coup d’Etat de 1989 par lequel Omar Al-Béchir était arrivé au pouvoir. Discrets depuis le 11 avril, ils ont appelé à une manifestation, samedi à Khartoum, pour dire non à un éventuel abandon de la charia, voulu par l’ALC, et au processus politique visant à transférer le pouvoir aux civils, proches des laïcs. Ces deux éventualités ouvriraient « les portes de l’enfer pour le Soudan », a averti l’un des leaders de cette mouvance qui a soutenu Omar Al-Béchir pendant 30 ans et qui se sent aujourd’hui marginalisée.

Les islamistes ont invité leurs partisans à se rassembler en début de soirée après l’iftar, le repas de rupture du jeûne musulman du Ramadan, près du palais présidentiel dans le centre de Khartoum. Cette manifestation « est une mobilisation contre la nouvelle dictature civile parce que l’ALC a volé la révolution », a déclaré à l’AFP Al-Tayeb Moustafa, chef d’un groupe d’environ 20 mouvements islamistes.

Divergences sur la charia

Le Conseil militaire lui-même avait reproché à l’ALC de ne pas avoir fait référence à la charia comme source de législation dans ses propositions sur la période de transition. L’ALC avait répliqué en qualifiant cette question de secondaire et en estimant qu’elle pourrait être discutée après la période de transition. Le régime du président déchu appliquait la charia, ce qui avait donné lieu, selon les défenseurs des droits de l’homme, à des abus comme la flagellation des femmes pour « comportement indécent ». « Le Conseil militaire ne doit pas considérer l’ALC comme le représentant (exclusif) de la rue soudanaise », a encore dit M. Moustafa. Les islamistes rejettent tout accord bilatéral projeté entre l’armée et l’ALC, ils le considèrent comme un accord visant à « éliminer les autres forces politiques ».

La communauté internationale encourage la reprise des pourparlers pour parvenir à une transition « vraiment dirigée par les civils », a déclaré sur Twitter un haut responsable américain au terme d’une réunion à Washington. Le secrétaire d’Etat américain adjoint chargé de l’Afrique, Tibor Nagy, a réuni des représentants de l’Union africaine, de l’Onu, de l’Union européenne, de France, d’Allemagne, du Royaume-Uni et de la Norvège afin de coordonner les efforts pour « encourager les parties à trouver un accord le plus rapidement possible sur un gouvernement intérimaire qui soit le reflet de la volonté des Soudanais ».

Le mouvement populaire a commencé au Soudan à l’annonce le 19 décembre du triplement du prix du pain par le gouvernement. Des manifestations ont alors éclaté à travers le pays, en proie à une grave crise économique. La contestation s’est ensuite transformée en un mouvement réclamant le départ du président Béchir, puis le transfert du pouvoir aux civils.

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