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Transition chaotique en Centrafrique

Maha Salem avec agences, Lundi, 09 novembre 2015

Alors que la période de transition politique en Centrafrique touche à sa fin, les violences persistent toujours, rendant difficile le respect du calendrier électoral.

Alors que la Centrafrique s’apprête à choisir ses parlementaires et son président dans moins d’un mois, des élections censées mettre fin à la période de transition, les violences quo­tidiennes entre milices armées formées de chré­tiens et de musulmans ont repris de plus belle ces dernières semaines. Des violences qui ont poussé la commission électorale à annoncer un nouveau calendrier électoral : les élections pré­sidentielle et législatives censées tourner la page du conflit se tiendront le 13 décembre prochain, au lieu du 18 octobre. Un éventuel second tour de la présidentielle aura lieu le 24 janvier prochain si nécessaire. La nouvelle Constitution, adoptée en août, sera soumise à référendum une semaine après les élections.

Or, la situation sur le terrain ne prête pas à l’optimisme. En effet, une nouvelle vague de violence et de combats secoue le pays, et même la mission des Nations-Unies en République centrafricaine n’a pas permis d’enrayer ces violences à Bangui, où 90 personnes ont été tuées et plus de 300 blessés depuis septembre dernier. Ce nouveau cycle de violences fait suite à la découverte du corps d’un musulman, soup­çonné d’avoir été tué par des chrétiens. En pre­mière réaction à ces violences, de vives inter­pellations par des membres du Conseil National de Transition (CNT) à l’encontre du premier ministre, Mahamat Kamoun, ont été lancées. Et pour embarrasser le premier ministre, le CNT a accusé le gouvernement d’être en partie respon­sable des violences qui ont secoué Bangui. « Le gouvernement a laissé les communautés s’entre-tuer sans interposition. Il n’a pas pris les mesures efficaces pour garantir la sécurité des citoyens et préserver leurs biens. Sinon, comment peut-il aujourd’hui expliquer le sombre bilan que nous connaissons et qui s’évalue à des morts, des maisons d’habitation de plusieurs familles entièrement détruites, des biens des particuliers pillés ? », a affirmé Alexandre-Ferdinant N’Guendet, président du CNT.

Essayant de calmer la situation, la présidente de la transition, Catherine Samba-Panza, a pro­cédé à un léger remaniement ministériel. Les ministres de la Défense et de la Sécurité ont été limogés. Mais ce remaniement n’a rien changé et l’insécurité est toujours de mise dans la capi­tale centrafricaine. De son côté, Catherine Samba-Panza a mis l’accent sur les lacunes du travail des forces internationales. « Les derniers événements dramatiques (...) confirment que les efforts de la Minusca (ndlr : la force de l’Onu) sont insuffisants pour garantir la sécurité à Bangui et que des efforts supplémentaires doi­vent être faits pour recadrer les interventions des forces internationales et notamment négo­cier la mise en place des postes avancés dans tous les quartiers afin d’assurer une sécurité de proximité aux populations », a affirmé la prési­dente de la transition. Mais elle a accusé aussi les milices du KM5 (quartier de Bangui) et les signataires des « accords de Nairobi » (accords signés notamment par l’ancien président, François Bozizé, et ses adversaires) d’être à l’origine des violences.

Véritable enjeu

Il semble donc que le chemin pour rétablir la paix, la sécurité et une réconciliation soit encore long. Le désarmement des milices chrétiennes et musulmanes reste toujours le vrai enjeu dans ce pays. Un point d’achoppement qui divise les partis en conflit même après la signature d’un accord de paix, car jusqu’à maintenant, le pro­cessus de désarmement n’a pas commencé.

Les troubles en République centrafricaine ont débuté avec la chute du président François Bozizé, en 2013. L’autorité de l’ex-chef d’Etat a commencé à vaciller après sa réélection contestée, en 2011. A la fin de 2012, plusieurs mouvements de rébellion du nord s’unissent pour former la Séléka (alliance en sango), une coalition très hétérogène appuyée par des mer­cenaires étrangers. Malgré la signature d’un accord de paix en janvier 2013 à Nairobi, la Séléka s’empare de Bangui et renverse M. Bozizé en mars 2013. Michel Djotodia, musul­man et chef de la coalition, s’autoproclame président pour une période de transition de trois ans. A cette époque, leurs exactions leur ont ensuite valu les représailles des milices chré­tiennes anti-Balaka, et l’armée française a dû intervenir dans le cadre de l’opération Sangaris pour mettre fin aux massacres. Malgré la pré­sence des troupes françaises, ou encore la force de l’Onu, le pays est toujours en proie à des violences. Le 20 janvier 2014, les membres du CNT élisent Catherine Samba-Panza comme nouveau chef d’Etat de transition. Celle qui était, jusque-là, maire de Bangui, est devenue la première femme présidente de la République centrafricaine. Ainsi, le pays compte sur les élections pour sortir définitivement du gouffre. « Il y a vingt mois, nous étions dans le gouffre. Nous avons eu la capacité de nous en sortir. Je crois profondément au désir du peuple centra­fricain de vivre en paix », a déclaré la prési­dente Catherine.

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