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Double défi en Somalie

Sabah Sabet avec agences, Dimanche, 23 août 2015

Alors que la violence se poursuit en Somalie, des parlementaires tentent de destituer le président. Une tentative qui, selon la communauté internationale, risque d'entraver les progrès vers la paix

Double défi en Somalie

18 morts et 30 blessés : tel est le dernier bilan en Somalie à la suite des deux attentats suicide, commis successivement samedi dernier, par des insurgés islamistes shebab. Le premier à Kismayo contre une base qui abrite des militaires kényans de la force de maintien de la paix de l’Union africaine (Amisom) et des soldats somaliens. Le second attentat à Mogadiscio, près d’un poste de police et d’un camp de déplacés. En fait, cette scène à répétition est le casse-tête du gouvernement et du président somalien, Hassan Cheikh Mohamoud. Ce dernier tente d’instaurer la stabilité et la paix en combattant les Shebab : une insurrection armée qui, depuis 2007, combat les fragiles autorités de Mogadiscio.

Parallèlement à la lutte contre les Shebab, le président somalien fait face à une nouvelle crise politique. Près de 95 députés ont déposé la semaine dernière une motion de destitution contre Cheikh Mohamoud. « Cette motion ne vise pas à détruire, mais à corriger », a expliqué Abdi Barre Yusuf, un député soutenant cette motion, déposée sur le bureau de la Chambre du peuple et qui accuse le chef de l’Etat de « corruption ». Selon un autre député, Abdirahman Hosh Jibril, les députés ont « des indices et des preuves clairs que le président est impliqué dans de la corruption et était intervenu auprès d’institutions indépendantes (...) telles que des tribunaux ». En fait, cette motion a suscité une profonde inquiétude des partenaires internationaux de la Somalie. L’Onu, l’Union africaine, l’Union européenne, Washington et Londres notamment, ont estimé que la motion parlementaire pour destituer le président Hassan Cheikh Mohamoud va « entraver les progrès vers la paix et les objectifs de construction d’un Etat en Somalie ». « Si nous respectons pleinement les droits du parlement fédéral à contrôler les institutions et à remplir ses devoirs constitutionnels, une telle motion (...) va consommer un temps extrêmement précieux », estiment-ils. Les représentants ont demandé aux institutions fédérales somaliennes de maintenir leur unité pendant cette « période problématique » et de se concentrer sur la préparation du processus électoral de 2016 et la lutte contre les militants shebab. « Le recours à une telle motion nécessite un niveau élevé de transparence et d’intégrité dans le processus et prendra un temps inestimable, surtout en l’absence de corps juridiques essentiels », a indiqué le communiqué des représentants. Selon eux, les institutions émergentes sont « toujours fragiles et nécessitent une période de stabilité et de continuité ».

Pour sa part, Abdi Barre Yusuf a appelé la communauté internationale à « être neutre », disant « attendre que le président de la Chambre convoque la session ». En revanche, le président somalien a nié ces accusations, affirmant que son gouvernement « en a fait beaucoup au cours des quatre dernières années ». Les premières élections au suffrage universel depuis 40 ans, précédées d’un référendum constitutionnel cette année, sont prévues en Somalie en 2016, à l’expiration du mandat des institutions actuelles, en place depuis 2012. Mais les autorités ont annoncé, fin juillet dernier, qu’elles étaient impossibles à organiser en raison de délais trop courts et de la situation sécuritaire dans le pays. En outre, la communauté internationale a, à plusieurs reprises, fait part de ses inquiétudes « sur les retards politiques » en Somalie, en raison des « luttes de pouvoir » au sein des institutions. De longs conflits ont notamment opposé le président Mohamoud à ses premiers ministres Abdi Farah Shirdon, puis Abdiweli Sheikh Ahmed, finalement débarqué par le parlement en décembre dernier. La Somalie est privée de réelle autorité centrale depuis la chute du président Siad Barre en 1991. Le pays est, depuis, plongé dans le chaos, livré aux milices de chefs de guerre, de groupes armés et de gangs criminels .

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