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Soudan du Sud : Quatre ans de chaos

Sabah Sabet avec agences, Lundi, 13 juillet 2015

Le Soudan du Sud a célébré cette semaine le quatrième anniversaire de sa création. Mais le plus jeune Etat du monde, plongé dans une guerre civile depuis deux ans, n'a pas de quoi être festif.

Soudan du Sud
Quatre années ont passé depuis la création du Soudan du Sud et l'espoir d'une nation démocratique et de paix est loin d'être réalisé. (Photos : Reuters)

Violences, famine, des milliers de morts et réfugiés. Telle est la situation actuelle du Soudan du Sud alors qu’il célèbre ses quatre ans. Après des décennies de guerre contre le Soudan, cet Etat, le plus jeune du monde, s’est séparé du nord du Soudan grâce au soutien américain et en vertu d’un accord de paix conclu en 2005. En janvier 2011, un référendum sur l’autodétermination a été organisé et les Soudanais du Sud ont voté à 98 % pour la séparation de Khartoum. Le pays, peuplé d’environ 11 millions d’habitants, a accédé à la souveraineté internationale en juillet 2011.

En s’arrachant le droit à l’autodétermination, le peuple sud-soudanais entendait se mettre à l’abri d’une guerre civile et des affrontements intercommunautaires récurrents qui avaient duré plus de trois décennies. Mais l’espoir d’une nouvelle nation démocratique, de paix et de développement n’a pas duré pour longtemps. En décembre 2013, le pays est, de nouveau, en proie à une guerre civile qui met à mal le pays. Une guerre sans fin marquée par la rivalité entre le président Salva Kiir et son ex-vice-président Riek Machar. Les deux hommes, qui ont combattu ensemble pendant la guerre du Sud avec Khartoum, viennent de deux communautés ethniques différentes. Kiir est un Dinka, Machar un Nuer. Cette rivalité qui a dégénéré en un véritable conflit ethnique est marquée par une scission de l’armée et des massacres sans précédent. Dans l’Etat d’Unité, l’armée gouvernementale et les rebelles livrent en permanence des combats en vue du contrôle de la zone stratégique de Leer. Région natale de l’ancien vice-président devenu chef rebelle, Leer avait déjà été complètement mise à sac en janvier 2014, rapporte le site d’information La Tribune. Le même scénario se déroule dans l’Etat du Haut-Nil, précisément autour de la ville de Malakal, où sont installés les rebelles de Machar. Ils ont également annoncé vouloir prendre le contrôle de la zone pétrolifère de Palouch toute proche, exigeant des sociétés y travaillant qu’elles évacuent leurs travailleurs. Sous contrôle gouvernemental, les puits de Palouch, dont le pétrole transite par le Soudan avant d’être exporté par la mer Rouge, sont les derniers encore en fonctionnement au Soudan du Sud.

Les forces rebelles comme celles du gouvernement ont été accusées de crimes de guerre. Fin avril, les forces de l’opposition ont attaqué la ville de Bentiu, capitale de l’Etat d’Unité. Elles ont exécuté des centaines de civils. Les rebelles ont réquisitionné une radio pour demander à leurs camarades de violer des femmes de certains groupes ethniques. Une église voisine a été utilisée comme base de viol pendant plusieurs mois. De plus, de jeunes enfants ont été contraints à devenir des soldats. Selon les chiffres de l’Onu, le conflit a fait plus de 50 000 victimes, mais des ONG humanitaires sur le terrain citées par le quotidien britannique, The Guardian, confirment les 100 000 morts.

Tentatives échouées

D’Addis-Abeba à New York, toutes les tentatives de négociations ont été vouées à l’échec. Il y a eu au moins sept tentatives d’accords de cessez-le-feu depuis la fin janvier, à chaque fois, elles ont été déçues par l’armée du président Salva Kiir et par les forces rebelles menées par Riek Machar.

La communauté internationale, notamment l’Union africaine, est régulièrement déçue par l’attitude des deux leaders au front. Riek Machar et Salva Kiir signent des accords de paix qui sont violés le lendemain. Les sanctions prononcées contre certains dirigeants militaires et les menaces internationales de sanctions adressées à plusieurs reprises aux belligérants ont jusqu’ici eu peu d’effet. Le 3 juillet dernier, le président américain, Barack Obama, a de nouveau appelé les leaders du pays à mettre fin au « cycle de la violence, à engager un processus de réconciliation ». Par ailleurs, le Conseil de sécurité de l’Onu a gelé, au courant de la semaine dernière, les avoirs financiers et interdit de voyager six chefs militaires sud-soudanais issus des deux camps.

Dans une déclaration rendue publique jeudi dernier, au siège de l’Onu à New York, les membres du Conseil ont souligné que l’échec des deux dirigeants à poursuivre la voie de la paix a entraîné la mort de dizaines de milliers de civils, le déplacement de plus de 2,1 millions de personnes, et la mort de soldats de la paix de l’Onu.

En outre, le Conseil de sécurité a salué les efforts de médiation déployés par l’Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD), un groupement régional associant huit pays est-africains, depuis le début de la crise, tout en regrettant l’absence de signe de la part des parties évoquant la possibilité d’un arrêt des combats en faveur d’un véritable processus de paix. A cet égard, le Conseil a déclaré attendre avec impatience les conclusions et recommandations du rapport de la commission d’enquête de l’Union africaine sur le Soudan du Sud, dont la publication est imminente. En outre et afin de mettre un terme au conflit, Machar préconise cette semaine la démission du président Salva Kiir. Ce qui n’est pas pour bientôt et laisse présager que le conflit n’est pas prêt de connaître son épilogue, et c’est difficile, dans un tel climat délétère, de célébrer la Fête d’indépendance.

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