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Bâtir une position commune

Maha Salem avec agences, Mardi, 06 novembre 2012

L’opposition syrienne se réunit ce jeudi à Doha sous l’égide de la Ligue arabe, pour tenter de surmonter ses différends.

Essayant une nouvelle fois de s’unir et de s’organiser, le Conseil National Syrien (CNS) a entamé dimanche dernier à Doha une réunion cruciale de quatre jours pour élargir sa représentativité remise en question par les Etats-Unis, qu’il accuse de vouloir remodeler l’opposition syrienne. Ces assises seront suivies ce jeudi d’une réunion convoquée par la Ligue arabe et le Qatar, élargie aux autres groupes de l’opposition syrienne et dont se méfie le CNS. « Si l’opposition réussit à surmonter ses divergences, elle incitera la communauté internationale à surmonter ses différends et à s’aligner pour adopter une seule résolution, et par la suite, le conflit syrien pourra être réglé en quelques semaines », explique Dr Ayman Abdel-Wahab, analyste au Centre des Etudes Politiques et Stratégiques (CEPS) d’Al-Ahram au Caire. L’opposition syrienne souhaite bâtir une position commune, afin de gagner enfin en crédibilité et d’avoir les moyens militaires et politiques de renverser le président Bachar Al-Assad.

L’opposant syrien respecté, Riad Seif, a nié dimanche vouloir présider un gouvernement syrien en exil. Cette question devrait d’ailleurs être débattue lors de la réunion ce jeudi. Il a indiqué également qu’il oeuvrait à la constitution d’une nouvelle direction politique pour l’opposition. Quelque 286 membres du CNS, jusqu’à présent considéré comme la principale coalition de l’opposition visant à renverser le régime du président Bachar Al-Assad, doivent amender les statuts de cette instance pour l’élargir à de nouveaux membres. Après l’admission d’environ 120 nouveaux membres, le CNS procédera ce mercredi à l’élection des 40 membres de son secrétariat général, qui éliront à leur tour le président de cette instance. Essayant de justifier les différends au sein de l’opposition, le président sortant du CNS, Abdel-Basset Seyda, a dénoncé les nombreuses tentatives de trouver des remplaçants au CNS, tout en reconnaissant que certaines critiques à l’égard de sa coalition étaient fondées. Il a appelé à organiser et à unifier l’action militaire contre le régime syrien, afin que les différents groupes militaires combattant sur le terrain puissent à terme constituer le noyau de la prochaine armée syrienne.
Cette réunion intervient alors que le CNS, longtemps considéré comme un interlocuteur légitime de la communauté internationale, semble être tombé en disgrâce aux yeux de Washington. La secrétaire d’Etat américaine, Hillary Clinton, a en effet publiquement désavoué le CNS, estimant qu’il ne pouvait plus être considéré comme le dirigeant visible de l’opposition, et a plaidé pour une nouvelle opposition plus large, incluant des « Syriens de l’intérieur ».
Le CNS a violemment réagi à cette annonce en accusant les Etats-Unis de vouloir le remodeler pour l’amener à négocier avec le régime. C’est dans ce contexte que se tient la réunion élargie de jeudi. Burhan Ghalioun, ancien chef du CNS et l’un des candidats possibles à la nouvelle direction de cette instance, a affirmé que le CNS réclamait que ses représentants constituent 40 % des participants à la réunion de jeudi, qui regroupera d’autres composantes de l’opposition. « Cette réunion vise à rassembler toute l’opposition syrienne autour d’un programme unifié et à former une instance représentant toutes les tendances de l’opposition. Ce n’est pas une mauvaise idée, mais nous avons des réserves sur la façon de la présenter », a déclaré Ghalioun à l’AFP.
Certaines sources avaient affirmé que la réunion de jeudi évoquerait la création d’un gouvernement en exil dirigé par l’opposant Riad Seif. « Je ne serai en aucun cas candidat pour diriger un gouvernement syrien en exil », a déclaré Seif. Ce dernier a indiqué qu’il se contenterait « d’aider à constituer une direction politique qui satisfasse le peuple syrien et le monde », et a souligné que son initiative ne constituait « pas un substitut au CNS, qui doit en être une importante composante ». Lors de la réunion de jeudi, « nous constituerons une direction politique qui formera au plus vite un gouvernement de technocrates », a assuré M. Seif.
L’initiative de Riad Seif pour élargir l’opposition syrienne est soutenue par les Etats-Unis, la Grande-Bretagne et la France, et il aurait aussi le soutien de pays arabes, dont le Qatar, ainsi que de la Turquie. Il s’agit d’un projet équilibré qui intègre les différentes composantes de la société syrienne : des alaouites, des chrétiens, des Syriens de l’intérieur et de l’extérieur, ainsi que le CNS. Ces derniers jours, M. Seif a rencontré en Jordanie une vingtaine d’opposants, membres ou non du CNS, pour exposer son projet.
Toutes les initiatives pour un règlement ont échoué jusqu’à présent en Syrie, où les violences liées à la révolte populaire transformée en conflit armé ont fait, selon une ONG syrienne, plus de 36 000 morts depuis mars 2011. Pour les Comités locaux de coordination (LCC) qui animent la rébellion sur le terrain, « il n’est plus acceptable, sous aucun prétexte, de continuer sur la voie de la révolution sans une direction politique unifiée et efficace ». Les LCC ont aussi qualifié de « malvenues » les interventions étrangères, notamment les critiques du type de celle exprimée par la secrétaire d’Etat américaine, Hillary Clinton. « La communauté internationale doit revoir sa politique défaitiste concernant son soutien au peuple syrien et aux rebelles, qui a pour résultat de laisser perdurer ce régime, de laisser se poursuivre le massacre des Syriens, de rendre la crise plus complexe et de favoriser l’extrémisme », précise sans détour le communiqué des LCC.
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