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L’opposition brave les interdits

Sabah Sabet, Mardi, 06 novembre 2012

Malgré l’interdiction des autorités et les hauts préparatifs sécuritaires, l’opposition est parvenue à se réunir massivement pour protester contre un amendement de la loi électorale.

Pour la troisième fois en deux semaines, l’opposition a pu réunir dimanche dernier de nombreux manifestants dans la capitale. Pari réussi : malgré l’interdiction des autorités et les menaces répétées par le ministre de l’Intérieur d’empêcher la manifestation au besoin par la force, des milliers de personnes ont manifesté à l’appel de l’opposition à Koweït City. La police et les forces spéciales avaient établi un véritable cordon (des centaines d’hommes, des véhicules blindés) pour isoler le site prévu à l’origine pour la manifestation. Qu’à cela ne tienne, les organisateurs ont prévenu tout le monde par Twitter : « Rendez-vous à Mishref, 20 kilomètres au sud de la capitale ». La police, immédiatement, a fermé la plupart des voies d’accès, mais plusieurs milliers de manifestants ont quand même réussi à s’y rendre. L’opposition avait appelé ses partisans à ne pas recourir à la violence même si les forces de sécurité les attaquaient. « Nous resterons pacifiques quel qu’en soit le coût (...). La marche pacifique est un devoir, une promesse et un engagement », ont annoncé les organisateurs sur leur compte Twitter, la veille des manifestations. L’une des figures de l’opposition, Mussallam Al-Barrak, a même demandé samedi soir à ses sympathisants de « livrer à la police » ceux qui auraient recours à la violence. Pour sa part, la police a utilisé des pistolets paralysants et des gaz lacrymogènes, pour disperser les manifestants. Des activistes ont dénoncé des arrestations parmi les manifestants, mais sans faire état de blessés.

En fait, ces deux dernières semaines, les forces de l’ordre ont fait usage de gaz lacrymogènes pour disperser plusieurs dizaines de manifestants lors de deux rassemblements, donnant lieu à des heurts dans lesquels plus de 130 protestataires et 16 policiers ont été blessés. L’opposition avait organisé ces dernières manifestations pour protester contre un amendement de la loi électorale, approuvé le 19 octobre par l’émir du Koweït, cheikh Sabah Al-Ahmad Al-Sabah, et qui pourrait, selon elle, favoriser une manipulation des résultats des élections anticipées, convoquées pour le 1er décembre.
L’opposition, composée d’islamistes, de nationalistes et de libéraux, avait remporté les élections parlementaires de février, mais la Cour constitutionnelle a annulé ce scrutin en juin et a rétabli l’ancien Parlement favorable au gouvernement.
Par ailleurs, les dirigeants de l’opposition insistent sur le fait qu’ils ne veulent pas nuire à la famille régnante des Al-Sabah et ont réaffirmé leur loyauté à l’émir vendredi, tout en lui demandant de nouveau de retirer l’amendement controversé.
En outre, et dans ce qui semble être une médiation pour sortir de la crise, l’émir cheikh Sabah Al-Ahmad Al-Sabah a rencontré tard dimanche quatre figures de l’opposition, dont deux anciens députés islamistes. C’est la première rencontre entre l’émir et l’opposition depuis le début de la crise il y a quelques semaines.
L’ancien député Mohammad Hayef a indiqué sur Twitter que l’émir leur avait dit qu’il acceptait toute décision que rendrait la Cour constitutionnelle sur l’amendement de la loi électorale, à l’origine de la crise actuelle. Rien n’est réglé pour autant, puisqu’en février dernier, lorsque l’opposition a remporté les élections générales, c’est cette même Cour constitutionnelle qui a annulé le vote et a réinstallé le Parlement précédent, pro-gouvernemental. Par ailleurs, si ces élections ont bien lieu le 1er décembre prochain, ce sera la cinquième fois depuis 2006, et donc la deuxième fois depuis le début de l’année 2012, après les législatives de février, que les Koweïtiens choisissent leurs députés.
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