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Fatah-Hamas : Retour à la case départ

Maha Salem avec agences, Mardi, 15 janvier 2019

L'Autorité palestinienne s'apprête à prendre de nouvelles mesures contre le Hamas. Des mesures qui mettent à mal un accord de réconciliation déjà hyper-fragile.

Des manifestations éclatent de temps en temps à Gaza pour revendiquer un gouvernement d
Des manifestations éclatent de temps en temps à Gaza pour revendiquer un gouvernement d'union entre le Fatah et le Hamas. (Photo: AFP)

Encore une fois et malgré les multiples tentatives en vue d’une réconciliation interpalestinienne, la tension est montée d’un cran entre les camps palestiniens, le président Mahmoud Abbas se préparant à prendre contre le Hamas des mesures strictes. « Des décisions très importantes contre le Hamas sont en cours de discussion », a affirmé à l’AFP un haut responsable sous couvert d’anonymat. Selon ce dernier, l’Autorité palestinienne dépense environ 100 millions de dollars par mois à Gaza, notamment pour subventionner l’approvisionnement en électricité, et envisage de réduire considérablement ses dépenses.

« Ceux qui veulent gouverner Gaza doivent assumer la responsabilité de le gouverner », a déclaré ce responsable. Une annonce qui fait craindre un regain de tension dans la bande de Gaza sous contrôle du mouvement Hamas. Depuis des mois, l’Autorité palestinienne inflige de sévères mesures de rétorsion au Hamas, notamment pour l’épuiser financièrement. Et de nouvelles vont venir, disent des proches du président de l’Autorité.

Selon les analystes, l’Autorité palestinienne pourrait retirer son personnel des points de passage avec Israël. Ce dernier serait alors confronté à la difficile décision de fermer les points de passage, au risque de la suffocation de Gaza, ou de les faire fonctionner avec le Hamas, considéré comme une organisation terroriste par l’Etat hébreu, les Etats-Unis et l’Union européenne. Les mesures contre le Hamas pourraient aussi inclure la réduction des salaires des familles des prisonniers du Hamas ou l’annulation des passeports palestiniens des employés du Hamas.

Selon Dr Mona Soliman, professeure à la faculté d’économie et de sciences politiques de l’Université du Caire, « ces mesures promises sont la conséquence d’informations selon lesquelles les dirigeants du Hamas recevraient d’importantes sommes du Qatar. De l’argent qui irait dans les comptes des dirigeants du Hamas et qui ne profite pas aux habitants de l’enclave, alors que ceux-là souffrent terriblement du blocus imposé à la bande de Gaza depuis 2007. Les dirigeants du Hamas se servent de ces fonds pour financer leurs propres intérêts ou bien pour acheter des armes et des équipements afin de renforcer leur branche armée. L’Autorité palestinienne entend resserrer l’étau autour du Hamas pour que ce soit les Gazaouis eux-mêmes qui appellent à son départ ».

Le président palestinien, Mahmoud Abbas, a déjà annoncé son intention de dissoudre le parlement palestinien dominé par le Hamas, et ce, en respect à la décision de la Cour constitutionnelle. En effet, le 23 décembre dernier, cette cour avait statué que le parlement devait être dissous, faute d’avoir pu se réunir depuis 12 ans. Cette assemblée ne s’est pas réunie depuis la scission de 2007, mais représente toujours formellement le lieu de l’activité législative.

Le peuple gazaoui, première victime

L’Autorité palestinienne tente donc de se débarrasser du Hamas et imposer son contrôle sur la bande de Gaza. Et le Hamas riposte déjà : « Tout type de sanction telle que cesser de payer l’électricité, bloquer l’acheminement des médicaments, fermer la frontière ou réduire les salaires est destiné à faire pression sur les habitants pour qu’ils se soulèvent contre le Hamas, et c’est voué à l’échec », a déclaré Bassem Naim, un haut responsable du Hamas.

Tout porte donc à croire que la tension risque d’aller crescendo entre le Hamas et le Fatah. Citée par l’AFP, Nadia Hijab, présidente du groupe de réflexion palestinien Al-Shabaka, estime que les décisions de Abbas, surtout celles qui concernent le retrait de l’Autorité palestinienne des points de passage, inquiètent les Palestiniens. « Ces derniers craignent que cette décision ne renforce la division et ne mène à une rupture complète entre Gaza et la Cisjordanie, ce que recherche Israël », explique Nadia Hijab.

Le Hamas et le Fatah, parti qui domine l’Autorité palestinienne établie en Cisjordanie occupée et présidée par M. Abbas, ont tenté à plusieurs reprises de se réconcilier après que le mouvement Hamas eut pris le pouvoir à Gaza après avoir remporté les élections législatives en 2006. Accroché bec et ongles au pouvoir depuis cette date, le Hamas a accepté de quitter le pouvoir à Gaza et le passer à l’Autorité palestinienne, surtout qu’il s’est livré à trois guerres avec Israël. Et pour sauver Gaza, plusieurs accords de réconciliation ont été signés entre les deux camps palestiniens. La dernière tentative de raccommodage, sous l’égide de l’Egypte, date de fin 2017. Les deux camps avaient alors accepté de partager le pouvoir et le Hamas consentait à céder à l’Autorité le contrôle des points de passage séparant Gaza de l’Egypte et d’Israël. Mais l’accord a fait long feu, les deux parties se rejetant la responsabilité de l’échec.

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