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Proche-Orient : En attendant le fameux « deal  » du siècle

Maha Salem avec agences, Mardi, 26 juin 2018

Au cours de leur discrète tournée au Moyen-Orient, les deux émissaires américains du président Donald Trump, Jared Kushner et Jason Greenblatt, ont rencontré différents dirigeants régionaux pour trouver une issue au conflit israélo-palestinien. Mais aucune annonce importante n’a été faite.

Proche-Orient  : En attendant le fameux « deal  » du siècle
La visite des deux émissaires vient au temps où la tension se poursuit. (Photo : AFP)

Coïncidant avec une montée de tensions dans les territoires palestiniens, le conseiller et gendre du président américain, Jared Kushner, et son émissaire spécial pour le Proche-Orient, Jason Greenblatt, ont fait une tournée dans la région. Commençant par la Jordanie, ils ont visité aussi l’Egypte (voir Egypte page 6), Israël, l’Arabie saoudite et le Qatar. Mais pas les territoires palestiniens. Pourtant, tout au long de leur tournée, ils ont évoqué les efforts de paix des Etats-unis dans le conflit isarélo-palestinien. Kushner et Greenblatt ont parlé, vendredi 22 juin à Jérusalem, avec le premier ministre israélien, Benyamin Netanyahu, des efforts de paix des Etats-Unis dans le conflit israélo-palestinien. « Les équipes ont discuté de la manière de faire avancer le processus diplomatique, des développements dans la région, ainsi que de la situation sécuritaire et humanitaire à Gaza », a indiqué dans un communiqué le bureau du premier ministre sans donner plus de détails.

Mais aucune rencontre n’a été organisée avec les responsables palestiniens. En effet, l’Autorité palestinienne a gelé, depuis plusieurs mois, les contacts avec Washington, après la reconnaissance par l’Administration Trump de Jérusalem comme capitale d’Israël, en décembre dernier. Les Palestiniens considèrent Jérusalem-Est comme leur future capitale, insistant sur le fait que le statut de la ville doive être négocié dans le cadre d’un accord de paix, comme le préconise la communauté internationale. D’ailleurs, avant même la tournée des responsables américains, le porte-parole de la présidence palestinienne, Nabil Abou-Roudeina, a estimé que les efforts américains— qui ignorent les positions palestiniennes sur des questions, telles que Jérusalem, la création d’un Etat palestinien et les réfugiés— étaient voués à l’échec.

Répondant à la position palestinienne, voire essayant de « menacer » les Palestiniens, Jared Kushner s’est interrogé sur la capacité, mais aussi la volonté du président palestinien Mahmoud Abbas de faire des concessions en vue d’un accord de paix avec Israël. « Le président (Mahmoud) Abbas dit qu’il est attaché à la paix et je n’ai aucune raison de ne pas le croire », a déclaré Jared Kushner dans un entretien accordé au journal palestinien Al-Qods. « Je me demande dans quelle mesure le président Abbas a la capacité ou la volonté de s’engager afin de conclure un accord. Il discute des mêmes points depuis 25 ans. Aucun accord de paix n’a été conclu pendant cette période », a ajouté le conseiller américain. Selon les déclarations de ce dernier, les deux parties devront faire un pas en avant et se retrouver à mi-chemin de leurs positions officielles afin de parvenir à un accord. « Je ne suis pas sûr que le président Abbas soit en mesure de faire cela », a affirmé le gendre de Donald Trump, en insistant sur la volonté des Etats-Unis de relancer le processus de paix israélo-palestinien, « avec ou sans les Palestiniens à la table des négociations ».

Des déclarations choquantes mais qui révèlent les intentions américaines. « Le responsable américain insiste sur les concessions qui doivent être présentées par les Palestiniens, mais ces derniers ne peuvent rien présenter de plus. Ils ont déjà fait le maximum de concessions possibles », estime Dr Mona Salmane, analyste au Centre des Etudes Politiques et Stratégiques (CEPS) d’Al-Ahram au Caire. « Ce qu’a dit le responsable américain signifie clairement que Washington va imposer son plan le plus vite possible, sans prendre en considération la position des Palestiniens, mais juste celle des autres pays de la région. Or, parmi ces pays, certains pays le refusent, d’autres l’acceptent mais d’une façon tacite », explique Salmane. Et d’ajouter: « Le plan américain vise à établir et reconnaître Jérusalem comme capitale de l’Etat hébreu, ce qui est presque déjà fait. De plus, les Américains voudraient déplacer les Palestiniens et les implanter au Sinaï et en Jordanie. Ce qui est complètement refusé aussi bien par les Egyptiens que par les Jordaniens et les Palestiniens », explique Mona Salmane.

Contraindre plutôt que de négocier

En fait, Washington compte imposer son plan en se basant sur certains faits. « Il compte sur le fait que certains dirigeants palestiniens acceptent le plan américain pour plusieurs raisons, dont le plus important est que ce conflit est devenu de plus en plus épuisant, tant pour les dirigeants que pour le peuple. Autre raison qui peut pousser à accepter le plan, le manque d’alternatives et la conviction que rien de plus ne peut être acquis », dit Salmane. L’experte estime en outre que « les Américains comptent sur les dirigeants palestiniens qui vont dominer la scène politique après le président palestinien, Mahmoud Abbas, dont la santé est critique ».

Réagissant aux déclarations de Kushner, le haut responsable palestinien Saëb Erakat a estimé que le gendre du président Trump était le représentant d’une politique qui contraint plutôt que négocie. Dans un communiqué, il a déploré le refus des Etats-Unis de mentionner les droits des Palestiniens ou un Etat palestinien. Selon M. Erakat, le plan américain consolide la mainmise coloniale d’Israël sur les terres et les vies palestiniennes. « Mais, la Palestine et les droits des Palestiniens ne sont pas à vendre », a ajouté Erakat, en référence aux propos de Kushner, pour qui la paix permettrait aux Palestiniens d’atteindre une certaine prospérité économique.

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