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L’isolement de Abbas

Abir Taleb avec agences, Jeudi, 06 octobre 2016

Le report des législatives dû à l'animosité interpalestinienne et l'absence de perspective de relance de la paix placent l'Autorité palestinienne en mauvaise posture.

Les élections municipales palestiniennes devaient avoir lieu ce 8 octobre. Il n’en sera rien. La première décision de la justice palestinienne à ce sujet était prise le 8 septembre dernier, la Haute Cour palestinienne avait décidé de « suspendre » le scrutin, en attendant d’examiner une plainte contestant sa tenue. Déposée par un avocat, cette plainte dénonçait l’omission dans l’élection de Jérusalem-Est, capitale espérée d’un Etat palestinien, ainsi que l’instrumentalisation de la justice par le Hamas dans la bande de Gaza, que le mouvement islamiste contrôle depuis 2007.

La deuxième décision vient tout juste de tomber : lundi dernier, la Cour suprême palestinienne a décidé que les élections municipales se tiendraient en Cisjordanie mais pas dans la bande de Gaza, sans toutefois avancer de date. La Commission électorale a, elle, plaidé pour un report de six mois, dans une lettre adressée au président de l’Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas, car, dans l’immédiat, la décision de la Cour suprême « aggrave la fracture » palestinienne.

En effet, l’incapacité de tenir les élections illustre à nouveau l’incapacité des mouvements palestiniens à surmonter leurs rivalités. Ce scrutin était censé être le premier depuis 2006 à se tenir en même temps dans les deux territoires, séparés géographiquement par le territoire israélien et politiquement par des années de querelles entre l’Autorité palestinienne et le Hamas islamiste, lequel n’a pas manqué de critiquer la décision de la justice.

Le report des municipales intervient dans une période critique pour l’Autorité. Eloignant un peu plus l’espoir d’une réconciliation interpalestinienne, ce report témoigne de la faiblesse actuelle de la présidence palestinienne. En effet, aussi bien sur le plan intérieur qu’au sujet des relations avec Israël, le président palestinien, Mahmoud Abbas, est de plus en plus isolé. Pas de partenaire politique interne hors Fatah (son parti), pas de partenaire pour la paix. Tel est l’amer constat auquel fait aujourd’hui face l’Autorité palestinienne.

Preuve en est ce qui s’est passé lors des funérailles de l’ancien président israélien, Shimon Peres, vendredi dernier à Jérusalem. Lors de ces obsèques, Abbas était le seul dirigeant arabe présent. Un geste personnel qui va à l’encontre de l’état d’esprit du public palestinien et qui lui a valu de vives critiques.

Lors de ces funérailles, une brève rencontre a réuni Abbas et Netanyahu, qui se sont serrés la main, sans plus. Si le président palestinien a voulu faire un geste courageux pour rappeler qu’il est et restera en faveur de la paix, saluant la mémoire d’un « partenaire pour la paix des braves », ce geste ne lui aura finalement rien apporté mis à part les critiques de son propre peuple, voire du monde arabe, où les réactions au décès de Peres ont oscillé entre un mutisme embarrassé et une franche hostilité. En effet, ce n’est sûrement pas sa présence qui lui vaudra une relance du processus de paix israélo-palestinien aujourd’hui complètement mort : au moment où l’on pleurait la mort de « l’artisan israélien de la paix ». Un récent sondage, publié par l’institut Project HaMidgam pour le site d’informations Walla, affirmait que 64 % des Israéliens estiment qu’il n’y aura jamais d’accord de paix avec les Palestiniens, et les autorités israéliennes donnaient leur feu vert à la construction de nouveaux logements dans une colonie de Cisjordanie occupée ainsi qu’à celle d’une zone industrielle israélienne près de Ramallah, selon l’ONG anti-colonisation La Paix Maintenant.

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