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Syrie: Un dialogue pourrait s’ouvrir

Maha Salem avec agences, Mardi, 12 février 2013

Le chef de l’opposition souhaite désormais négocier avec le vice-président, M. Chareh. Une demande accueillie favorablement par le régime qui refuse cependant les conditions préalables demandées par M. Khatib.

Syrie
L'opposition veut dialoguer avec le vice-président sous conditions. (Photo: AP)

Accompagné par une délégation de l’opposition, le chef de la Coalition de l’opposition syrienne, Ahmed Moaz Al-Khatib, a rencontré le médiateur de l’Onu et de la Ligue arabe en Syrie, Lakhdar Brahimi. Ce dernier l’a encouragé à poursuivre ses efforts pour mettre fin à la crise qui plane sur le pays et paralyse sa vie quotidienne. L’émissaire s’est entretenu avec Al-Khatib ainsi qu’avec le vice-président de la Coalition, Riad Seif, et la délégation qui les accompagne. Khatib s’était dit prêt fin janvier à entamer des discussions directes avec des représentants du régime n’ayant pas « de sang sur les mains ». Et il a présenté une liste de conditions préalables à tout dialogue.

En première réaction, le régime syrien est prêt à dialoguer avec ses adversaires, mais sans « conditions préalables », a affirmé le ministre de l’Information. « La porte est ouverte, la table de négociations est là, bienvenue à tout Syrien qui veut dialoguer avec nous, nous sommes sérieux concernant la question du dialogue, ne parlent-ils pas de dialogue à l’étranger ? Quand on parle de dialogue, il s’agit d’un dialogue sans condition, qui n’exclut personne, mais si quelqu’un vient me dire : je veux dialoguer de cette question sinon je te tue, cela n’est pas un dialogue. Il ne faut pas qu’il y ait de conditions préalables », a affirmé le ministre Omrane Al-Zohbi.

Le chef de la Coalition de l’opposition avait également exigé la libération d’ici dimanche de toutes les prisonnières détenues par le régime, à défaut de quoi il retirerait son offre de dialogue avec Damas.

Réactions positives

L’offre de M. Khatib avait reçu l’aval des Etats-Unis et de la Ligue arabe, mais surtout des deux alliés de la Syrie, la Russie et l’Iran, avec qui le chef de l’opposition a eu de contacts inédits la semaine dernière. Mais l’initiative de Khatib a suscité des tensions au sein de son propre camp, le Conseil national syrien, principale composante de la Coalition, qui a rejeté en bloc cette proposition et réaffirmé son attachement à la révolution.

Mais certains opposants partagent le point de vue d’Al-Khatib. L’opposant historique au régime d’Assad, Fawaz Tello, pense qu’Al- Khatib a effectué une manoeuvre politique calculée pour mettre Assad dans l’embarras : « Le régime d’Assad ne peut pas appliquer le moindre point des différentes initiatives lancées dernièrement car cela entraînerait tout simplement sa chute ».

La proposition de Khatib était intervenue après plus de 22 mois de conflit, alors que la population syrienne est épuisée par les tueries, les destructions et la dégradation de la situation humanitaire. Zohbi a affirmé que le régime était prêt à dialoguer avec les groupes armés lorsque ceuxci rendront les armes. Damas considère les rebelles comme des terroristes financés et soutenus par l’étranger, notamment l’Arabie saoudite, le Qatar et la Turquie.

Risques de régionalisation du conflit

Pour inquiéter la communauté internationale, le ministre syrien a mis en garde contre toute ingérence de certains gouvernements arabes, sans les nommer, dans le conflit syrien, évoquant « des répercussions sur le Liban, la Jordanie et même la Turquie. Elles seront très graves car personne ne peut contrôler ses frontières et la sécurité régionale est indivisible. Si le chaos règne, personne n’y échappera », a prévenu Zohbi.

Une fois ces déclarations faites, le chef de la Coalition de l’opposition a regretté que le régime syrien n’ait pas répondu favorablement à son offre de dialogue, considérant cette prise de position comme un message négatif. « Le régime a manqué une occasion rare d’entamer un dialogue, adressant ainsi un message très négatif tant à l’intérieur qu’à l’extérieur », a déclaré Khatib, ajoutant qu’il laisserait le soin au comité politique provisoire de la Coalition de donner une suite à ce refus.

Le chef de l’opposition syrienne a demandé lundi 11 février au régime de Bachar Al-Assad d’envoyer le vice-président syrien, Farouk Al-Chareh, comme représentant du régime pour le dialogue afin de mettre un terme au conflit meurtrier dans le pays. Commentant le choix de vice-président, Khatib a expliqué : « Chareh, depuis le début de la crise, voit que les choses ne vont pas dans le bon sens. Le fait qu’il fait partie du régime ne veut pas dire que nous n’acceptons pas de lui parler. Si le régime accepte l’idée (du dialogue), je lui demande de déléguer Farouk Al-Chareh pour qu’on discute avec lui ». Mi-décembre, M. Chareh avait affiché ouvertement ses divergences avec Bachar Al-Assad en se prononçant pour une solution négociée alors que, selon lui, le président syrien opte pour l’option militaire afin d’écraser la rébellion armée.

Chareh en successeur potentiel

Evoqué tour à tour par la Ligue arabe et les Nations-Unies pour remplacer Al-Assad en cas de transition négociée, le responsable sunnite s’était dit favorable à une solution de compromis, aucune partie n’étant, selon lui, en mesure de l’emporter par les seules armes. Agé de 73 ans, Chareh a été pendant 22 ans le chef de la diplomatie syrienne. Selon des experts, il jouit d’un soutien total de l’Iran, allié de la Syrie. A cet égard, il s’est dit prêt à parler de nouveau avec l’opposition syrienne et a souhaité que l’Iran, principal fournisseur d’armes de la Syrie avec la Russie, « prenne part à la solution ».

Pour sa part, Sergueï Lavrov a qualifié l’initiative de Moaz Al-Khatib d’étape très importante. « En particulier parce que la Coalition (d’opposition) a été créée sur la base d’un rejet catégorique de toute discussion avec le régime », a affirmé dimanche 10 février le ministre russe des Affaires étrangères.

Avec la Chine, la Russie a opposé à trois reprises au Conseil de sécurité de l’Onu son veto à des résolutions d’inspiration américano-européenne et arabe ouvrant la voie à une mise à l’écart de Bachar Al-Assad. Moscou assure cependant ne pas chercher coûte que coûte à maintenir au pouvoir le président syrien.

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