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Sherif Al-Demerdash : Tout accord imposé par l’extérieur donnerait une légitimité aux extrémistes islamiques

Inès Eissa avec agences, Dimanche, 01 mai 2016

Dr Sherif Al-Demerdash, spécialiste en relations internationales, analyse la situation en Libye dont il donne une vision plutôt pessimiste.

Al-Ahram Hebdo : Le parlement libyen ne parvient toujours pas à approuver le nouveau gouvernement d’union nationale. Comment ce gouvernement peut-il fonctionner ?
Sherif Al-Demerdash : Le parlement libyen est le seul organe démocratiquement élu. Il représente donc la légitimité et la volonté du peuple libyen. La majorité des membres du parlement considèrent que ce gouvernement, ainsi que le conseil présidentiel sont l’aboutissement de l’entente entre les Etats-Unis et les pays occidentaux. Aux yeux de ces députés, l’approbation de ce nouveau gouvernement serait une forme de résignation à la volonté des forces occidentales qui ont détruit la Libye en 2011.

— Selon vous, quel est le rôle du général Khalifa Haftar dans le futur de la Libye ?
— Dans l’avenir de la Libye, Haftar sera indispensable. En fait, les forces du général devraient être le noyau d’une armée libyenne nationale et non politisée. A mon avis, le général Haftar sera le garant de la stabilité politique en Libye dans les années à venir.

— Pourquoi l’Egypte soutient-elle Haftar en dépit des réserves des pays occidentaux ?
— Comme je viens de le mentionner, le général Haftar joue un rôle primordial dans la stabilité de la Libye. Il est le garant d’une certaine unité nationale militaire face aux forces extrémistes qui dominent le centre et l’ouest du pays. Les groupuscules extrémistes liés à Al-Qaëda et à l’Etat islamique veulent se servir de la Libye pour perpétrer des attaques terroristes contre l’Egypte. Les chefs de ces organisations ont affiché cet objectif à maintes reprises, ceci n’est donc pas un secret. Aux yeux de l’Egypte, le général Haftar aurait une importance stratégique, vu son rôle vital dans la lutte contre les organisations terroristes. La neutralisation du général serait catastrophique pour la Libye et risque de mettre à mal les intérêts de l’Egypte en l’exposant à des menaces terroristes dangereuses.

— Certains disent qu’une intervention militaire étrangère en Libye serait la meilleure approche pour combattre l’Etat islamique et les groupes terroristes. Qu’en pensez-vous ?
— Je considère que l’intervention militaire suggérée par les pays occidentaux va à l’encontre des intérêts de la Libye puisqu’elle aura pour objectif principal d’imposer des solutions qui vont dans la même direction de l’intervention militaire qui a détruit la Libye il y a cinq ans. Quant à l’Egypte, je pense qu’elle doit être très méfiante par rapport à toute intervention militaire en Libye. Les résultats de toute intervention seraient sans doute catastrophiques pour la stabilité de la Libye et affecteraient la sécurité de l’Egypte.

— Y a-t-il de vraies chances de mettre un terme aux divisions en Libye ?
— Il y a sûrement des chances pour qu’un accord soit conclu consistant à établir une sorte de réconciliation entre Tobrouk et Tripoli. Entre les forces nationalistes du camp de Tobrouk et les mouvements islamistes de l’ouest du pays. Mais à mon sens, tout accord imposé par l’extérieur donnerait une légitimité aux extrémistes islamiques dans la vie politique du pays, ce qui aurait un impact dévastateur sur le pays.

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