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Nouvelle stratégie américaine en Iraq ?

Maha Salem avec agences, Lundi, 15 juin 2015

Alors que Daech avance d'un pas sûr en occupant des villes stratégiques d'Iraq, les Etats-Unis annoncent l'installation de nouvelles bases militaires afin d'accélérer la formation de l'armée iraqienne.

Un an après sa chute, Mossoul reste entre les mains des djihadistes de l’Etat Islamique (EI). Et d’autres régions aussi. Contrairement à toutes les estimations, les djihadistes et leur « califat » autoproclamé ont occupé plusieurs villes stratégiques au cours de cette année dont la plus récente est Ramadi, la capitale de la vaste province d’Al-Anbar, dont la prise a représenté une défaite cinglante pour Bagdad. Autrement dit, les forces iraqiennes, aidées par la force de la coalition créée en août 2014 par les Etats-Unis et leurs alliés, sont toujours incapables de venir à bout de l’EI ou même de réaliser une avancée considérable sur ces djihadistes.

Pour stopper l’avancée de ces derniers, le président Barack Obama a misé sur une stratégie reposant sur des bombardements aériens et un soutien en entraînement, conseil et matériel aux forces iraqiennes. A cet égard, le Pentagone envisage l’installation de nouvelles bases en Iraq pour rapprocher ses conseillers militaires des lignes de front avec le groupe Etat islamique. Selon le porte-parole du Pentagone, le colonel Steve Warren, la nouvelle base d’Al-Taqadoum (province d’Al-Anbar) annoncée comptera 450 militaires américains portant leur nombre total à 3 550, avec l’ambition essentielle d’accélérer la formation des troupes iraqiennes, en particulier des sunnites. Barack Obama, qui a pris cette décision à la demande du premier ministre iraqien Haïdar Al-Abadi, a également ordonné la livraison rapide de matériels et d’équipements essentiels aux forces iraqiennes, y compris aux combattants des tribus et aux peshmergas qui opèrent sous commandement iraqien. « Pour améliorer les capacités et l’efficacité des partenaires sur le terrain, le président a autorisé le déploiement de 450 éléments militaires supplémentaires pour entraîner, conseiller et assister les forces de sécurité iraqiennes à la base militaire de Taqadoum dans la province d’Al-Anbar », explique un communiqué de la Maison Blanche.

Cette base pourrait être la première d’une série de nouvelles bases américaines en Iraq. Une fois de plus, le président Obama a souligné que la guerre devait être gagnée par les forces locales, pas par les Américains. « La puissance aérienne américaine peut permettre de faire la différence, mais nous ne pouvons ni faire pour les Iraqiens ce qu’ils doivent faire par eux-mêmes, ni prendre la place de nos partenaires arabes pour sécuriser leur région », a-t-il ajouté. Des forces spéciales pourraient être envoyées près des combats pour conseiller les forces iraqiennes et guider les frappes aériennes. Parallèlement, les frappes aériennes pourraient être intensifiées. Mais, l’Administration américaine a affirmé que les forces iraqiennes doivent être bien équipées, unifiées et organisées pour détruire les djihadistes.

Reconquérir les territoires

Passant à l’acte, les forces iraqiennes tentent sur plusieurs fronts de faire reculer les djihadistes de l’EI et de reconquérir les vastes territoires tombés aux mains de l’EI, avec des résultats plus ou moins probants. Les peshmergas, les forces de la région autonome kurde, avancent au sud et à l’ouest de Kirkouk (nord), aidés par des bombardements des avions iraqiens et de la coalition internationale menée par les Etats-Unis. L’une des cibles visées est un atelier établi par l’EI pour fabriquer des bombes. Par ailleurs, les troupes fédérales iraqiennes et les unités de mobilisation populaire, qui regroupent des milices chiites et des volontaires, poursuivaient leur opération pour sécuriser les alentours de Baiji (à une centaine de km au sud-ouest de Kirkouk) et de la raffinerie voisine, la plus grande du pays. Le pouvoir tente de s’assurer le contrôle de cette zone pour isoler l’EI dans la vaste province d’Al-Anbar, plus à l’ouest, dont la reconquête est considérée comme une priorité par Bagdad. Le premier ministre Haïder Al-Abadi a en particulier promis la reprise rapide de Ramadi, dont la perte, le 17 mai dernier, a aussi soulevé des questions sur la stratégie de Washington.

« La guerre contre l’EI durera longtemps, car tout simplement, Washington ne veut pas anéantir Daech. Au contraire, il veut maintenir sa présence dans cette région pour épuiser tous les pays alentour. En même temps, il veut limiter son avancée. En fait, la stratégie de Washington est la suivante : faire en sorte que les djihadistes continuent à contrôler certaines régions, garder un certain équilibre entre les forces présentes et épuiser les Etats. En même temps, les combattants de l’EI n’ont pas de problèmes d’argent, d’armements ou de recrutement. Ils se sont montrés très compétents dans l’exploitation des rivalités entre chiites et sunnites », explique Dr Mohamed Gomaa, analyste au Centre des Etudes Politiques et Stratégiques (CEPS) d’Al-Ahram au Caire. En effet, les responsables américains reconnaissent ouvertement désormais que la guerre n’est pas prête d’être terminée, en tout cas pas avant la prochaine élection présidentielle américaine de 2016. Ce sera un défi simplement de « maintenir le cap » face à l’EI parce que le groupe va continuer à bénéficier des tensions internes en Iraq.

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