Le drapeau national ukrainien flottait à nouveau cette semaine sur la ville de Slaviansk, bastion séparatiste dans l’est du pays, en remplacement du drapeau russe installé par les séparatistes depuis avril dernier. Les forces de Kiev ont pu reprendre cette ville de 130000 habitants, des combattants et leur principal chef Igor Strelkov (NDLR: accusé par Kiev d’être un colonel du renseignement militaire russe). Avant de quitter Slaviansk, Igor Strelkov a lancé vendredi un appel à l’aide à Moscou, que Kiev accuse d’organiser en sous-main l’agitation séparatiste dans l’est de l’Ukraine. Il a déclaré que sans l’aide du président russe Vladimir Poutine, le concept même de Nouvelle Russie (Novorossiya) mis en avant par les séparatistes était en péril. « Slaviansk chutera avant le reste », a-t-il écrit sur le site Internet des séparatistes.
En fait, la reconquête de Slaviansk constitue la plus grande victoire militaire des forces gouvernementales depuis que des pro-Russes ont pris les armes, début avril, dans l’est de l’Ukraine. Un succès qui pourrait constituer selon le président ukrainien, Petro Porochenko, un tournant dans « l’opération antiterroriste » destinée à reprendre le contrôle des zones rebelles pro-russes de Donetsk et Lougansk, alors que la diplomatie piétine. « Ce n’est pas encore la victoire complète », a toutefois mis en garde le président ukranien dans un message affiché sur son site Internet. Et d’ajouter: « Mon ordre reste en vigueur : il faut renforcer l’encerclement des terroristes, poursuivre l’opération pour libérer les régions de Donetsk et Lougansk ».
Des responsables séparatistes ont cherché à présenter ce retrait comme un succès partiel, puisque les combattants ont réussi à éviter d’être encerclés et faits prisonniers. A Donetsk, le « premier ministre » de la « République de Donetsk », Alexandre Borodaï, a reconnu que ses troupes avaient quitté Slaviansk, « en raison de la supériorité numérique écrasante de l’adversaire », pour gagner « des positions préparées à l’avance », selon le site officiel des insurgés.
Journaliste au quotidien Oukraïnska Pravda, Iryna Slavinska estime, quant à elle, qu’il y a encore beaucoup de problèmes à résoudre, mais qu’un pas en avant très important au niveau psychologique venait d’être franchi. « Cette ville, c’était surtout le centre des terroristes anti-Ukrainiens, (...) là où ils retenaient les otages », a-t-elle déclaré. La journaliste s’interroge également sur l’efficacité des troupes ukrainiennes, liée selon elle à un meilleur renseignement militaire. Ceci étant, on ne peut parler, selon elle, de « victoire, car il reste beaucoup de villes et de villages à libérer [...], et il y a aussi le problème de la frontière entre l’Ukraine et la Russie, qui n’est pas fermée. Il y a des armes et des militaires qui passent ». Selon elle, cette libération, ainsi que celle de Kramatorsk, va « tout de même aider beaucoup l’esprit général de la population ukrainienne ».
Côté russe, aucun commentaire n’a été fait à Moscou sur la reprise de Sloviansk, malgré la demande d’aide des insurgés affirmant qu’ils ne pourraient plus tenir très longtemps. Cette soudaine accélération des événements pourrait remettre en cause la tenue de la réunion du « groupe de contact » attendue prochainement avec des représentants des séparatistes, et censée favoriser la conclusion d’un cessez-le-feu. Le principe de cette réunion a été entériné la semaine dernière lors d’une rencontre à Berlin des ministres des Affaires étrangères de l’Ukraine, de la Russie, de l’Allemagne et de la France. Le « groupe de contact » est composé de l’ancien président ukrainien, Léonid Koutchma, de l’ambassadeur de Russie en Ukraine et de représentants de l’Organisation pour la Sécurité et la Coopération en Europe (OSCE) .
Lien court: