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Sahel : La lutte antiterroriste au coeur des préoccupations

Abir Taleb, Lundi, 23 août 2021

La région des trois frontières au Sahel subit une nette recrudescence du terrorisme avec des attaques stratégiquement coordonnées. La situation inquiète d’autant plus que les événements en Afghanistan risquent d’avoir un écho au Sahel.

Sahel : La lutte antiterroriste au coeur des préoccupations
La zone dite des trois frontières concentre l’essentiel des attaques terroristes.

A cheval sur le Mali, le Niger et le Burkina Faso, la région des trois frontières voit le terrorisme croître, avec le centre du Mali comme région la plus touchée par les violences. Les morts, civils comme militaires, s’y comptent par milliers.

Une récente attaque contre un village de cette zone au Niger a fait 37 morts la semaine dernière, dont 13 enfants, alors qu’au Burkina Faso, une attaque terroriste a tué 80 personnes, dont 60 civils, mercredi 18 août. Et la série de se poursuivre : au Mali, un convoi de l’armée a été la cible d’une attaque attribuée à des groupes djihadistes jeudi 19 août. Au moins 15 soldats sont morts et 9 ont été grièvement blessés, selon un communiqué des forces armées maliennes. En tout, plus de 100 morts ont été enregistrés dans ces pays en quelques jours. Et, selon le Centre des études stratégiques de l’Afrique, basé à Washington, près de 2 000 personnes, en majorité des civils, ont été tuées dans cette zone depuis janvier dernier. Une étude effectuée par ce centre explique aussi la violence au Burkina Faso qui a poussé « plus de 100 000 réfugiés » à fuir leur foyer, notant qu’environ « 1,2 million de personnes ont besoin d’une aide humanitaire » et précisant qu’on estime que « 2 000 écoles sont actuellement fermées au Mali, au Niger, au Burkina Faso, privant 400 000 enfants d’éducation ».

Face à la recrudescence des attaques, l’Onu tire la sonnette d’alarme. La semaine dernière, le Conseil de sécurité s’est déclaré préoccupé par « la détérioration des conditions de sécurité dans certains pays de la région de l’Afrique de l’Ouest et du Sahel par la montée du terrorisme au Sahel et dans le bassin du Tchad, ainsi que dans l’ensemble de la région ». Selon un responsable des Nations-Unies, la mort de l’ex-président tchadien, Idriss Deby Itno, a donné un espoir aux djihadistes opérant au Sahel avec des attaques similaires et coordonnées ayant le même mode opératoire dans un intervalle de 24 à 72 heures, comme ce qui s’est passé la semaine dernière.

Le G5 toujours pas suffisamment efficace

A l’inquiétude s’ajoutent surtout les interrogations sur l’efficacité des stratégies de lutte antiterroriste dans la région, remises en question, d’autant plus que ce regain d’instabilité intervient alors que la France, très impliquée dans la lutte antiterroriste dans la région, a annoncé il y a quelques mois la réduction progressive de ses effectifs militaires au Sahel au profit d’un dispositif allégé de 2 500 à 3 000 hommes, contre les quelque 5 000 qui composaient la force Barkhane amenée à disparaître.

Théoriquement, c’est le G5 Sahel qui doit prendre la relève. Mais pour l’heure, il n’est pas suffisamment efficace. De même, il semble que cette force fasse face à des problèmes : créant la surprise, le Tchad a annoncé samedi 21 août qu’il allait diviser par deux ses effectifs mobilisés en février dernier dans le cadre de la force du G5 Sahel dans la zone des trois frontières. « On a redéployé au Tchad 600 hommes en accord avec les forces du G5 Sahel. Il s’agit d’un redéploiement stratégique pour s’adapter au mieux à l’organisation des terroristes », a affirmé le porte-parole du gouvernement, Abderaman Koulamallah. En réaction, le ministère français des Armées a confirmé que la décision tchadienne « a été prise en parfaite concertation avec les partenaires du G5 Sahel, ainsi que la coalition pour le Sahel dont la France ». « Il s’agit d’avoir un dispositif à la fois plus léger, plus réactif et plus facile à soutenir, en conservant les moyens de combat les plus adaptés à l’ennemi », a-t-il précisé. Une source malienne au ministère de la Défense, sous couvert d’anonymat, a, pour sa part, assuré à l’AFP que N’Djamena avait « officiellement informé avant » le Mali de « ce réajustement » et que « le processus de retour » des soldats au Tchad était « bien coordonné ».

Les différentes parties tentent donc de rassurer en premier lieu les Tchadiens eux-mêmes. « Par rapport à la situation sur le terrain, il faut avoir une force mobile, d’où le retrait de certaines de nos forces avec les armes lourdes », a dit le porte-parole du gouvernement tchadien. « Notre volonté politique de faire face aux djihadistes reste intacte », a-t-il ajouté.

Si la volonté de lutter contre le terrorisme est sincère chez toutes les parties, jusqu’à présent, les stratégies en place ne semblent pas porter les fruits attendus. La plupart des groupes armés qui sévissent au Sahel sont affiliés à Al-Qaëda ou à Daech et restent actifs. Or, la question inquiète d’autant plus avec le retour des Talibans au pouvoir en Afghanistan. Pour les analystes, malgré les différences, l’arrivée au pouvoir des Talibans en Afghanistan fait craindre dans les Etats du Sahel. Les événements en Afghanistan résonneront-ils jusqu’aux confins du Sahel ? Affaire à suivre.

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