Ce n’est que quelques heures suite à un avertissement lancé par les présidents de France, d’Allemagne et d’Ukraine, à la Russie, que cette dernière a rapidement répondu. Samedi 17 avril, deux navires de guerre russes sont passés par le Bosphore en direction de la mer Noire, où 15 vaisseaux plus modestes sont arrivés. Des déploiements supplémentaires visant le renforcement de la présence navale russe dans la région sur fond de tensions avec l’Occident et l’Ukraine. Ces mouvements interviennent au lendemain de la rencontre du président français, Emmanuel Macron, de la chancelière allemande, Angela Merkel, et du président ukrainien, Volodymyr Zelensky, afin d’appeler cette dernière à retirer ses troupes supplémentaires qu’elle a accumulées ces dernières semaines à sa frontière avec l’Ukraine et en Crimée. Les trois dirigeants, qui se trouvaient à l’Elysée vendredi 16 avril, ont exprimé une préoccupation commune face à cette activité militaire russe.
En fait, ces quatre dernières semaines, la Russie a déployé le long de la frontière avec l’Ukraine des équipements militaires, elle a aussi annoncé la fermeture à la navigation, pour six mois, de plusieurs zones maritimes au large de la Crimée, une péninsule ukrainienne annexée par la Russie. Les analystes qualifient ces déploiements de « plus gros contingent militaire depuis le début de la guerre entre Kiev et les séparatistes soutenus par la Russie, il y a sept ans », remarque le New York Times dans un article publié vendredi dernier.
Militairement, face à la Russie, les 30 alliés de l’Otan ont renforcé leur présence dans la région de la mer Noire, y compris en Turquie. Le secrétaire général de l’Otan, Jens Stoltenberg, a détaillé les mesures déjà prises par les alliés face à « l’agressivité » de la Russie. L’organisation a renforcé son partenariat avec l’Ukraine pour la modernisation de ses forces armées, de sa marine de guerre et la formation des troupes. Kiev, comme l’a de nouveau rappelé dans un tweet le président Zelensky, souhaite aller plus loin dans son ancrage atlantiste. Il propose d’accélérer ses négociations pour une adhésion pleine et entière à l’Otan. Ce qui, selon lui, dissuaderait les Russes. « Les Russes menacent ouvertement l’Ukraine d’une guerre et de détruire l’Etat ukrainien », a carrément dit le ministre ukrainien des Affaires étrangères, Dmytro Kuleba.
Mais que signifie ce déploiement massif russe, réalisé au grand jour ? Selon les analystes, Moscou n’entend certainement pas envahir l’Ukraine. En effet, contrairement aux événements de 2014 qui avaient conduit à l’annexion par Moscou de la Crimée, qui s’était faite très discrètement, Moscou fait cette fois-ci ouvertement une vraie démonstration de force. Selon le quotidien new-yorkais, le but serait de lancer un avertissement et de signifier à l’Occident « qu’il doit compter avec la Russie ». Le déploiement spectaculaire des troupes russes aux portes de l’Ukraine serait ainsi un nouvel outil pour négocier avec Washington, alors que les relations russo-américaines sont au plus bas (voir principal). Le journal The Independent, dans son édition de samedi dernier, va plus loin en estimant que le plan de la Russie est d’obtenir des concessions tacites des Américains sur le rôle de la Russie dans ses régions frontalières. C’est l’objectif le plus probable de ses récentes démarches.
Kiev n’est donc pas la cible directe. Mais le jeu de Moscou est risqué. Si l’escalade russe continue de s’intensifier, cela constituera une nouvelle phase du conflit qui aura de graves répercussions sur la sécurité internationale.
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