Les Nations-Unies n’ont jamais réussi à organiser le référendum d’autodétermination
qu’elles appellent pourtant de leurs voeux.
Washington n’a pas attendu longtemps. Deux jours après la proclamation faite par le président américain sortant, Donald Trump, reconnaissant la souveraineté du Maroc sur le Sahara occidental — proclamation faite parallèlement à l’annonce d’une normalisation entre le Maroc et Israël —, les Etats-Unis ont adopté samedi 12 décembre une « nouvelle carte officielle » du Maroc intégrant le territoire disputé du Sahara occidental, au cours d’une cérémonie organisée à l’ambassade américaine à Rabat. Cette carte, qui intègre l’ensemble du territoire désertique que se disputent depuis des décennies le Maroc et les indépendantistes du Front Polisario soutenus par l’Algérie, « sera présentée au roi Mohammed VI » qui, « dans sa sagesse et sa prévoyance a reconnu Israël », a déclaré l’ambassadeur américain à Rabat, David Fischer.
Voilà donc l’un des effets immédiats de la proclamation de Donald Trump, qui a souligné : « La proposition sérieuse, crédible et réaliste d’autonomie du Maroc est la seule base pour une solution juste visant à une paix durable et à la prospérité ». Il sera suivi d’un autre pas non moins significatif: l’ouverture d’un consulat à Dakhla. Un acte majeur qui va imprimer sa marque sur les termes de référence de la question du Sahara. Comme prévu, la décision américaine a été aussitôt rejetée par le Front Polisario qui plaide pour l’organisation d’un référendum prévu par les Nations-Unies pour régler le statut de ce « territoire non autonome » hérité du passé colonial du continent africain. Il estime que la décision américaine était « nulle et non avenue » en se disant prêt à poursuivre le combat « jusqu’au retrait des troupes marocaines d’occupation ». Déjà, le Polisario se dit « en état de guerre de légitime défense » depuis que le Maroc a déployé le 13 novembre dernier des troupes dans une zone tampon surveillée par les forces de l’Onu à l’extrême sud du territoire, pour chasser un groupe de militants indépendantistes sahraouis qui bloquait la seule route vers la Mauritanie. Comme prévu également, Alger, principal soutien du Front Polisario, a dénoncé, samedi 12 décembre, des « manoeuvres étrangères » visant à la déstabiliser. « Le conflit du Sahara occidental est une question de décolonisation qui ne peut être résolue qu’à travers l’application du droit international », a réaffirmé, dans un communiqué, le ministère algérien des Affaires étrangères, soulignant que la décision américaine était « sans effet juridique ». Moscou a aussi estimé, vendredi 11 décembre, que c’était là « une décision unilatérale qui sort complètement du cadre du droit international ».
Quant à l’Onu, elle a déclaré que sa position sur le Sahara occidental restait « inchangée ». L’organisation plaide depuis des années, sans grand résultat, pour une solution politique, et les négociations sous son égide sont au point mort. Le secrétaire général de l’organisation, Antonio Guterres, s’est empressé, jeudi 10 décembre, quelques heures seulement après le « tweet » de Donald Trump, de réagir en précisant qu’« il n’y avait rien de changé et que l’organisation mondiale allait inscrire son action dans la continuité ».
Un conflit vieux de 45 ans
La question est donc désormais de savoir quel sera l’avenir du contentieux autour du Sahara occidental. Colonie espagnole jusqu’en 1976, le Sahara occidental est un territoire désertique situé à la lisière entre le Maroc, l’Algérie et la Mauritanie. Riche en gisements de phosphate et bordant un littoral de 1100 kilomètres d’eaux poissonneuses, cette bande de terre est contrôlée à 80% par le Maroc et à 20% par le Front Polisario, groupe armé issu de la population nomade sahraouie d’un demi-million d’habitants qui peuple la zone. Soutenu militairement par l’Algérie voisine, le Polisario milite pour le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes. L’organisation a proclamé en 1976 la « République arabe sahraouie démocratique » et souhaite l’organisation d’un référendum d’autodétermination dans le but d’établir l’indépendance du territoire. Au contraire, Rabat considère la région comme faisant partie de ses frontières « historiques » et réclame un statut d’« autonomie sous contrôle ».
Vieux de 45 ans, le conflit armé a abouti à un cessez-le-feu en 1991 sous l’égide de l’Onu, qui a déployé des Casques bleus sur une zone tampon: la Mission des Nations-Unies pour l’organisation d’un référendum au Sahara Occidental (Minurso). Mais les négociations organisées depuis entre belligérants piétinent, chaque camp refusant la moindre concession. Les Nations-Unies, qui considèrent officiellement le Sahara occidental comme un « territoire non autonome », n’ont jamais réussi à organiser le référendum qu’elles appellent de leurs voeux. Or, pendant ce temps, le Maroc est engagé dans une vaste offensive diplomatique visant à asseoir sa présence sur le terrain. Depuis un an, une quinzaine de pays africains ont ouvert des représentations diplomatiques au Sahara occidental, entérinant officiellement le contrôle marocain sur le territoire.
Affaibli, le Front Polisario a décidé de rompre le statu quo, qui lui est défavorable, en bloquant, le 20 octobre dernier, un groupe de routiers marocains au point de passage de Guerguerat, une zone tampon située à la frontière de la Mauritanie. En représailles, l’armée marocaine a lancé le 11 novembre une opération militaire visant à libérer l’axe, entraînant l’annonce officielle, deux jours plus tard, de la rupture du cessez-le-feu par le Front Polisario. La situation reste tendue depuis. Une tension qui ne risque pas de baisser .
Rabat rassure les Palestiniens
Parallèlement à la reconnaissance du Sahara occidental comme étant un territoire marocain, Trump a annoncé que Rabat et Tel-Aviv normalisent leurs liens diplomatiques. « C’est une percée énorme pour la paix au Moyen-Orient », s’est-il réjoui, alors que le premier ministre israélien, Benyamin Netanyahu, a salué « un accord historique », précisant que la reprise des liens entre les deux pays devrait tout d’abord inclure la remise en place de bureaux de liaison, prélude à l’établissement de relations diplomatiques directes et de vols entre les capitales. Côté marocain, dans un communiqué du palais royal, le roi du Maroc a assuré que la reconnaissance d’Israël n’affectait d’aucune manière l’engagement du Royaume à la résolution du conflit israélo-palestinien. Mohammed VI a rappelé son soutien à la solution à deux Etats, israélien et palestinien, pourtant rendue caduque par la poursuite effrénée de la colonisation en Cisjordanie, illégale en vertu du droit international
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