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Iran : Nouvelle crise à l’horizon

Abir Taleb avec agences, Mardi, 18 août 2020

Incapable d’obtenir le prolongement illimité de l’embargo sur les armes de l’Iran, Donald Trump promet une riposte qui embarrasse les autres signataires de l’accord sur le nucléaire iranien de 2015.

Une nouvelle crise se profile au sujet de l’Iran. Le président américain, Donald Trump, s’est dit prêt, samedi 15 août, à recourir à un moyen de riposte controversé pour réimposer de façon uni­latérale des sanctions de l’Onu sur Téhéran, après le rejet par le Conseil de sécurité d’une résolution américaine visant à prolonger l’embargo sur les armes en Iran. Seuls deux des quinze membres du conseil ont voté vendredi 14 août pour la résolu­tion, mettant en exergue les divisions entre Washington et ses alliés européens depuis que le président Donald Trump a retiré unilatéralement les Etats-Unis de l’accord international sur le nucléaire iranien en mai 2018. En réaction au camouflet subi par Washington, le secrétaire d’Etat américain, Mike Pompeo, a dénoncé une « grave erreur » : « Je regrette que le monde entier ne se soit pas associé à la lutte contre le plus grand Etat sponsor du terrorisme pour s’as­surer qu’il ne puisse pas avoir de systèmes d’ar­mement présentant un risque, un risque pour le coeur de l’Europe ».

Quant à Téhéran, il n’a pas caché sa jubilation : Téhéran en a profité pour railler Washington pour son incapacité à obtenir plus qu’une seule voix de soutien, celle de la République dominicaine. Les alliés européens de Washington s’étant tous abste­nus, même si plusieurs pays sont, pourtant, a priori favorables à une prolongation de l’embargo, à l’instar des Européens, qui ont refusé de jouer le jeu américain. Pour le président iranien, Hassan Rohani, les Etats-Unis n’ont pas réussi à mettre fin à ce qu’il a appelé l’accord « à moitié vivant » de 2015. Selon lui, « ce jour restera dans l’his­toire de notre pays et dans l’histoire de la lutte contre l’arrogance mondiale ».

Mais au-delà de cela, l’affaire peut donner lieu à une véritable crise. Après le camouflet subi par Washington, le locataire de la Maison Blanche a promis une riposte rapide qui consis­terait à activer dès la semaine prochaine le « snapback », un mécanisme qui est une sorte de droit de veto à l’envers. Concrètement, ce mécanisme permet aux Etats-Unis de se préva­loir de leur participation initiale à l’accord sur le nucléaire iranien passé entre Téhéran et les grandes puissances en 2015 pour obtenir une réimposition automatique de toutes les sanc­tions préexistantes. Bien que Donald Trump ait décidé de quitter cet accord en 2018, cette démarche reste possible.

L’objectif de la manoeuvre américaine est clair : détruire ce qui reste de l’accord avant l’élection présidentielle de novembre. Au risque même de provoquer une réaction iranienne suffisamment forte qui peut conduire à une confrontation irrémédiable. En effet, une telle manoeuvre risquerait de pousser l’Iran à claquer définitivement la porte de l’accord nucléaire, dont il a déjà commencé à se désengager. Surtout, la diplomatie unilatérale des Etats-Unis sur ce dossier risque de plonger l’Onu dans l’une des pires crises de son histoire. Une diplomatie unilatérale et une intransigeance que Washington n’est pourtant pas près de laisser tomber. Suite au vote de vendredi, le président russe, Vladimir Poutine, a appelé à un sommet en ligne des dirigeants des cinq membres permanents du Conseil de sécurité de l’Onu plus l’Allemagne avec l’Iran (c’est dans cette configuration dite 5+1 qu’avait été négocié et conclu avec l’Iran l’accord sur le nucléaire iranien de 2015). « Probablement pas, je pense que nous allons attendre jusqu’à après l’élection », a répondu Trump, interrogé sur son éventuelle participation à ce sommet.

Washington est bel et bien déterminé à ne rendre aucun retour en arrière possible dans la politique de « pression maximale » contre Téhéran, l’héritage majeur de la présidence Trump en matière de politique étrangère.

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