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Ahmed Nehad Abdel-Latif : Le manque de financement est le plus grand défi face aux efforts de reconstruction post-conflit

Racha Darwich , Samedi, 10 juin 2023

L’ambassadeur Ahmed Nehad Abdel-Latif, directeur du Centre international du Caire pour la résolution des conflits, le maintien et la consolidation de la paix (CCCPA), revient sur les défis de la reconstruction et le développement post-conflit en Afrique.

Ahmed Nehad Abdel-Latif

Al-Ahram Hebdo : Pourquoi est-il urgent de réviser la politique de reconstruction et de développement post-conflit de l’Union africaine (RDPC), qui date de 2006 ?

Ahmed Nehad Abdel-Latif : Les conditions ont beaucoup changé, les défis de la paix et de la sécurité aussi. Le monde fait face à une conjonction de crises qui ont lieu en même temps : les conflits armés, la résurgence du terrorisme, le changement climatique, les crises humanitaires. Il s’agit d’une situation assez exceptionnelle qui demande la révision de cette politique pour prendre en compte ces nouveaux risques et ces nouvelles menaces à la paix qui ont lieu de manière simultanée. Il ne s’agit pas de la première révision. C’est un processus de révision qui a lieu depuis un certain nombre d’années et bien sûr l’Egypte, vu que le président Sissi est le Champion de la reconstruction post-conflit en Afrique, accorde une grande importance à soutenir les efforts de l’Union Africaine (UA) dans ce domaine et à faire en sorte que cette politique soit vraiment performante, moderne et qu’elle soit adaptée aux circonstances du monde aujourd’hui. L’atelier auquel nous avons participé a débouché sur une révision de cette politique. Une fois qu’elle sera révisée et adoptée par l’UA, elle devra être mise en oeuvre. C’est cette mise en oeuvre qui est importante. Elle va faire appel à beaucoup d’acteurs qui sont présents dans l’atelier : la Banque africaine de développement, le PNUD, d’autres organismes internationaux, le secteur privé, la société civile. Cette politique va amener beaucoup d’acteurs à travailler ensemble pour la paix et la stabilité en Afrique.

— Quels sont les principaux défis à l’application d’une telle politique ?

— Les défis sont nombreux. Le manque de financement avec la conjoncture internationale actuelle représente le plus grand défi. Sans oublier le manque de capacités et de cadres nationaux capables de la mettre en oeuvre. D’où l’importance de l’assistance technique et du renforcement des capacités nationales. Une chose que le CCCPA prend comme priorité. En plus, les circonstances des conflits entravent souvent la mise en oeuvre des efforts de reconstruction et les rendent difficiles, surtout lorsque les conflits sont toujours en cours.

— Quels sont les efforts déployés par le CCCPA dans ce contexte ?

— La construction de la paix et la reconstruction post-conflit font partie intégrante de son mandat. Donc, il travaille beaucoup sur cette question. Par le passé, il a présenté des propositions pour la révision de cette stratégie. En plus, il forme beaucoup de cadres nationaux de pays africains dans le domaine de la reconstruction post-conflit et de la construction de la paix en ligne avec le leadership de l’Egypte dans ce domaine et le leadership du président Sissi de ce dossier au sein de l’UA.

— Pouvez-vous nous donner plus de détails sur la mission, les projets et les réalisations du CCCPA ?

— Le CCCPA a été fondé par le ministère égyptien des Affaires étrangères en 1994 en tant que Centre régional du Caire pour la formation au maintien de la paix en Afrique. Son mandat change en 2017 et son cadre d’action s’élargit. Il prend le nom de « Centre international du Caire pour la résolution des conflits, le maintien et la consolidation de la paix ». C’est un centre d’excellence accrédité par l’UA dans le domaine de la formation et du renforcement des capacités. Il assume également le rôle du secrétariat de l’Association internationale des centres de formation au maintien de la paix depuis 2017 (jusqu’à 2027), ainsi que le secrétariat exécutif du Forum d’Assouan pour la paix et le développement durables, que l’Egypte a lancé lors de sa présidence de l’UA en 2019. Le CCCPA a aussi été récemment choisi pour présider le Réseau des centres de réflexion de l’UA pour la paix (NETT4PEACE), officiellement lancé par l’UA à Addis-Abeba le 8 février. Il est également le secrétariat de l’initiative de la présidence égyptienne de la COP27 Réponses Climatiques pour Pérenniser la Paix (CRSP). Au cours des 8 dernières années, le centre a organisé plus de 235 stages de formation, qui ont bénéficié à plus de 23 000 cadres de 96 pays, dont 50 africains. Les principaux programmes de formation du centre portent sur le maintien de la paix, la prévention des conflits et la consolidation de la paix, le désarmement, la démobilisation et la réintégration, la prévention de l’extrémisme menant au terrorisme, les menaces transnationales, les questions femmes, paix et sécurité, le changement climatique, la paix et le développement.

— Dans quelle mesure la politique de l’UA pour la reconstruction et le développement post-conflit est-elle présente aux délibérations des différentes éditions du Forum d’Assouan ?

— L’Egypte, en tant que champion du thème de la reconstruction et du développement post-conflit en Afrique, a lancé en 2019 le Forum d’Assouan pour la paix et le développement durables. Ce forum africain permet d’examiner les différents menaces et défis auxquels le continent est confronté, et propose des approches innovantes pour renforcer les liens entre paix, sécurité et développement durable, en accord avec « L’Agenda 2063 : L’Afrique que nous voulons » et le principe d’appropriation nationale. La politique de reconstruction et de développement post-conflit de l’UA a été très présente dans les discussions des 3 éditions consécutives du forum. C’est lors de sa 1re édition qu’a été signé l’accord de siège du Centre de l’UA pour la reconstruction et le développement post-conflit (AUCPCRD), hébergé au Caire. Le Centre du Caire sera un partenaire important de ce nouveau Centre de l’UA dans le but d’opérationnaliser la politique de reconstruction et de développement post-conflit. L’atelier, qui a eu lieu cette semaine au Caire sur la révision de cette politique, sert aussi de réunion préparatoire à la 4e édition du Forum d’Assouan qui se tiendra fin de cette année/début de l’année prochaine.

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