Dimanche soir, le parti d’
Al-Wafd accueillait une nouvelle réunion de quelques partis politiques, dans une énième tentative de parvenir à une entente sur les listes électorales qui doivent entrer en concurrence, lors des prochaines élections législatives. La semaine dernière déjà, et au lendemain des déclarations du chef de l’Etat lors de sa rencontre avec les dirigeants des partis, les encourageant à former une liste unique, le
Wafd invitait ses rivaux à la table. 24 des 86 partis que comptent l’Egypte y étaient invités, et 19 ont répondu présent, mais le résultat n’a pas été très concluant. Les partis ne peuvent concrètement pas tous se réunir sous une seule ombrelle. N’est-ce pas, en effet, la logique de la concurrence électorale ?
Les partis politiques apparaissent, une fois de plus, piégés dans le plan monté par l’exécutif qui cherche un Parlement acquis à sa cause, d’autant plus que ses prérogatives égalent presque celles du président de la République. D’après la Constitution de 2014, le Parlement doit approuver le choix du chef du gouvernement effectué par le président de la République et peut réclamer un référendum à la majorité des deux tiers pour obtenir la destitution du président.

Lors d'une série de rencontres mi-janvier, le président Abdel-Fattah Al-Sissi a encouragé les chefs de partis à former des coalitions en prévisions des élections.
(Photo : AP)
Du coup, sur les 567 sièges à pourvoir, les partis politiques sont restreints aux 120 sièges qui seront élus à un scrutin de liste majoritaire. En effet, selon ce système, une seule liste, celle qui obtiendra le plus grand nombre de voix, raflera tous les sièges, les autres listes sortiront bredouilles du scrutin. 420 sièges seront élus au scrutin individuel et 27 seront nommés par le président.
Officiellement, la Commission électorale a annoncé que le scrutin s’étalerait du 21 mars au 7 mai, mais la date de dépôt des candidatures a, sans cesse, été ajournée, et avec elle tout accord électoral entre les partis. A ce jour, sept coalitions se sont formées, dont 3 plutôt larges. La première est celle du « Wafd égyptien », qui rassemble, entre autres, le Wafd et le Social démocrate. La deuxième est « Le Front égyptien », qui accueille surtout des anciens du régime de Hosni Moubarak, avec en tête le parti de son dernier premier ministre et candidat malheureux à la présidentielle de 2012, Ahmad Chafiq, des anciens députés du PND arrivés sous l’étiquette de 3 autres partis, ainsi que le mouvement « L’Egypte mon pays », formé notamment d’anciens hauts responsables. Cette plateforme apparaît comme la plus riche par le nombre d’hommes d’affaires et des membres de grandes familles provinciales qu’elle accueille.
La troisième coalition est « Le Réveil de l’Egypte », formée par un ancien opposant, Abdel-Guélil Moustapha avec d’autres indépendants ainsi que des partis, plutôt « révolutionnaires », dont la Coalition socialiste (Al-Tahalof Al-Chaabi), la Constitution (Al-Dostour), le Mouvement populaire (Al-Tayar Al-Chaabi) de Hamdine Sabahi, rival en 2012 du président Al-Sissi lors de la présidentielle.
Les dissidents du parti du Front égyptien, les partis Al-Tagammoe (rassemblement, gauche), la Congrès et Al-Ghad ont formé ensemble la coalition « Amal ». Face à eux, deux importants partis, le salafiste Al-Nour et Al-Masriyine Al-Ahrar ont décidé de faire la course indépendamment des coalitions, tandis qu’un ancien premier ministre et conseiller du président de la République, Kamal Al-Ganzouri, prépare en catimini une liste « patriotique » qui se veut celle de l’Etat. Celle-ci rassemble apparemment d'anciens ministres, hauts fonctionnaires et militaires. Des noms circulent déjà, comme celui de l’ancien chef des Renseignements Mourad Mouafi, l’ancien ministre de l’Education, Ahmad Zaki Badr, l’ancien ministre de l’Intérieur, Ahmad Gamaleddin, et l’ancien ministre de l’Information, Ossama Heikal.
« Nous soutenons la liste de Ganzouri », explique Yéhia Qadri, vice-président du parti du mouvement patriotique (de Chafiq). Selon lui, Ganzouri l’aurait contacté il y a 4 mois pour demander 25 noms de potentiels candidats de sa coalition. « Et depuis, rien. Pas de négociations, ni aucun contact », ajoute-t-il. Pourtant, le Front égyptien « attendra l’annonce de la liste de Gazouri et si elle est bloquée, nous annoncerons notre propre liste électorale », alors que pour les candidatures uninominales, le Front entend faire concurrence sur l’ensemble des 420 sièges à pourvoir.
La coalition d’Al-Wafd attend le début des dépôts des candidatures, pour annoncer les noms de ses candidats, « car chaque parti de la coalition veut pousser ses membres », précise Hossam Al-Khouly porte-parole d’Al-Wafd. « Les portes de l’alliance sont encore ouvertes », ajoute-t-il. Le Social démocrate, ce parti né de la révolution du 25 janvier 2011 a ainsi décidé de faire alliance avec le Wafd, uniquement pour les sièges individuels, alors que pour les listes majoritaires, il fera campagne avec « Le Réveil de l’Egypte ». Les tentatives de rassembler ces deux plateformes ont été « bloquées », d’après Mohamad Aboul-Ghar, président du parti. Il croit aussi que les tentatives de rétrécir les listes électorales dans une liste unique « seront vouées à l’échec, car simplement, vous ne pouvez pas unir des partis si différents et avec autant de différends ». Al-Wafd, par exemple, préfère avancer le nom de Amr Moussa, comme futur président du parlement, alors que le Front, dit de Ganzouri, cherche à nommer ce dernier. « Les alliances existantes ont surgi à cause de la faiblesse des partis politiques et la loi électorale déformée a poussé les partis politiques à rechercher des alliances », croit le chercheur au Centre des Etudes Politiques et Stratégiques (CEPS) d’Al-Ahram, Amr Hachem Rabie. « Par conséquent, ils sont poussés vers des coalitions, alors que sur le fond, ils devraient se concurrencer ». La formation des alliances électorales sont ainsi vouées à se poursuivre jusqu’à la dernière minute avant la fermeture des portes aux candidatures.
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