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L’avenir à l’hydrogène vert

Racha Darwich, Lundi, 21 juin 2021

Véritable atout pour le développement, l’hydrogène vert est un des leviers de la transition vers la neutralité carbone. L’Egypte l’a d’ores et déjà introduit dans sa stratégie énergétique.

L’avenir à l’hydrogène vert
La demande sur l’hydrogène vert devra atteindre près de 530 millions de tonnes en 2050.

Aujourd’hui, 5 ans après le lancement de sa stratégie de l’énergie de 2035, l’Egypte entame une nouvelle ère en franchissant ses premiers pas sur le marché de la production de l’hydrogène vert aspirant à en devenir un centre d’exportation vers le monde entier. « Nous avons amendé la stratégie de l’énergie de l’Egypte 2035 pour englober l’hydrogène vert », a déclaré le ministre de l’Electricité et des Energies renouvelables. Mais qu’est-ce que l’hydrogène vert ? Il s’agit d’un vecteur énergétique produit par électrolyse de l’eau à partir d’électricité renouvelable. Il est conforme aux objectifs de la protection de l’environnement et de la lutte contre le réchauffement climatique vu que ni son processus de production ni son utilisation ne dégagent du carbone.

L’Egypte oeuvre à devenir un hub énergétique et une plaque tournante de la distribution de l’énergie dans la région. Pour atteindre cet objectif en 2035 et devenir un point central sur la carte mondiale de l’énergie reliant l’Europe, l’Asie et l’Afrique, elle a élaboré une stratégie de développement durable basée sur l’expansion de la production des énergies propres et renouvelables. Dans ce contexte, l’Etat a déjà exécuté de nombreux projets d’énergie solaire et éolienne qui vont lui permettre d’élever la part d’énergie renouvelable à 20 % fin 2022 et 42 % en 2035.

Dans ce contexte, le ministre de l’Electricité et des Energies renouvelables, Mohamad Chaker, et le ministre du Pétrole et des Ressources minérales, Tarek El-Molla, ont assisté, la semaine dernière, à la remise du rapport final de l’étude de faisabilité de l’installation d’un projet de production de l’hydrogène vert en Egypte et son exportation en Europe. Le rapport présenté par la coalition belge DEME — Fluxys — Port of Antwerp et le bureau de consultation Roland Berger s’inscrit dans le cadre de l’accord de coopération signé, le 4 mars dernier, entre la Holding de l’électricité d’Egypte, la Holding des gaz naturels Egas, la Compagnie Abouqir pour la gestion et la construction des ports, d’une part, et la coalition belge, d’autre part, afin de développer un projet intégral pour la production et le commerce de l’hydrogène vert. Dans ce même contexte, un accord d’intention avait été signé avec l’allemande Siemens en janvier dernier pour entamer les études nécessaires à la mise en place d’un projet expérimental de production de l’hydrogène vert en Egypte.

Avantages multiples

L’avenir à l’hydrogène vert

Le système mondial de l’énergie, surtout celui de l’énergie propre et renouvelable, se trouve au seuil d’une nouvelle ère avec l’apparition de l’hydrogène vert sur le marché mondial de l’énergie et l’évolution graduelle de sa production mondiale qui a atteint 60 gigawatts en 2020, soit l’équivalent de 187,5 millions de cellules solaires et 25 000 turbines éoliennes. Dans son numéro de décembre dernier, la revue Forbes a écrit que le monde s’oriente vers l’élargissement de l’utilisation de l’hydrogène vert et que 7 des plus grands développeurs de production de l’hydrogène vert se sont réunis pour lancer l’initiative Green Hydrogen Catapult, dans une tentative de multiplier par 50 sa production dans les 6 prochaines années. Cette initiative vise aussi à réduire son coût de production à moins de 2 dollars/kg. Ce qui contribuera largement à la réduction des émissions de carbone des industries qui consomment de larges quantités d’énergie, car le kilo d’hydrogène vert contient le triple de l’énergie résultant de la combustion d’un kilo de combustible fossile. Un autre rapport de Bloomberg révèle que l’hydrogène vert pourra être utilisé dans les industries lourdes, les avions et les navires qui, à cause de leur besoin de grandes capacités énergétiques, ne pouvaient pas utiliser les énergies renouvelables solaires ou éoliennes.

Un autre avantage. L’hydrogène vert peut être utilisé sous la forme liquide ou gazeuse. Il peut être transformé en carburant ou en électricité, et il peut être emmagasiné pendant une longue période et projeté dans les réseaux de gaz naturel pour alimenter les domiciles en énergie. Ce qui signifie que les pipelines de gaz naturel peuvent être utilisés pour le transfert de l’hydrogène vert et que les ports du gaz naturel liquéfié peuvent accueillir à l’avenir les navires d’exportation de l’hydrogène vert. « L’Egypte possède un large réseau de gaz naturel et de ports d’exportation du gaz naturel munis d’équipements de pointe qui peuvent être exploités pour le transfert et l’exportation de l’hydrogène vert. Elle possède d’énormes capacités pour la production de l’hydrogène vert qui peuvent dépasser ses besoins », explique Ahmad Chadi, économiste. En effet, l’Egypte bénéficie de 2 450 km de côtes sur la Méditerranée et la mer Rouge, de 1 530 km de rives sur le Nil, d’un taux d’ensoleillement annuel record atteignant les 3 200 kWh/m2/an ainsi que des régions jouissant de vitesses de vent élevées et stables.

Emplacement idéal

C’est effectivement la raison pour laquelle le PDG du groupe belge DEME, Alain Bernard, a expliqué avoir choisi l’Egypte pour y produire l’hydrogène vert : « Le groupe a élaboré de larges études pour choisir le meilleur emplacement pour créer un centre axial pour la production de l’hydrogène vert, et l’Egypte est apparue en tête de liste vu son emplacement singulier, l’abondance de ses ressources en énergies renouvelables, notamment les énergies solaire et éolienne, en plus de son infrastructure terrestre et maritime et sa main-d’oeuvre qualifiée ».

En fait, les pays européens avaient conclu fin 2019 un accord sur l’objectif de neutralité carbone d’ici 2050. Un objectif qui ne peut se réaliser par la production locale seulement. L’Europe cherche donc dès maintenant des sources externes, notamment au Moyen-Orient et en Afrique du Nord. Partant, l’Egypte tente dès maintenant de se réserver une place sur le marché de l’exportation de l’hydrogène vert, surtout que les prévisions indiquent une hausse de la demande atteignant près de 530 millions de tonnes en 2050, écartant près de 10,4 milliards de barils équivalents pétrole (soit 37 % de la production mondiale de pétrole avant la pandémie du Covid-19). Ce qui signifie que le marché de l’exportation de l’hydrogène pourrait atteindre 300 milliards de dollars la même année créant plus de 400 000 emplois. « En fait, produire de l’hydrogène vert en Egypte sera bénéfique non seulement pour l’exportation, mais aussi pour couvrir les besoins locaux vu que nos ressources en pétrole touchent à l’épuisement », conclut Ahmad Chadi.

L’économie verte en chiffres

— 20 % fin 2022 et 42 % en 2035 : Part d’énergie renouvelable dans l’équation énergétique de l’Egypte.

— 1,9 milliard de dollars : Portefeuille des projets verts jusqu’en septembre 2020.

— 14% : Taux des investissements publics consacrés aux projets verts dans le budget de 2020-2021.

— 447,3 milliards de L.E. : Coût de l’exécution de 691 projets verts dans l’exercice financier 2020-2021.

— 80 sites d’enfouissement, 60 usines de recyclage de déchets et 120 usines intermédiaires : Nouveau système de gestion des déchets.

— 750 millions de dollars sur 5 ans avec un taux d’intérêt de 5,25 % : Obligations vertes.

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