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Les femmes soudanaises revendiquent leurs droits

Amira Samir, Mardi, 27 août 2019

En première ligne de la contestation contre le régime de Omar Al-Béchir, les femmes soudanaises réclament aujourd'hui plus de place au sein du gouvernement.

Les femmes soudanaises revendiquent leurs droits
Le Soudan lancera sa première ligue féminine en septembre.

Dès le 1er septembre, le Soudan lancera son premier Championnat féminin de football. En tout, ce seront 18 clubs qui participeront à la compé­tition féminine. D’ailleurs, le but à moyen et à long terme est de créer une équipe nationale, pour « représenter le pays dans les compétitions interna­tionales », a indiqué Mirvat Hussein, la responsable de la Fédération souda­naise chargée du football féminin à l’AFP. Cette annonce intervient le jour même où le Soudan s’est doté d’un nouveau pouvoir. En effet, les femmes étaient en première ligne du mouvement de contestation ayant fait chuter le régime de Omar Al-Béchir. Après la chute d’Al-Béchir, les femmes soudanaises se sont engagées dans une deuxième révolte pour accé­der aux différents postes. La photo d’une jeune manifestante soudanaise en tobe (habit traditionnel soudanais), juchée sur le toit d’une voiture et sur­plombant la masse des manifestants, doigt pointé vers le ciel, a fait le tour du monde, via les réseaux sociaux. Elle est devenue l’un des symboles du mouvement de contestation.

Le rôle-clé joué par la femme dans la vie politique n’est pas nouveau. Fatima Ahmad Ibrahim (1930-2017) en est l’exemple le plus fameux. Elle a laissé son empreinte sur l’histoire politique du Soudan en devenant la première femme élue à l’Assemblée nationale, en 1965. En 2012, avec le Printemps arabe, de nombreuses jeunes femmes ont intégré les organi­sations de jeunesse. A l’époque, les associations de la société civile accor­daient plus de place aux femmes. Les partis traditionnels de l’opposition, d’inspiration islamique ou socialiste, se sont montrés, eux, moins ouverts. En 2018, l’Université Ahfad pour femmes, à Omdurman, a témoigné d’une petite mobilisation. Des étu­diantes se sont mobilisées contre les violences faites contre leurs collègues dans l’enceinte de l’université. Le 8 mars dernier, à l’occasion de la Journée internationale de la femme, de nombreuses manifestantes se sont regroupées pour exiger une améliora­tion de leurs conditions sociales.

Nouvel espoir

Le changement au sommet du pays a fait renaître de l’espoir chez les femmes soudanaises, souvent margi­nalisées dans ce pays assez conser­vateur. En fait, la participation signi­ficative des Soudanaises au dernier mouvement révolutionnaire a été couronnée par la déclaration consti­tutionnelle, qui stipule que les femmes doivent occuper 40 % des sièges du futur parlement. Les efforts des femmes ont été aussi couronnés par la nomination de Neamat Abdallah Kheir comme première présidente de la justice au Soudan pendant la période transitoire. Pourtant, si certaines assimilent cela à une évolution, beaucoup d’autres demandent, quand même, plus de places dans le prochain gouverne­ment. « Le nombre de femmes était plus élevé que le nombre d’hommes pendant la révolution, et c’est nous qui avons encouragé les hommes et le peuple à sortir. Cependant, j’ai été très choquée de ne pas avoir de femmes qui nous représentent. En tant que femmes soudanaises, nous avons des besoins. Nous voulons jouer un rôle dans le nouveau gou­vernement civil au même titre que les hommes », martèle, à l’AFP, Sarah Ali Ahmad, étudiante souda­naise. Pour Adila Abdel-Rahman, présidente du syndicat des Femmes soudanaises, c’est un premier pas, mais qui n’est pas suffisant. « La femme mérite d’être représentée de façon égale avec les hommes et d’occuper 50 % des postes comme les hommes. Les Soudanaises ont beaucoup souffert dans le passé et nous espérons vraiment qu’à partir de maintenant, elles pourront jouer un plus grand rôle dans la vie publique », insiste-t-elle.

Jugeant les progrès insuffisants, Sarah Abdoul Lalil, membre de la SPA, déclare : « Quand vous com­parez la rue et les manifestations aux institutions, il y a un déca­lage ».

« Le fait de demander plus de femmes au pouvoir n’est pas seule­ment symbolique. Elles sont plus engagées en faveur de la paix. Ce n’est pas qu’une question d’égalité, c’est une question de chances de réussite de cette transition », déclare-t-elle.

Un débat est donc ouvert pour trouver de nouvelles façons d’inté­grer les femmes dans les nouvelles institutions. Le nouveau premier ministre, Abdalla Hamdok, a abordé le sujet lors de ses premières décla­rations aux journalistes. Le nouveau chef du gouvernement a également insisté sur la place à accorder aux femmes dans la direction du pays. « Nous allons faire en sorte que les femmes soient représentées d’une manière juste et méritée. Il n’y avait pas de femmes durant les négocia­tions comme pendant la signature des documents, il n’y avait que des hommes. Nous devons corriger cela. Les femmes seront présentes dans toutes les instances exécutives de l’Etat », dit-il.

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