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Egypte-G7  : La diplomatie au service du développement

Aliaa Al-Korachi, Mardi, 20 août 2019

La participation de l’Egypte au sommet du G7 à Biarritz (France), au côté de 4 autres pays africains, reflète le rôle majeur du Caire et son poids stratégique.

Egypte-G7  : La diplomatie au service du développement

Du 24 au 26 août, la station balnéaire de Biarritz, au sud-ouest de la France, accueille le 45e sommet des pays les plus développés au monde, le G7. Représentant près de 40% du PIB mondial, ce groupe des 7 rassemble l’Allemagne, le Canada, les Etats-Unis, la France, l’Italie, le Japon et le Royaume-Uni. L’Egypte, en sa qualité de présidente de l’Union Africaine (UA), a été invitée par la France pour rejoindre la table de discussion annuelle de ce groupe.

En fait, le sommet de Biarritz intervient dans un contexte global marqué par des incertitudes économiques et de grands défis sécuritaires et environnementaux. Au Canada, la dernière réunion du G7 s’est terminée sur un fiasco après le départ avec fracas de Donald Trump, qui a refusé de signer la déclaration commune. Les divergences persistent entre les Etats-Unis et les six autres pays du G7 sur de nombreux dossiers: la taxation des géants du numérique, la guerre commerciale sino-américaine, le nucléaire iranien et le Brexit (voir page 4).

Partenariat avec l’Afrique

Huit ans après le sommet de Deauville, la France accueille de nouveau le G7, placé cette année sous le signe de la lutte contre les inégalités. Pour relever ce défi, la France a modifié le format du G7, en associant des partenaires africains « qui jouent un rôle moteur sur le continent » et qui sont « des acteurs de la coopération multilatérale », selon l’Elysée. « Notre destin est lié à l’Afrique, nous réussirons ou échouerons ensemble. Il est illusoire de penser à des solutions d’avenir sans inclure le continent le plus jeune du monde. L’objectif de la présidence française du G7 sera de nouer un partenariat d’égal à égal avec l’Afrique », peut-on aussi lire sur le site de la présidence française.

Outre l’Egypte, président en exercice de l’UA, 4 autres pays africains participeront à ce sommet : le Rwanda (le président sortant de l’UA), l’Afrique du Sud (le prochain président), le Sénégal (président du NEPAD) et le Burkina-Faso (président en exercice du G5 Sahel). Ces dirigeants africains ont été invités au sommet ainsi qu’aux réunions préparatoires où les textes sont négociés.

Le sommet de Biarritz n’est pas le seul événement programmé cette année dans le cadre de la présidence égyptienne de l’UA. L’Egypte a participé en juin dernier au sommet du G20 à Osaka au Japon et au sommet de la Ceinture et la Route à Pékin en avril. D’autres rencontres sont également prévues en 2019 : La Conférence internationale de Tokyo sur le développement de l’Afrique, le TICAD, à Osaka le 28 août et le 1er sommet Russie-Afrique en octobre prochain à Sotchi. « La participation de l’Egypte à ces forums économiques est d’une grande importance. L’Egypte tente de changer l’ancienne croyance selon laquelle l’Afrique n’est autre qu’une source de matières premières et un marché de consommation des produits finis dans les pays développés, et d’aller vers un partenariat équilibré qui tient compte des écarts de développement et des intérêts des deux parties », explique Ahmad Sayed Ahmad, expert des affaires internationales au CEPS (voir entretien).

L’importance stratégique de l’Egypte

Samar Al-Bagoury, spécialiste des affaires africaines à l’Université du Caire, explique que l’invitation de l’Egypte au sommet du G7 est « significative » pour deux raisons. « Elle reflète d’un côté l’importance stratégique de l’Etat égyptien, qui est pleinement capable de diriger le processus de développement sur le continent à tous ses niveaux: économique, politique et sécuritaire. D’un autre côté, elle dévoile la volonté des membres du G7 de s’ouvrir sur l’Afrique qui offre des opportunités prometteuses d’investissement », précise-t-elle.

L’économie égyptienne a réalisé une croissance de 5,6% en 2018-2019. L’Egypte est la première destination des investissements étrangers directs en Afrique avec 6,8 milliards de dollars en 2018. Selon les prévisions de la banque britannique Standard Chartered, l’économie égyptienne fera un bond considérable au cours des prochaines années. « Les réformes structurelles engagées depuis deux ans commencent à porter leurs fruits », affirment les analystes de Standard Chartered. L’Egypte peut compter sur les découvertes gazières en Méditerranée, les investissements dans le domaine des infrastructures, le renouveau du secteur du tourisme, le positionnement géographique avec le Canal de Suez et le poids de la population égyptienne, qui compte actuellement 105 millions de consommateurs.

« En matière de sécurité, l’Egypte est un partenaire stratégique-clé dans la lutte contre le terrorisme et les migrations irrégulières à destination de l’Europe », souligne Bahaa Mahmoud, spécialiste des affaires européennes au CEPS. En septembre 2016, l’Egypte a déclaré avoir mis un terme à la migration illégale à partir de son littoral. « L’Europe mise également sur l’Egypte pour régler plusieurs autres questions régionales et internationales essentielles, notamment le processus de paix, la guerre en Syrie et en Libye, la situation au Soudan et la coopération euro-méditerranéenne », ajoute Bahaa.

L’Afrique sur l’agenda du G7

La transformation numérique et l’entreprenariat féminin en Afrique sont les deux sujets à l’ordre du jour des discussions entre les pays les plus industrialisés et les nouveaux invités africains.

L’accélération de la numérisation du continent et le soutien aux femmes entrepreneurs se trouvent effectivement au coeur de l’action de la présidence égyptienne de l’UA et sont aussi deux domaines dans lesquels le gouvernement égyptien a franchi des pas importants. En marge du sommet « Transform Africa », tenu en mai dernier à Kigali, la Banque Mondiale (BM) s’était engagée à mobiliser 25 milliards de dollars pour développer les technologies de l’information et l’économie numérique en Afrique au cours des 10 prochaines années.

Sur le plan bilatéral, selon beaucoup d’observateurs, ce sommet du G7 sera une occasion pour l’Egypte afin d’exposer les opportunités d’investissement, notamment dans l’axe du Canal de Suez et la Nouvelle Capitale administrative. Le gouvernement prépare une nouvelle carte des investissements industriels. Celle-ci sera disponible en ligne dès le 1er septembre. Elle offrira une vaste base de données sur où et comment investir en Egypte.

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