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Parole d'urbaniste

Mardi, 30 juillet 2019

Que faire du complexe administratif de Tahrir une fois évacué ? Quatre urbanistes donnent leur point de vue.

Parole d

« Il faut repenser le centre-ville dans son ensemble »

« Démolir le Mogammae revient à altérer le caractère de la place Tahrir »

Je suis contre la démolition du complexe administratif de Tahrir, qui a un caractère architectural singulier. Sa démolition revien­drait à altérer le caractère de la place Tahrir. De nombreuses pro­positions ont été avancées au sujet de ce bâtiment. La première est de transformer le Mogammae en hôtel ou en appartements d’hôtel, qui sont des logements meublés avec services. Pourtant, ce ne sera pas une tâche facile. Il faut d’abord étudier d’une manière approfondie la circulation, le par­king et voir comment on peut augmenter les points d’entrée et de sortie de ce gigantesque immeuble. Une autre proposition est de garder l’esprit du bâtiment considéré comme un symbole de l’administration égyptienne. En fait, le Mogammae, construit en 1951, est le premier complexe de services publics au Moyen-Orient. Selon cette proposition, le bâti­ment peut garder sa vocation d’être un centre d’activités admi­nistratives, mais on doit exclure les activités qui attirent un grand public. La troisième idée à laquelle je m’oppose totalement, c’est de transformer l’intérieur du Mogammae en studios ou en petits appartements pour célibataires.

Soheir Zaki Hawas, urbaniste.

Valoriser la région du Caire khé­divial dont fait partie le Mogammae est un objectif phare de l’Association de la pensée urbaine. Je pense que l’un des pro­blèmes les plus importants, qui retardent jusqu’à présent l’évacua­tion du Mogammae, est celui de trouver un lieu alternatif et des moyens de transport accessibles au public. A mon avis, les services électroniques peuvent être une solution pour réduire la pression sur le Mogammae. Avant de réflé­chir à l’avenir du Mogammae, il faudrait poser la question : quel est l’avenir du centre-ville ? Il faut étudier les changements qui pour­raient se produire au centre-ville après le déménagement des rési­dences gouvernementales vers la Nouvelle Capitale administrative : ministères, parlement, banques, Bourse et autres. On ne doit pas penser au sort d’un bâtiment sépa­rément des autres. Je propose une planification urbaine de la région dans son ensemble, afin d’harmo­niser ses différentes activités.

May Al-Ebrachi, présidente de l’Association de la pensée urbaine.

« Transformer le Mogammae en centre des arts et de la culture »

Au fil des années, des modifications architec­turales ont été faites à l’intérieur du bâtiment, détachées les unes des autres, ce qui a fait perdre au Mogammae beaucoup de son éclat. Même les couloirs ont été occupés. L’objectif de sa création dans les années 1950 était de faciliter les démarches administratives pour les habitants du Caire et ses banlieues. Mais aujourd’hui, la capitale s’est énormément éten­due. Et beaucoup de Cairotes habitent très loin de la place Tahrir, à plus de 40 ou 50 km. Il faut donc étudier les besoins du centre-ville et savoir si la capacité des hôtels qui entourent le Mogammae est suffisante ou non. Dans tous les cas, l’essentiel est de créer des activités qui génèrent à la fois un rendement financier et qui ont une utilité sociale tout en conservant l’iden­tité patrimoniale du centre-ville. Je penche plu­tôt pour l’idée qui suggère de convertir le Mogammae en un centre pour les arts et la culture : bibliothèques, clubs sociaux, sémi­naires littéraires, écoles d’artisanat ou petites salles de cinéma. Bref, transformer le Mogammae en un immense forum culturel.

Emad Farid, spécialiste en architecture patrimoniale.

« Il faut organiser un concours mondial pour trouver des idées innovantes »

L’avenir du Mogammae fait l’objet de discussions depuis un certain temps entre les responsables gouvernemen­taux et les urbanistes. L’une des propo­sitions consiste à le transformer en grand hôtel. Cette proposition nécessite plusieurs modifications dans la concep­tion architecturale du bâtiment. Et ceci à cause de sa grande superficie et du nombre élevé de ses pièces. En fait, adapter le bâtiment de l’intérieur pour qu’il soit convenable aux services d’hôtellerie est un défi majeur. C’est pourquoi je propose d’organiser un concours d’architectes international sous la supervision de l’Organisme de coordination urbaine, pour trouver une nouvelle vocation du bâtiment. La tâche n’est pas facile. J’espère donc que le sort du Mogammae sera décidé selon une approche scientifique inno­vante comme le Grand Musée.

Salah Zaki, vice-président de la Fédération internationale des architectes.

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