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L’avenir incertain de l’Unrwa

Ghada Ismaïl, Mardi, 30 juillet 2019

Tenue à New York, la Conférence des donateurs de l’Unrwa a recueilli des promesses de dons trois fois supérieures à celles de l’an dernier. En dépit de ce soutien politique, l’avenir de l’institution reste incertain.

L’avenir incertain de l’Unrwa
Des manifestations à Gaza contre le gel des dons américains, janvier 2018.

« Tous nos efforts politiques et diplomatiques visent à garantir la réussite de cette conférence des pays donateurs de l’Unrwa à New York qui se tient en même temps que la Conférence de Manama », pouvait-on lire dans un communiqué publié par le ministère palestinien des Affaires étrangères, le 25 juin. « Est-ce une coïncidence que ces deux événements se tiennent en même temps ? Ou bien s’agit-il d’une tentative de la part des Américains pour faire échouer la réunion de New York ? », s’interroge le communiqué.

Alors que Jared Kushner, le gendre de Trump, tentait de convaincre les participants de la Conférence de Manama du réalisme de sa vision purement économique pour la paix, la Conférence annuelle des donateurs de l’Unrwa tenue au siège des Nations-Unies à New York était sous les projecteurs. L’agence a réussi à obtenir des promesses de dons à hauteur de 110 millions de dollars, trois fois supérieures à celles de l’an dernier. Il s’agit d’un soutien politique fort face à la position de Washington qui avait coupé tous les financements à l’Unrwa en 2018. Trente-cinq pays ont participé à cette conférence. Les plus gros donateurs ont été l’Union européenne, l’Allemagne, la Grande-Bretagne et la France. Pourtant, si les dons sont en hausse, ce montant reste encore insuffisant pour boucler le budget de 1,2 milliard de dollars de l’agence. Le déficit global pour cette année a été évalué à 211 millions de dollars. Ce qui met en péril les programmes dédiés à l’éducation et à la santé des réfugiés palestiniens. « Les promesses de dons sont encourageantes même si elles ne permettront pas de financer les frais de fonctionnement sur une année entière », s’est réjoui le commissaire général de l’Unrwa, Pierre Krähenbühl. Fondée en 1949, l’Unrwa gère des écoles et fournit une aide médicale à quelque 5 millions de réfugiés palestiniens en Jordanie, au Liban, en Syrie, en Cisjordanie et dans la bande de Gaza.

En fait, l’agence affronte depuis presque un an une crise existentielle. Le 31 août 2018, Washington, le plus grand contributeur de l’agence, avait annoncé mettre fin à son aide financière annuelle de plus de 300 millions de dollars estimant que l’agence « n’était plus justifiée 70 ans après le début du conflit israélo-palestinien ». De son côté, Israël, qui avait salué cette décision, accuse cette agence humanitaire de « perpétuer le conflit ». Selon l’Onu, plus de 700 000 Palestiniens ont été déplacés entre avril et août 1948. Israël et les Etats-Unis s’opposent au fait que les Palestiniens puissent transmettre le statut de réfugié à leurs enfants, souhaitant réduire le nombre de personnes bénéficiant d’une aide de l’Unrwa, ce que les Palestiniens dénoncent comme une violation de leurs droits.

Les réfugiés sans statut dans le plan de paix

Selon Mona Soliman, spécialiste des affaires régionales, couper les financements à l’Unrwa vise à liquider la cause du retour des réfugiés palestiniens, qui représente un danger démographique pour les juifs dans les Territoires occupés de la Palestine. « Réfugié » est un mot absent dans le plan économique de Kushner. Washington n’a pas caché sa volonté d’éradiquer complètement cette agence et de transférer les services assurés par l’Unrwa aux pays accueillant des réfugiés palestiniens. Selon Ahmad Youssef, politologue, le fait que le plan américain consacre la moitié des 50 milliards de dollars d’investissements prévus pour financer des projets dans les pays voisins, comme l’Egypte, la Jordanie et le Liban, soulève une interrogation : Est-ce que ces investissements promis visent à implanter les Palestiniens soit d’une manière directe ou indirecte dans ces pays ? « Aucun pays, même les plus modérés dans la région, n’acceptera d’assumer une telle responsabilité. La position de l’Egypte est très claire à cet égard, le Liban et la Jordanie aussi. Ils réclament un règlement équitable de la cause du retour des réfugiés en conformité avec les résolutions onusiennes », dit Youssef, avant de conclure : « La création de l’Etat palestinien est d’une grande importance sécuritaire et stratégique pour ces trois pays ».

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