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La twitto-diplomatie de Trump

Amira Samir, Mardi, 17 juillet 2018

Critiquer ses alliés européens, annoncer une frappe contre la Syrie, attaquer l’Iran, déclarer une guerre commerciale avec Pékin ou limoger un ministre et le remplacer par un autre, les tweets de Trump ne cessent d’affoler la toile.

Twitter et Trump font bon ménage. Avant de démarrer sa tournée européenne de six jours, qui l’a mené d’abord à Bruxelles pour assister au sommet de l’Otan, avant un tête-à-tête avec Vladimir Poutine à Helsinki, Trump a multiplié les tweets provocateurs en destination de ses alliés européens. « Les pays de l’Otan doivent payer PLUS, les Etats-Unis doivent payer MOINS », « La rencontre avec Poutine », pourrait être « plus facile » que le sommet de l’Otan. Des tweets qui ont fait planer une atmosphère d’incertitude sur le sommet, avant que Trump ne change d’humeur, en tweetant avant l’atterrissage vers Londres, sa seconde escale, « Thank you #NATO2018! Grand succès de l’Otan. Des milliards additionnels… Bon esprit».

Publier des tweets devient une partie intégrante des outils diplomatiques du président américain. Avec quelque 52 millions d’abonnés à son compte, « Donald Trump est devenu le dirigeant le plus suivi de la planète sur Twitter, devant le pape François et le premier ministre indien, Narendra Modi », selon une étude effectuée par Twiplomacy, une agence qui analyse chaque année l’utilisation des comptes Twitter par les dirigeants. En fait, le locataire de la Maison Blanche ne cesse d’affoler la toile. Ces messages courts qui ne dépassent pas les 140 signes sont souvent choquants et ont des impacts négatifs non seulement sur les relations diplomatiques des Etats-Unis avec ses alliés, mais aussi sur l’économie américaine, les marchés mondiaux et la stratégie des multinationales.

Inscrit sur Twitter depuis mars 2009, Trump a bien choisi ce mode de communication gratuit et accessible à tous pour déclarer et critiquer. Il tweete tous les jours ce qui lui passe par la tête. Sur son compte officiel @POTUS, mais surtout sur son compte personnel @realDonaldTrump, il poste en moyenne six messages par jour. « Sur Twitter, le président américain interpelle des autres chefs d’Etat, s’adresse aux Américains, limoge ses ministres et nomme d’autres. Les tweets de Donald Trump peuvent être plutôt considérés comme des communiqués de presse, voire des annonces officielles », estime Abdallah Zalatah, expert en communication politique. Et d’ajouter: « Trump a parfaitement pratiqué ce qu’on peut appeler la diplomatie du tweet ».

Tourner le dos aux médias

« Ce moyen de communication était son arme électorale, la toute-puissante qui a réussi à mobiliser les électeurs pour lui donner leurs voix. Une fois élu, il fait de Twitter un nouveau mode pour exercer le pouvoir. Ces messages brefs ne donnent pas trop d’explication, suscitent à chaque fois de nombreuses spéculations », explique Zalatah. Twitter lui permet de ne pas avoir à s’adresser aux médias. « Sans les tweets, je ne serais pas ici. J’ai plus de 100 millions d’abonnés — si l’on compte Facebook, Twitter, Instagram. Plus de 100 millions! Je n’ai pas besoin de passer par les faux médias », a-t-il indiqué trois mois après le début de son mandat.

Avant son arrivée au pouvoir, Trump comptait 13 millions d’abonnés. Aujourd’hui, il en a plus de 52 millions. Son compte Twitter gagne près de 6% d’abonnés de plus par mois. La majorité des politiciens au monde ont une équipe de communication qui gère et écrit leurs tweets. Mais, Trump a choisi de le gérer personnellement. « Mon utilisation des réseaux sociaux n’est pas présidentielle. Elle est PRÉSIDENTIELLE MODERNE ! », a déclaré Trump. Pourtant, le président américain n’a pas le droit, selon la justice américaine, de « bloquer » ses opposants sur Twitter, accès protégé par la Constitution américaine. Il n’est pas le seul à utiliser Twitter à des fins diplomatiques. Selon l’étude de Twiplomacy, au total, les chefs d’Etat et de gouvernement ainsi que les ministres des Affaires étrangères de 187 pays ont une présence sur Twitter, « ce qui représente 97% des 193 pays membres de l’Onu ».

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