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L’avocat Gamal Eid: « Nous ne permettrons pas à des lois arbitraires de voir le jour »

Héba Nasreddine, Mardi, 19 février 2013

L’avocat Gamal Eid, directeur du Réseau arabe d’information sur les droits de l’homme (ANHRI), dénonce la politique de répression que le nouveau régime cherche à légaliser.

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Al-Ahram Hebdo : Le Conseil consultatif commence à étudier d’importants projets de loi relatifs aux droits fondamentaux des liber­tés. Ces préliminaires suscitent déjà des débats. Qu’en pensez-vous ?

Gamal Eid : Malheureusement, ces projets de loi présentés par le gouver­nement Qandil ne représentent qu’un nouveau point négatif qui vient s’ajouter à la liste des aspects négatifs de ce gouvernement et du régime de Morsi. Il s’agit de projets de loi qui portent sur les ONG, le droit de mani­fester et l’accès aux informations. Depuis la révolution, on attendait impatiemment la promulgation de ces législations qui devaient être à la prio­rité de l’agenda politique. Mais cela ne doit pas se faire sous cette forme arbitraire élaborée par les autorités. Ces trois projets sont les pires qui n’aient jamais existé.

D’abord, les textes incluent des articles qui transgressent clairement les droits de l’homme et la liberté d’expression. Le gouvernement a volontairement omis de faire partici­per à leur élaboration les institutions concernées et les spécialistes. En plus, le Conseil consultatif n’est pas l’institution légale, au vrai sens du terme, qui devrait discuter de ces lois. Dans ce contexte, j’estime qu’il est indispensable de réagir contre leurs promulgations et d’appeler à les reporter jusqu’à ce que l’Assemblée législative soit élue, et à condition que des membres de la société civile et des ONG de défense des droits de l’homme assistent aux débats.

— Comment jugez-vous la volon­té du gouvernement de faire passer ces lois en urgence, sans attendre les législatives ?

— Ceci révèle la politique répres­sive que le nouveau régime veut adopter, mais d’une manière « légale ». Il cherche à légaliser tous les mécanismes qui lui permettent de faire taire l’opposition, d’interdire les protestations et de limiter le rôle de la société civile. Car ce sont elles qui dévoilent les erreurs et critiquent la mauvaise performance du gouverne­ment.

Et à son tour, le gouvernement déforme l’image de l’opposition au nom de la religion. L’autre arme du régime est les procès intentés contre les présentateurs des chaînes privées et les journalistes qui ne sont pas « fidèles » au leader du pays. Ces méthodes, le nouveau régime les a héritées de son prédécesseur.

En quel sens ?

— Au cours des 200 premiers jours du mandat de M. Morsi, l’ANHRI a enregistré 24 cas de poursuites contre des journalistes accusés d’insulter le président. Ce chiffre est un record. Il est de très loin supérieur à ce qui se passait sous Moubarak. Sans oublier le procès-verbal déposé en décembre dernier contre plusieurs dirigeants de l’opposition, dont Amr Moussa et Mohamed ElBaradei, les accusant d’essayer de renverser le régime. Il veut s’emparer de tous les pouvoirs, aux dépens des libertés fondamen­tales.

Comment voyez-vous les rap­ports publiés récemment par trois organisations internationales de défense des droits de l’homme réclamant de geler ces projets de loi ?

— C’est un message clair adressé à Morsi : ces projets de loi représentent des violations des droits de l’homme. La Fédération internationale des droits de l’homme aussi bien que Human Rights Watch critiquent sévèrement cette répression et condamnent les autorités qui recou­rent à des mesures autoritaires plutôt que d’ouvrir la porte à un véritable dialogue avec la société civile.

La répression peut-elle deve­nir la politique du régime ?

— Non. Ce jour ne viendra pas. Nous ne permettrons pas à ces projets de loi arbitraires de voir le jour. Notre révolution contre l’état d’urgence et la répression se poursuit. J’invite tous les Egyptiens à protester dans les rues le jour de la promulgation de ces lois. Morsi a perdu sa légitimité et ne mérite pas d’être président.

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