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Sami Mahmoud : Les résultats de l’enquête détermineront l’impact de cette crise

Dalia Farouk, Lundi, 09 novembre 2015

Sami Mahmoud, président de l’Organisme de promotion touristique, pense que l’Egypte doit emprunter toutes les voies diplomatiques et politiques pour amortir la crise et travailler sur des alternatives.

Sami Mahmoud, président de l’Organisme de promotion touristique
Sami Mahmoud, président de l’Organisme de promotion touristique

Al-Ahram Hebdo : Quelles sont les répercussions du crash de l’avi­on sur le secteur du tourisme en Egypte ?

Sami Mahmoud : Le crash de l’avion russe est une véritable catas­trophe pour le secteur, surtout depuis que des spéculations courent sur la possibilité d’un acte terroriste. La suspension des vols par l’Angleterre et la Russie, et les avertissements des autres pays qui déconseillent à leurs ressortissants de voyager en Egypte, sont venus compliquer l’affaire. Mais il est encore trop tôt pour savoir dans quelle proportion le flux de touristes, en Egypte, va baisser. Il nous faut deux semaines pour savoir où on en est et où on sera dans un futur proche. Jusqu’à présent, nous n’avons pas constaté de grand nombre d’annulations de voyages. Le problème sera probablement les réservations futures qui sont presque gelées. Mais j’estime que les résul­tats de l’enquête sur les raisons de ce crash vont, ou bien atténuer l’impact de cette crise si elle affirme que ce crash est dû à une défaillance tech­nique, ou bien l’augmenter si elle affirme que l’explosion d’une bombe était derrière cet accident.

— Cet impact se limite-t-il seule­ment à Charm Al-Cheikh ou d’autres destinations sont égale­ment touchées ?

— Jusqu’à présent, l’impact de cette crise est limité à Charm Al-Cheikh, les annulations ou les avertissements sont limités à cette région. Aucun touriste n’a annulé son voyage pour une autre destina­tion touristique en Egypte, même les touristes russes dont le gouverne­ment a suspendu les voyages dans l’ensemble du pays.

— Comment peut-on sortir de cette impasse ?

— Tout de suite après l’accident, nous avons formé un comité de ges­tion de crise en coopération avec le ministère du Tourisme et les profes­sionnels du secteur privé. Nous tra­vaillons sur deux axes principaux. Nous essayons d’abord de limiter l’impact de la colère et de la tristesse causées par l’accident, en prove­nance de Russie, car il s’agit d’un marché très important pour nous. Une délégation, avec à sa tête le ministre du Tourisme, va se rendre dans quelques jours à Moscou pour s’entretenir avec nos partenaires sur place. Déjà une délégation d’experts en sécurité russe est venue en Egypte pour inspecter les mesures de sécu­rité dans les aéroports égyptiens. Le second axe est celui de la recherche d’alternatives pour les touristes qui ont des réticences pour voyager en Egypte à l’heure actuelle.

— Quelles sont donc ces alterna­tives ?

— Nous allons accorder plus d’importance à la promotion du tou­risme interne, en lançant plusieurs initiatives qui ont pour but d’encou­rager les Egyptiens à voyager pour découvrir les trésors de leur pays, à l’instar de l’initiative que nous avi­ons lancée l’été dernier. Le ministère du Tourisme subventionnait une par­tie des frais des voyages des Egyptiens.

De plus, nous préparons une cam­pagne avec des offres spéciales pour les touristes arabes ainsi que pour les Egyptiens vivant à l’étranger. Cette campagne est élaborée en coopéra­tion avec le ministère de l’Immigra­tion.

Enfin, nous allons accorder plus d’importance et de facilités aux pays qui n’ont pas été affectés par cette crise et n’ont émis aucune restriction sur les vols pour l’Egypte. C’est notamment le cas avec l’Allemagne, l’Italie et la Pologne qui font aussi partie des marchés les plus impor­tants pour le tourisme égyptien.

— Qu’en est-il des campagnes de promotion que le ministère du Tourisme devait lancer lors du Salon mondial du tourisme à Londres ?

— Nous avons suspendu pour le moment toutes ces campagnes. Nous devons prendre le temps de formuler une meilleure vision de ce qui se passe pour pouvoir travailler sur de nouvelles bases. Toute publicité, à l’heure actuelle, est vaine, et ce n’est que du gaspillage d’argent.

— Qu’en est-il de la campagne de relations publiques signée à Londres ?

— Celle-ci est d’une grande importance, surtout pour les marchés qui ont été directement affectés par la crise. Nous travaillons avec l'une des plus grandes sociétés de rela­tions publiques au niveau mondial, Hill and Knowlton. Cette société suit tout ce qui s’écrit à propos de l’Egypte et de l’accident dans les médias internationaux pour pouvoir y répondre en temps voulu. Cette société envisage peut-être de pro­duire des documentaires sur les plus grands accidents d’avion dans le monde, pour expliquer que les causes de la plupart de ces accidents ne sont pas encore dévoilées. Ces documentaires seront diffusés sur les grandes chaînes de télévisions dans le monde.

— Comment envisagez-vous de rassurer les pays qui ont suspendu leurs vols vers l’Egypte ?

— Le discours diplomatique a pour but d’apaiser l’opinion publique mondiale vis-à-vis de cet accident, tout en mettant l’accent sur l’impar­tialité des enquêtes en cours, la neu­tralité du comité d’enquête formé de 57 personnalités de quatre pays dif­férents. Dans le même temps, il faut renforcer les mesures de sécurité dans tous les aéroports et non pas seulement à Charm Al-Cheikh, afin que le monde entier se rende compte que nous prenons au sérieux cet accident. Les autorités de l’aviation civile ont invité les experts interna­tionaux, qu’ils soient Britanniques, Allemands ou Russes, à voir sur place que nos normes sont conformes au code international de la sécurité des aéroports.

— Et qu’en est-il des pays qui ont déconseillé à leurs ressortis­sants de voyager en Egypte ?

— En réalité, il n’y a que quatre pays, jusqu’à présent, qui ont décon­seillé les voyages en Egypte à leurs ressortissants : la France, l’Irlande, la Belgique et les Pays-Bas. Ces pays, de toute façon, ne nous envoient pas un grand nombre de touristes chaque année. Les avertis­sements aux citoyens de ces pays ne sont qu’une mesure de précaution normale pour protéger leurs citoyens. Nous avons été confrontés à ces avertissements à plusieurs reprises depuis 2011. Lorsque les crises se terminent, les avertissements sont allégés ensuite annulés.

— Cette crise est-elle différente de celle qui avait frappé Charm Al-Cheikh entre 2004 et 2006, lorsque plusieurs actes terroristes s’étaient produits en Egypte ?

— La crise actuelle est probable­ment la plus difficile. Entre 2004 et 2006, ces attentats étaient indivi­duels. Les terroristes ciblaient des touristes dans des hôtels. Il s’agissait d’un déficit de sécurité au niveau des hôtels. Cette fois-ci, c’est tout le système de sécurité de l’un des plus grands aéroports d’Egypte qui est en question. Ensuite, le grand nombre de victimes a produit une amertume difficile à oublier. En 2004, le sec­teur du tourisme ne souffrait pas d’instabilité politique chronique. Le secteur, à l’heure actuelle, est affai­bli et il ne peut pas supporter un coup aussi dur.

— Selon vous, quand est-ce que le tourisme reprendra après cette crise ?

— Nous essayons de limiter les dégâts. Je ne pense pas qu’il y ait une reprise avant le mois de février. Si tout va bien, le tourisme aura repris pour Pâques.

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