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Frères sans violence veut un parti politique

May Atta, Mardi, 20 mai 2014

Les fondateurs de « Frères sans violence », un mouvement dissident de la confrérie, ont annoncé leur volonté de créer un parti politique. Il s’agirait d’une manoeuvre de la confrérie afin de réintégrer l’échiquier politique.

Frères sans violence

Manoeuvre ou initiative politique? La déci­sion des Frères sans violence de créer un parti politique soulève bien des inter­rogations. Ce mouvement, fondé par de jeunes membres dissidents de la confrérie des Frères musulmans, dit vouloir créer une nouvelle entité politique en rupture avec l’idéologie radicale de la confrérie, à l’instar de Tamarrod, qui, par un vaste mouve­ment de pétitions, avait contribué au renversement de Mohamad Morsi, le 30 juin 2012.

Les membres du mouvement font campagne depuis plusieurs mois pour recueillir des signatures afin d’écarter les dirigeants les plus radi­caux de la confrérie. Le mouvement a aussi annoncé qu’il entendait créer un parti politique qui disputera les prochaines législatives et munici­pales.

Le mouvement mise beaucoup sur la création de ce parti qui sera basé, selon ses fondateurs, sur des poli­tiques et des idéologies démocra­tiques loin de tout esprit radical. Le ministère des Affaires sociales avait déjà refusé une demande du mouve­ment de fonder une organisation sous le nom d'« organisation Al-Banna ». Aspirant à un processus politique plus inclusif, ce nouveau mouve­menta annoncé la semaine dernière son soutien au candidat à la présiden­tielle, Hamdine Sabahi.

« Notre choix de soutenir Sabahi est motivé par ses promesses de se réconcilier avec les Frères musul­mans non impliqués dans des actes de violence, ceci alors que son rival, Sissi, insiste pour exclure les Frères définitivement de l’échiquier poli­tique. Sabahi met dans le même panier les partisans de tous les mou­vements islamistes. En donnant une nouvelle chance aux islamistes non impliqués dans la violence de se replacer sur la scène politique, Sabahi leur évite de basculer dans la radicalisation », indique Ahmad Yéhia, fondateur du mouvement.

Il souligne que le mouvement ne se limite pas aux dissidents des Frères musulmans, mais regroupe aussi des membres d’autres mouvements isla­mistes en divergence idéologique et politique avec leurs mouvements. « Le mouvement vise à représenter les courants islamistes modérés qui rejettent la violence. Nous représen­tons la troisième génération des Frères, celle qui est prête à prendre le relais », précise Yéhia.

Restructurer la confrérie

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Les Frères musulmans ont été récemment impliqués dans plusieurs actes de violence. (Photo : Reuters)

Hassan Abdel-Rahmane, membre du mouvement, pense que la confré­rie a besoin de se restructurer de l’intérieur, de revenir activement sur le terrain social et de reprendre son rôle dans la prédication. « Les jeunes ont échoué à redresser la barre au sein de la confrérie, notre mouvement cherche à protéger les idéologies de son fondateur, Hassan Al-Banna. C’est que hélas nos diri­geants ont tellement instrumentalisé l’islam à des fins électorales. En optant pour la violence, la confrérie a dévié des principes de son fonda­teur, et c’est ce que notre mouve­ment cherche à corriger », souhaite Abdel-Rahmane.

Manoeuvre politique ?

Achraf Al-Chérif, spécialiste des mouvements islamistes, évoque deux hypothèses. Il redoute que ce mouvement ne soit qu’un instrument utilisé par le régime pour miner la confrérie. « Les Frères ne resteront pas à l’écart de la vie politique à jamais. Une réalité que connaît le régime et à laquelle il semble se préparer par des cartes de pressions dont il se servira lors des négocia­tions avec eux », pense Al-Chérif.

Mais quoi qu’il en soit et loin de cette théorie du complot, ce mouve­ment ne pourra pas redorer le blason de la confrérie. « A l’encontre de leurs prétentions, ces jeunes Frères ne sont pas moins violents que leurs leaders et leur idéologie penche pour le radicalisme. Leurs divisions avec les cadres de la confrérie ont été toujours d’ordre tactique dans la mesure où ils se disputaient avec leur hiérarchie au sein du groupe sur certaines orientations mais pas sur les concepts », estime Al-Chérif.

Il pourrait s’agir d’une manoeuvrepour la confrérie visant à réintégrer l’échiquier politique.

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