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Moon Jae-in : L’Egypte est un pays attractif en raison de son dynamisme et ses perspectives de croissance

Dimanche, 06 février 2022

Le président sud-coréen, Moon Jae-in, revient sur les relations entre son pays et l’Egypte. Il évoque notamment les perspectives de coopération et d’investissement entre Le Caire et Séoul.

Moon Jae-in

Par Alaa Sabet,

Rédacteur en chef du quotidien Al-Ahram

 

Al-Ahram Hebdo : Comment s’est déroulée votre première visite en Egypte, et quels en étaient les objectifs ?

Le président Moon Jae-in : Tout d’abord, je voudrais exprimer ma joie d’être le premier président sud-coréen à visiter l’Egypte depuis 16 ans. Cette joie émane surtout de notre connaissance de l’histoire de l’Egypte Ancienne. L’Egypte est le berceau des civilisations humaines. Le pays a un emplacement stratégique. C’est un pont entre le Moyen-Orient, l’Afrique et l’Europe qui se caractérise par sa culture de l’islam modéré. C’est aussi le plus grand Etat de la région arabe sur le plan démographique. En réalité, l’Egypte est un pays attractif en raison de son dynamisme et ses perspectives de croissance. A Séoul, nous apprécions le rôle de leadership joué par l’Egypte, surtout après sa décision d’accueillir la Conférence des Nations-Unies pour le changement climatique (COP27) à Charm Al-Cheikh, à la fin de l’année. Nous voulons raffermir la coopération globale entre nos deux pays qui sont deux bons exemples de partenariat, d’autant que nous avons des capacités prometteuses pour élargir le volume du commerce et des investissements. Le gouvernement coréen a choisi l’Egypte comme partenaire prioritaire en ce qui a trait à l’aide officielle adressée au développement dans la période s’étendant de 2021 à 2025. A mon avis, cette visite accélérera la coopération entre nos deux pays, surtout dans les domaines des infrastructures du transport, un dossier qui ouvrira la porte à davantage de coopération, notamment dans des domaines comme les industries amies de l’environnement, les industries militaires et celles du secteur public.

 

─ Comment évaluez-vous les relations bilatérales entre Le Caire et Séoul, et quelles sont les perspectives de coopération entre les deux pays ?

─ Nous avons réalisé un essor important dans la consolidation de la coopération bilatérale et les échanges dans divers domaines, et ce, malgré la distance géographique séparant nos deux pays et nos relations diplomatiques qui datent seulement de 30 ans. En réalité, l’Egypte et la Corée du Sud sont le modèle réussi d’une coopération basée sur les intérêts mutuels dans le domaine de l’industrialisation. Certaines entreprises coréennes pionnières comme SamsungLGHundai et Rotem possèdent des bases de production en Egypte et contribuent à la création d’emploi en brandissant le slogan Made in Egypt. Nous avons également un modèle d’éducation réussi, celui de l’Université égypto-coréenne pour la technologie, fondée dans le cadre d’un projet de coopération en matière de développement de l’Agence coréenne pour la coopération internationale. L’université tient à former de jeunes cadres qualifiés et spécialisés dans les divers domaines de la technologie. Nous espérons que dans le futur, d’autres perspectives de coopération seront ouvertes. Nous avons l’espoir de mettre sur pied la première zone de libre-échange avec le continent africain par l’intermédiaire de l’Egypte.

La Corée du Sud et l’Egypte ont noué des partenariats importants dans le domaine des infrastructures, du transport et de l’énergie. Mentionnons par exemple le projet de développement des chemins de fer. Le gouvernement coréen présentera à l’Egypte un soutien de 312 millions de dollars fournis par le Fonds de coopération et de développement économique (EDCF). Ce projet permettra de rénover le réseau ferroviaire entre Nagaa Hamadi et le Haut-Barrage et Nagaa Hammadi et Louqsor. La Corée du Sud a établi la plus grande station de raffinage de pétrole en Egypte, permettant ainsi au pays de ne plus dépendre des importations d’énergie et générant des emplois. Nous espérons que notre portefeuille de coopération s’élargira dans les domaines de l’énergie renouvelable et des industries amies de l’environnement, comme les véhicules électriques, les trains à hydrogène et la conversion des remorqueurs du Canal de Suez pour qu’ils fonctionnent au gaz naturel. D’autres domaines de coopération sont également prévus comme la transformation numérique, les télécommunications et les technologies de l’information, mais aussi la culture, le tourisme et autres.

─ Le volume des investissements coréens en Egypte répond-il à ces ambitions ? Avez-vous abordé avec le côté égyptien les obstacles qui entravent l’investissement et les échanges commerciaux entre les deux pays ?

─ Le volume des échanges commerciaux entre l’Egypte et la Corée du Sud a été multiplié ces dernières années par 2 000, passant de 1,18 million de dollars en 1971 à 2,3 milliards de dollars en 2021. C’est une hausse non négligeable si l’on prend en considération la hausse du volume total du commerce coréen au cours de la même période. Le volume de l’investissement coréen en Egypte a atteint 730 millions de dollars fin 2021. Et l’on s’attend à une croissance des investissements après que les habitants du Caire avaient manifesté leur satisfaction vis-à-vis des trains électriques fabriqués en Corée. Il y a aussi la popularité des voitures coréennes en Egypte. Les voitures Hyundai ont occupé la 1re place des ventes sur le marché égyptien de l’automobile en 2020. La prochaine période verra davantage de coopération dans la lutte contre les changements climatiques et les industries amies de l’environnement.

Au cours des dernières années, on a vu naître l’espoir d’une paix dans la péninsule coréenne, mais cet enthousiasme a disparu après la pandémie. Y a-t-il du nouveau dans ce dossier ?

─ J’ai déployé des efforts continus pour instaurer la paix dans la péninsule coréenne. Nous avons réussi malgré les obstacles à faire avancer les pourparlers entre la Corée du Sud et la Corée du Nord à travers 3 sommets différents, et entre la Corée du Nord et les Etats-Unis à travers 2 autres sommets, en plus des pourparlers tripartites entre la Corée du Sud, la Corée du Nord et les Etats-Unis. La tension militaire dans la péninsule a reculé après la conclusion de l’accord militaire entre les deux Corées, le 19 septembre 2018. Mais malheureusement, il y a actuellement un état de léthargie. Il semblerait que la voie de la paix ne soit pas encore prête. Je ferai tout mon possible pour réaliser la paix. J’aspire au soutien continu de la direction égyptienne qui joue un rôle essentiel dans la stabilité de la région.

─ La pandémie de Covid-19 a causé des dégâts directs aux économies de nombreux pays. A quel point l’économie sud-coréenne a-t-elle été touchée ?

─ Le monde entier souffre de difficultés économiques à cause de la pandémie, la Corée du Sud a une très bonne réputation mondiale en tant qu’Etat exemplaire dans la lutte contre la pandémie. Nous avons fait l’équilibre entre la sauvegarde de la vie des citoyens et la réduction des dégâts économiques. Nous avons mis en place des mesures de prévention sans jamais procéder à une fermeture. Le gouvernement coréen a dirigé ses efforts vers le soutien des petits projets dont les propriétaires ont subi des dégâts économiques. Grâce à ces efforts, l’économie coréenne a surmonté la crise pandémique plus rapidement que les autres pays développés. L’année passée, nous avons réalisé le plus grand volume d’exportations de l’histoire de notre pays et nous avons réussi à garder notre position parmi les 10 plus grandes économies du monde. Il est impossible aujourd’hui de prédire quand la pandémie disparaîtra, mais il est certain que le gouvernement et le peuple sud-coréens parviendront à surmonter l’impact de la pandémie. Je souhaite que l’Egypte réussisse aussi à surmonter la crise et que la vie revienne à la normale le plus rapidement possible.

─ Pour de nombreux observateurs, l’Egypte joue un rôle important dans l’entrée des produits chinois et européens sur le marché africain. Est-ce que la Corée du Sud jouira des mêmes avantages ?

─ La Corée a donné à l’Egypte l’occasion d’entrer sur le marché asiatique et l’Egypte a donné à la Corée l’occasion d’entrer sur le marché africain. Pendant 5 années consécutives, l’Egypte a gardé sa position de plus grand pays africain en matière d’investissements étrangers. L’Egypte est un centre commercial et logistique vital qui possède des accords de libre-échange avec de nombreux pays au Proche-Orient, en Afrique et en Europe. Quant à la Corée du Sud, elle a réussi à conclure des accords de libre-échange avec de multiples Etats asiatiques, européens et américains. Ces pays représentent 85 % du PIB mondial.

Nous pouvons réaliser nos intérêts mutuels à travers la coopération commune. Les compagnies coréennes tentent de s’élargir sur les marchés africains à travers l’Egypte qui est un centre stratégique important. Des compagnies coréennes comme SamsungLG et LS produisent en Egypte et profitent des accords de libre-échange conclus par l’Egypte afin d’exporter leurs produits vers les marchés du Proche-Orient, d’Afrique et d’Europe. Nous encouragerons les investissements coréens en Egypte à l’avenir.

 
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