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Conseil des députés : Des lois et des défis

Chaïmaa Abdel-Hamid, Mardi, 19 janvier 2021

Le nouveau Conseil des députés a entamé ses travaux le 12 janvier. Plusieurs projets de loi importants attendent ce conseil qui compte désormais 80 % de nouvelles figures.

La nouvelle session parlementaire a commencé sur les chapeaux de roue. Dès la première séance, le 17 janvier, le premier ministre, Moustapha Madbouli, a été interpellé par les députés qui, après avoir examiné le plan du gouvernement présenté en juillet 2018, ont relevé plusieurs observations sur la performance de celui-ci. Il a été donc décidé, comme le stipule l’article 136 de la Constitution, d’interpeller le premier ministre. Les députés ont exigé la présence obligatoire de deux ministres à chaque séance. Un agenda régissant la présence des ministres sera envoyé au chef du gouvernement. Tout porte à croire donc que ce parlement jouera un rôle de supervision plus actif que celui du précédent.

Lundi 18 janvier, le premier ministre a fait un discours devant les députés, passant en revue le plan du gouvernement mené depuis 2018. Il a énuméré les efforts de son gouvernement en matière de développement, évoqué la réforme économique, la sécurité nationale, la sécurité hydrique et a parlé du secteur médical. Madbouli a affirmé que l’Egypte avait réussi à atteindre l’autosuffisance en gaz naturel et devrait également, d’ici 2023, atteindre l’autosuffisance en produits pétroliers. « L’année écoulée était l’une des plus difficiles de l’histoire de l’humanité en raison du Covid-19. Le gouvernement a travaillé avec le parlement pour surmonter les effets négatifs de la pandémie », a-t-il déclaré, soulignant qu’en dépit de celle-ci, l’Egypte a été l’un des rares pays au monde à réaliser une croissance économique positive, alors que le taux de chômage a baissé de 10 à 7,3 % au cours de cette année. En matière de sécurité sociale, Madbouli a rappelé que le programme Takafol wa Karama (solidarité et dignité) couvre actuellement 142 000 familles parmi les plus pauvres. Il a également évoqué les efforts déployés dans le domaine du réseau routier, qui ont permis à l’Egypte de passer du 118e au 28e rang mondial en ce qui a trait à la qualité des routes.

Le conseil avait entamé ses travaux le 12 janvier par une séance inaugurale en présence de 596 députés venus prêter serment, élire un président et former les comités parlementaires. Le parti majoritaire, Mostaqbal Watane, a remporté la présidence de 18 comités sur 25. Le conseiller Hanafi Al-Guibali, ancien président de la Haute Cour constitutionnelle, a été élu président. A présent, les députés vont devoir plancher sur l’agenda. Celui-ci n’a pas encore été fixé, mais ce parlement aura pour tâche de poursuivre le travail accompli par le parlement de 2015, souligne Chadi Mohsen, expert des affaires parlementaires. « Le précédent parlement avait sur son agenda environ 1 000 législations et lois à examiner, 800 ont été adoptées. Les lois qui restent seront donc à la tête des priorités du nouveau parlement et du gouvernement », explique-t-il. Comme stipulé par l’article 180 du règlement interne du Conseil des députés, le premier ministre, Moustapha Madbouli, a envoyé au Conseil un mémorandum renfermant les projets de lois en suspens.

Une composition plurielle

Avec 80 % de nouvelles figures, la composition du nouveau Conseil des députés est différente du précédent. Si le conseil est dominé par le parti Mostaqbal Watane, qui a remporté 55 % des sièges, il compte dans ses rangs 12 partis politiques. Il y a en plus le Comité de coordination des jeunes des partis, qui représente 27 partis et des indépendants. Les candidats indépendants possèdent 97 sièges, soit 17 % du parlement, et représentent donc le deuxième bloc parlementaire, suivi par le Comité de coordination des jeunes des partis, qui compte 32 sièges. Un autre trait marquant du nouveau parlement concerne la représentation de la femme. Celle-ci occupe 27 % des sièges (148 sièges). Selon Chadi Mohsen, il s’agit de l’un des parlements les plus pluriels de l’histoire parlementaire. « L’un des points négatifs de l’ex-parlement était la domination de la coalition Fi Daam Masr, qui dominait 85 % des sièges. Cela a permis l’approbation de certaines lois par vote majoritaire sans que celles-ci soient bien étudiées. D’ailleurs, 9 lois ont été renvoyées au parlement par le président de la République après leur approbation, dont celle sur les essais cliniques. En revanche, dans ce nouveau parlement, le parti Mostaqbal Watane ne dispose que de 55 % des sièges, ce qui ne représente pas la majorité absolue. Cela va favoriser un débat plus équilibré sur les projets de loi », pense l’expert. Vision partagée par le député indépendant Mohamad Abdel-Aziz, qui s’attend à ce que cette diversité politique enrichisse l’exercice parlementaire. « Chaque parti a un programme qu’il tentera d’appliquer à travers la législation et la supervision. Cette diversité créera un dialogue démocratique. Les partis et les députés coopéreront au service du citoyen », pense Abdel-Aziz.

Des défis à relever

Si le parlement précédent a été élu dans des conditions politiques difficiles avec la reconstruction des institutions de l’Etat, le nouveau parlement commence également sa mission en pleine crise sanitaire de Covid-19, et alors que le gouvernement accélère le pas pour achever son plan de transformation numérique. « Les députés sont face à d’énormes défis, ce qui nécessite une grande efficacité, surtout qu’il existe des projets de loi dans pratiquement tous les secteurs : santé, éducation, économie et développement », explique le député Tareq Radwan, président de la commission des droits de l’homme au parlement. Et d’ajouter que le nouveau parlement accordera un intérêt particulier aux lois renforçant les droits et les libertés. Ainsi, le Conseil des députés débattra d’importantes lois jugées prioritaires par les observateurs, dont celle sur l’administration locale qui peine à voir le jour depuis des années. Cette loi est très attendue et devrait, selon Chadi Mohsen, décentraliser financièrement et administrativement les municipalités dans tous les gouvernorats. « Cette loi devrait permettre à chaque gouvernorat de devenir une capitale à part spécialisée dans un domaine particulier : administratif, culturel, touristique, industriel, agricole et autres. Ce qui permettra de développer et de relancer les investissements », explique-t-il.

Au niveau économique, la réforme de la loi ayant trait à la taxe sur la valeur ajoutée devrait être revue pour réduire les taxes sur les produits de consommation et relancer le marché, fortement affecté par la pandémie de Covid-19. Dans le domaine de la santé, certaines législations seront sur l’agenda du parlement, dont celle sur la transfusion de sang et de plasma qui établit les règles déontologiques liées à cette opération, afin de sécuriser les essais médicaux et protéger les patients. D’autres projets de loi, telle celle sur les anciens loyers, considérée comme l’une des plus controversées dans la société, ou encore celle sur la réglementation des fatwas, attendent aussi de voir le jour.

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