Dans le but de créer une sorte d’harmonie urbaine, et d’embellir les villes, le président Abdel-Fattah Al-Sissi a ordonné le 17 janvier de peindre tous les bâtiments construits en brique rouge, en unifiant les couleurs pour éliminer « le paysage non civilisé ». Aussitôt, le premier ministre, Moustapha Madbouli, a tenu une réunion avec les gouverneurs afin d’appliquer cette nouvelle initiative. « Ces bâtiments en briques rouges véhiculent une mauvaise image de l’Egypte », a déclaré le premier ministre. Il a aussi fait savoir que les habitants qui s’abstiennent d’appliquer cette décision pourraient faire l’objet de poursuites judiciaires.
Le choix des couleurs des bâtiments ne sera pas fait au hasard. Le porte-parole du ministère du Développement local, Khaled Qassem, a confié qu’un comité sera créé dans les prochains jours afin d’étudier les mécanismes d’application de cette décision. « Une coordination entre les gouvernorats et l’Organisme national de l’harmonie urbaine aura lieu afin de déterminer une couleur unifiée pour chaque gouvernorat conformément à sa nature et à son environnement ». Ainsi, les bâtiments du Caire et du sud du pays seront peints en beige, la couleur du sable, tandis que les bâtiments des villes côtières seront peints en bleu. Mohamad Abou-Seada, président de l’Organisme national de l’harmonie urbaine, a déclaré que le gouvernement commencera par peindre les bâtiments en briques rouges.
Certains gouvernorats ont en effet commencé à appliquer cette initiative, notamment Le Caire, Kafr Al-Cheikh et Port-Saïd où le gouverneur a fixé un délai de deux mois pour peindre tous les bâtiments en briques rouges. En cas de refus des habitants, les immeubles seront privés de services fondamentaux comme l’électricité et l’eau.
Toujours selon Abou-Seada, cette initiative n’est dans le fond qu’une application de la loi. Raison pour laquelle cette opération sera réalisée aux frais des propriétaires des immeubles et non pas de l’Etat. La loi 119/2008 sur la construction unifiée interdit l’introduction de services comme l’eau et l’électricité dans un immeuble avant de peindre la façade. Tous les immeubles restés sans peinture ont violé cette loi et les services qui leur sont fournis sont illégaux. Des centaines de bâtiments ont été construits illégalement durant la révolution de 2011 dans les zones urbaines et rurales.
Nécessaire, mais difficile
L’urbaniste Medhat Al-Chazli salue cette décision qui, selon lui, mettra fin à l’image négative des villes égyptiennes, déformées par ces immeubles. Cependant, la décision sera difficile à appliquer, estime-t-il. « Cette action est nécessaire, mais il faut avouer que son application ne sera pas facile, vu qu’elle compte principalement sur les citoyens », explique-t-il. Et d’ajouter : « La grande majorité de ceux qui habitent dans des immeubles en briques rouges appartiennent à la classe pauvre, ou sont des personnes qui ont acheté ces bâtiments dans cet état. Ils devront assumer les frais de peinture ». Selon les experts, les frais de peinture d’un bâtiment de cinq étages construit sur 200 m2 va de 30 000 à 50 000 L.E.
Un avis partagé par le député Mohamad Al-Husseini, vice-président de la commission des municipalités au parlement, qui estime que le vrai problème, c’est que les citoyens ne savent toujours pas comment ils vont se comporter face à cette décision. « Jusqu’à présent, le gouvernement n’a pas informé le parlement des étapes de l’application de ce plan. Nous ne savons même pas s’il s’agira uniquement de peindre les immeubles en briques rouges ou tous les bâtiments. Certains gouverneurs ont même commencé à parler de sanctions », explique le député qui conclut : « Il faut absolument trouver un moyen d’appliquer cette décision sans alourdir le fardeau qui pèse sur les citoyens ».
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